Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 8 octobre 2020 et le 18 mars 2021, M. D... B..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 8 septembre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 mai 2020 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit ;
3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire en qualité de parent d'enfant français ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits et des libertés fondamentales.
Par des mémoires, enregistrés le 9 mars 2021 et le 26 avril 2021, le préfet du
Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- et les observations de M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant congolais, né en 1979, est entré en France, selon ses déclarations, en 2011. A la suite de son mariage avec une ressortissante française avec laquelle il a eu une fille, née en 2013, le préfet lui a délivré un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français, renouvelé jusqu'au 16 juillet 2019. Par un arrêté du 6 mai 2020, le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit. Par un jugement du 8 septembre 2020, dont M. B... fait appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ".
3. Il n'est pas contesté que M. B... est parent d'une enfant de nationalité française, née en 2013, qu'il a reconnue. Il ressort des pièces du dossier que le requérant contribue, dans la mesure de ses facultés financières en l'absence d'emploi, à l'entretien et à l'éducation de sa fille, notamment en envoyant à sa mère de l'argent par mandats cash ainsi que des cadeaux pour sa fille. En outre, il ressort des factures d'une société de transport et d'attestations du directeur de l'OGEC Notre Dame de la Délivrande, corroborées par une attestation de la mère de l'enfant, que M. B... prend en charge les frais de transports scolaires et de scolarité de sa fille. Il ressort également des pièces du dossier, notamment d'une carte de fête des pères réalisée en classe de maternelle par sa fille et d'extraits de discussions via l'application " whatsapp ", que l'intéressé a maintenu des liens affectifs avec sa fille, en dépit de sa résidence en Martinique. Si le préfet se prévaut notamment d'un courriel du 4 mars 2021 du directeur de l'OGEC Notre Dame de la Délivrande selon lequel les frais de scolarité de la fille de M. B... ont été réglées par la mère, le requérant établit par les pièces qu'il a produites que ce règlement a été possible en raison des sommes qu'il lui envoie par mandats cash. Dans ces conditions, à la date de la décision en litige, M. B... doit être regardé comme justifiant contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant depuis au moins deux ans. Il s'ensuit que le requérant est fondé à soutenir qu'en refusant de renouveler son titre de séjour en qualité de parent d'un enfant français, le préfet a fait une inexacte application des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La décision de refus de titre de séjour contestée doit, pour ce motif, être annulée ainsi que par voie de conséquence les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 mai 2020 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Le motif d'annulation retenu par le présent arrêt implique nécessairement qu'il soit enjoint au préfet du Haut-Rhin de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " en application de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais de l'instance :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B... de la somme de 1 500 euros au titre des frais liés à l'instance en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du 8 septembre 2020 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 6 mai 2020 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de délivrer à M. B... un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet du Haut-Rhin de délivrer à M. B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Me A... pour M. D... B... en application des dispositions de l'article 6 du décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet du Haut-Rhin.
N° 20NC02951 2