Résumé de la décision
La cour d’appel a été saisie par le préfet de Meurthe-et-Moselle suite à l’annulation par le tribunal administratif de Nancy d'un arrêté refusant à M. C...B..., ressortissant tunisien, la délivrance d’un titre de séjour "salarié". M. B... était en France depuis 2011 et travaillait en tant que boulanger depuis 2015, disposant d’un contrat à durée indéterminée. La cour a rejeté la requête du préfet, confirmant que le refus de titre de séjour était entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de M. B.... Elle a également accordé une somme de 1 500 euros à M. B... au titre des frais de justice.
Arguments pertinents
1. Inapplicabilité des conditions stricte du Code : La décision souligne que, bien que M. B... ne remplisse pas toutes les conditions du Code de l'entrée et du séjour des étrangers (notamment en matière de visa de long séjour), il ne peut pas être disqualifié de la possibilité d'obtenir un titre de séjour en vertu de l'accord franco-tunisien, qui prévaut pour les ressortissants tunisiens. La cour affirme : "un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour… ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14".
2. Pouvoir discrétionnaire du préfet : La cour rappelle que même en l'absence de conditions de droit, le préfet dispose d'un pouvoir discrétionnaire pour délivrer un titre de séjour sur la base de la situation personnelle de l’intéressé.
3. Erreurs manifestes dans l'appréciation : Le tribunal a constaté que le préfet avait commis une "erreur manifeste dans l'appréciation" des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle de M. B.... Il résidait en France depuis plusieurs années, avait des liens personnels et professionnels stables, et menait une vie intégrée.
Interprétations et citations légales
#
L'accord franco-tunisien
L'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 est pertinent ici, car il stipule la délivrance de titres de séjour pour les activités salariées, contournant ainsi certaines des conditions énoncées dans le Code. Cela suggère que la régularisation peut être envisagée au-delà du strict cadre légal établi par le code national.#
Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
L'article L. 313-14 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est crucial car il fixe les conditions des étrangers pour séjourner en France pour une activité salariée. La cour a établi que les stipulations de cet article ne prenaient pas en compte les facilités prévues par l’accord international applicable.#
Article L. 761-1 du Code de justice administrative
Cet article permet de condamner l'État à payer des frais de justice dans certaines affaires administratives. La cour a décidé de faire usage de cet article pour ordonner à l'État de verser 1 500 euros à M. B... : "Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B... de la somme de 1 500 euros".En conclusion, la décision repose sur une interprétation équilibrée des accords internationaux et des droits des étrangers en France, affirmant l'importance de prendre en compte les situations personnelles des demandeurs dans la gestion des demandes de titres de séjour.