Procédures devant la cour :
I - Par une requête, enregistrée sous le n° 1900743, le 11 mars 2019, le préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 13 février 2019.
Il soutient qu'il établit la régularité de la procédure suivie devant le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2019, Mme D..., représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat le versement à Me A..., son avocat, d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que les moyens soulevés par le préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin ne paraissent pas sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 25 juillet 2018 du préfet du Bas-Rhin.
II - Par une requête, enregistrée sous le n° 1900744, le 11 mars 2019, le préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 13 février 2019.
Il soutient qu'il établit la régularité de la procédure suivie devant le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2019, M. D..., représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat le versement à Me A..., son avocat, d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que les moyens soulevés par le préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin ne paraissent pas sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 25 juillet 2018 du préfet du Bas-Rhin.
III- Par une requête, enregistrée sous le n° 1900745, le 11 mars 2019, le préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 13 février 2019 ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme D... devant le tribunal administratif de Strasbourg tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juillet 2018 refusant de renouveler son titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination.
Il soutient que :
- il justifie de la régularité de la procédure suivie devant le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- les pièces produites par la requérante ne sont pas de nature à remettre en cause l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de Mme D... ;
- ses deux jeunes enfants pourront poursuivre leur scolarité dans leur pays d'origine ;
- Mme B..., signataire de l'arrêté du 25 juillet 2018, était compétente à cette fin ;
- les risques allégués en cas de retour de Mme D... dans son pays d'origine ne sont pas établis.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2019, Mme D..., représentée par Me A..., conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident :
- à l'annulation, pour excès de pouvoir, de l'arrêté du 25 juillet 2018 par lequel le préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination
- à ce qu'il soit enjoint au préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin, de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, le tout dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me A..., son avocat, d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la compétence de l'auteur de l'acte n'est pas établie ;
- l'avis du 14 mai 2018 du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne se prononce pas sur la possibilité pour Mme D... de bénéficier de soins effectifs dans son pays d'origine, ce qui entache la procédure d'irrégularité ;
- le préfet, qui s'est estimé à tort en situation de compétence liée, a méconnu l'étendue de sa compétence ;
- l'interruption de son traitement aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour elle, contrairement à ce qu'a estimé le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- elle ne sera pas en mesure de bénéficier de soins appropriés à son état de santé en Albanie ;
- elle aurait dû bénéficier des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant refus de titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale normale ;
- elle méconnaît l'intérêt supérieur de ses enfants ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- l'illégalité du refus de renouvellement de son titre de séjour entache d'illégalité l'obligation de quitter le territoire français ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les 7° et 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
IV - Par une requête, enregistrée sous le n° 1900746, le 11 mars 2019, le préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 13 février 2019 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. D... devant le tribunal administratif de Strasbourg tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juillet 2018 refusant de renouveler son titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination.
Il soutient que :
- il justifie de la régularité de la procédure suivie devant le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- les pièces produites par M. D... ne sont pas de nature à remettre en cause l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de M. D... ;
- ses deux jeunes enfants pourront poursuivre leur scolarité dans leur pays d'origine ;
- Mme B..., signataire de l'arrêté du 25 juillet 2018, est compétente à cette fin ;
- les risques allégués en cas de retour de M. D... dans son pays d'origine ne sont pas établis.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2019, M. D..., représenté par Me A..., conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident :
- à l'annulation, pour excès de pouvoir, de l'arrêté du 25 juillet 2018 par lequel le préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
- à ce qu'il soit enjoint au préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin, de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, le tout dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me A..., son avocat, d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la compétence de l'auteur de l'acte n'est pas établie ;
- il aurait dû bénéficier des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant refus de titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale normale ;
- elle méconnaît l'intérêt supérieur de ses enfants ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- l'illégalité du refus de renouvellement de son titre de séjour entache d'illégalité l'obligation de quitter le territoire français ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les 7° et 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
M. et Mme D... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 28 mai 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C..., présidente assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Des notes en délibéré présentées par M. et Mme D... ont été enregistrées le 13 novembre 2019 dans chacune des quatre requêtes.
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes, enregistrées sous les nos 19NC00743, 19NC00744, 19NC00745 et 19NC00746 sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
2. M. et Mme D..., ressortissants albanais, nés respectivement le 10 août 1976 et le 2 mai 1990, sont entrés irrégulièrement en France, le 8 avril 2014 avec leur fils Axel, né le 28 février 2012. Leur fille Herta est née en France, le 11 juillet 2014. Les demandes d'asile de M. et Mme D... ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, le 20 novembre 2014. La Cour nationale du droit d'asile a confirmé ces décisions le 12 mai 2015. Un titre de séjour a cependant été délivré à Mme D... en raison de son état de santé. Son mari a, en conséquence, également obtenu un titre de séjour. Par des arrêtés du 25 juillet 2018, le préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin a cependant refusé de renouveler le titre de séjour de M. et Mme D..., les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils seront renvoyés. Par un jugement du 13 février 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé les arrêtés du 25 juillet 2018. Le préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin relève appel de ce jugement. Il demande également qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Aux termes du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ". En vertu de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. ". Aux termes de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle (...) ".
4. D'une part, il ne résulte d'aucune des dispositions citées au point précédent, non plus que d'aucun principe, que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration devrait porter mention du nom du médecin qui a établi le rapport médical, prévu par l'article R. 313-22, qui est transmis au collège de médecins de l'Office.
5. D'autre part, il ressort des pièces produites à l'appui de sa requête par le préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin, que le collège de médecins qui a examiné la situation de Mme D..., le 14 mai 2018, était composé des Dr. Banazouz, Haddad et Mbomeyo, tous trois signataires de cet avis. Le bordereau transmis par l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 16 mai 2018 précise que le Dr. Quillot a établi le rapport médical au vu duquel le collège de médecins de l'Office s'est prononcé. Par suite, le médecin ayant rédigé le rapport médical n'a pas siégé au sein du collège qui a émis l'avis du 14 mai 2018 sur la situation de Mme D....
6. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du 25 juillet 2018 refusant de renouveler le titre de séjour de Mme D... en raison du vice de procédure dont il était entaché et, par voie de conséquence, l'arrêté du même jour refusant de délivrer un titre de séjour à M. D....
7. Par suite, le jugement du 13 février 2019 du tribunal administratif de Strasbourg doit être annulé. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme D....
Sur les conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 25 juillet 2018 en ce qu'il concerne Mme D... :
En ce qui concerne la compétence de l'auteur de l'acte :
8. Par un arrêté du 18 octobre 2017, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le 20 octobre 2017, le préfet du Bas-Rhin a donné à Mme Nadia B..., secrétaire générale adjointe, délégation pour signer, en cas d'absence ou d'empêchement du secrétaire général, tous arrêtés et décisions, à l'exclusion de certains actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions prises en matière de droit des étrangers. Il n'est ni établi, ni même allégué que le secrétaire général de la préfecture n'aurait pas été empêché ou absent le jour de la signature de l'arrêté attaqué. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'arrêté en litige doit être écarté.
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
9. En premier lieu, il résulte des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile citées au point 3 du présent arrêt, qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre de ces dispositions, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire.
10. D'une part, il ressort des pièces du dossier que, par un avis du 14 mai 2018, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de Mme D... nécessitait des soins médicaux et que le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour elle. Cet avis précise, en outre, qu'elle peut voyager sans risque vers son pays d'origine.
11. D'autre part, en l'absence de conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge médicale de la pathologie de Mme D..., le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'avait pas à examiner l'existence d'un traitement approprié à son affection dans son pays d'origine.
12. En outre, ainsi qu'il est dit au point 5, le médecin qui a établi le rapport médical n'a pas siégé au sein du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui a examiné l'état de santé de Mme D....
13. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure entachant l'arrêté du 25 juillet 2018 doit être écarté.
14. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin, qui a procédé à un examen complet de la situation de Mme D..., se serait estimé, à tort, en situation de compétence liée par l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et aurait ainsi méconnu l'étendue de sa compétence.
15. En troisième lieu, la partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
16. Mme D... est atteinte d'une pathologie psychiatrique contractée pendant l'enfance. Elle est affectée d'une dépression mélancolique sévère, forme la plus grave de la dépression, accompagnée d'idées suicidaires récurrentes. Elle bénéficie d'une psychothérapie soutenue avec des consultations une à trois fois par mois ainsi que d'un traitement par médicaments. Le certificat médical du 20 septembre 2018 du psychiatre qui assure son suivi selon lequel l'interruption des soins aurait des conséquences d'une extrême gravité pour Mme D... et mettrait en jeu son pronostic vital à court terme, n'est cependant pas de nature à remettre en cause l'appréciation du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui s'est fondé sur les mêmes éléments médicaux dans son avis du 14 mai 2018 tout en estimant que le défaut de prise en charge de l'affection de Mme D... ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. En outre, Mme D... n'établit pas qu'elle ne serait pas en mesure de disposer d'un traitement approprié à son état de santé en Albanie.
17. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
18. En quatrième lieu, aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". L'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".
19. Il ressort des pièces du dossier que Mme D... est arrivée récemment en France en 2014 avec son mari. Les deux jeunes enfants du couple, nés en 2012 et en 2014, ont vocation à accompagner leurs parents. Le renouvellement du titre de séjour de M. D... a également été refusé et une obligation de quitter le territoire français lui a été notifiée. Par suite, le refus de titre de séjour ne porte pas une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de Mme D.... Elle ne saurait, en outre, utilement invoquer la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle a demandé le renouvellement de son titre de séjour en qualité de ressortissante étrangère malade sur le fondement du 11° des mêmes dispositions.
20. En cinquième lieu, il résulte des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
21. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les deux enfants de Mme D..., nés en 2012 et en 2014, ne pourraient pas poursuivre leur scolarité en Albanie. Eu égard à leur jeune âge, ils ont, en outre, vocation à accompagner leurs parents. Un refus de titre de séjour et une obligation de quitter le territoire français ont été notifiés à M. et Mme D.... Leur cellule familiale sera ainsi préservée en cas d'éloignement vers leur pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
22. En dernier lieu, pour les motifs exposés précédemment, le moyen tiré de ce que le refus de titre de séjour opposé à Mme D... serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation en raison de ses conséquences sur sa vie privée et familiale et sur son état de santé, doit être écarté.
23. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions présentées par Mme D... tendant à l'annulation du refus de titre de séjour qui lui a été opposé doivent être rejetées.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
24. En premier lieu, il résulte de ce qui est dit au point précédent que le moyen soulevé, par voie d'exception, tiré de l'illégalité du refus de titre de séjour opposé à Mme D... doit être écarté.
25. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".
26. Le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté pour les même motifs que ceux énoncés aux points 5 et 9 à 17 du présent arrêt. Il en est de même du moyen tiré de ce que Mme D... ne pourrait pas faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, dès lors qu'elle aurait dû se voir délivrer un titre de séjour en application du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
27. En troisième lieu, ainsi qu'il est dit au point 19 du présent arrêt, Mme D... est arrivée en France récemment. Son époux, auquel une obligation de quitter le territoire français a été notifiée et ses deux enfants, nés en 2012 et en 2014, ont vocation à l'accompagner en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de ce que Mme D... ne pourrait pas faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, dès lors qu'elle aurait dû se voir délivrer un titre de séjour en application du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit être écarté.
28. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'obligation de quitter le territoire français opposée à Mme D... serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme D... devrait nécessairement bénéficier de soins médicaux en France.
29. Il résulte de ce qui précède que les conclusions présentées par Mme D... tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de l'obligation de quitter le territoire français, doivent être rejetées.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
30. L'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants.". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ".
31. La demande d'asile de Mme D... a été rejetée définitivement. Alors même que ce rejet ne lie pas le préfet, Mme D... ne fait cependant état d'aucun élément nouveau quant aux risques pour sa vie et sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine en produisant le récit joint à sa demande d'asile. En outre, elle n'établit pas qu'elle ne sera pas en mesure de bénéficier d'un traitement approprié à sa pathologie dans son pays d'origine et qu'un tel retour s'accompagnerait nécessairement d'une dégradation de son état de santé.
32. Par suite, les conclusions présentées par Mme D... tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination doivent être rejetées.
33. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions présentées par Mme D... tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juillet 2018 du préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin doivent être rejetées, y compris ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte.
Sur les conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 25 juillet 2018 en ce qu'il concerne M. D... :
En ce qui concerne la compétence de l'auteur de l'acte :
34. Le moyen tiré de l'incompétence de Mme B... pour signer l'arrêté du 25 juillet 2019 refusant de renouveler le titre de séjour à M. D..., l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination doit être écarté par les mêmes motifs que ceux énoncés au point 8 du présent arrêt.
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
35. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. D... est arrivé récemment en France en 2014 avec son épouse. Les deux jeunes enfants du couple, nés en 2012 et en 2014, ont vocation à accompagner leurs parents. Le renouvellement de son titre de séjour a été refusé à Mme D..., à laquelle une obligation de quitter le territoire français a également été notifiée. Par suite, le refus de titre de séjour ne porte pas une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de M. D.... Il ne méconnaît pas davantage le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
36. En deuxième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté par les mêmes motifs que ceux exposés au point 21 du présent arrêt.
37. En dernier lieu, eu égard à la présence récente de M. D... en France et à l'absence d'atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entaché le refus de titre de séjour qui lui a été opposé ne peut qu'être écarté.
38. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions présentées par M. D... tendant à l'annulation du refus de titre de séjour qui lui a été opposé doivent être rejetées.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
39. En premier lieu, il résulte de ce qui est dit au point précédent que le moyen soulevé, par voie d'exception, tiré de l'illégalité du refus de titre de séjour opposé à M. D... doit être écarté.
40. En deuxième lieu, le moyen tiré de ce qu'aucune obligation de quitter le territoire français ne peut être légalement opposée à M. D..., dès lors qu'un titre de séjour doit lui être délivré sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté par les motifs exposés au point 35 du présent arrêt. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme D... devrait nécessairement bénéficier de soins médicaux en France et qu'ainsi aucune obligation de quitter le territoire français ne pourrait leur être opposée.
41. En dernier lieu, le moyen d'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté par les motifs exposés au point 37 du présent arrêt.
42. Il résulte de ce qui précède que les conclusions présentées par M. D... tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de l'obligation de quitter le territoire français, doivent être rejetées.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
43. Le moyen tiré de ce que le renvoi de M. D... dans son pays d'origine entraînerait des risques pour sa vie et sa sécurité doit être écarté par les motifs exposés au point 31 du présent arrêt.
Sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement attaqué :
44. Aux termes de l'article R. 811-14 du code de justice administrative : " Sauf dispositions particulières, le recours en appel n'a pas d'effet suspensif s'il n'en est autrement ordonné par le juge d'appel dans les conditions prévues par le présent titre. ". Selon l'article R. 811-15 du même code : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement. ".
45. Le présent arrêt statuant sur les requêtes du préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin tendant à l'annulation du jugement du 13 février 2019 du tribunal administratif de Strasbourg, les conclusions présentées par le préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont devenues sans objet. Il n'y a plus lieu d'y statuer.
Sur les frais liés au litige :
46. Les dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demandent M. et Mme D... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les requêtes nos 19NC00743 et 19NC00744.
Article 2 : Le jugement du 13 février 2019 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.
Article 3 : Les demandes présentées par M. et Mme D... devant le tribunal administratif de Strasbourg sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions présentées par Me A..., avocat de M. et Mme D..., au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... D..., à Mme E..., épouse D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin.
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Nos 19NC00743, 19NC00744, 19NC00745 et 19NC00746