Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 mars 2020, M. A... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 3 octobre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 10 décembre 2018 ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
sur la décision portant refus de titre de séjour :
- elle méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle est entachée d'une erreur de droit, dès lors que, devant se voir attribuer de plein droit un titre de séjour en application des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ne pouvait légalement faire l'objet d'une mesure d'éloignement ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
sur la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 mai 2020, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... B... ne sont pas fondés.
M. A... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 février 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Roussaux, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., né le 24 décembre 1991, de nationalité ghanéenne, est entré en France muni d'un visa de court séjour valable du 10 octobre 2017 au 24 novembre 2017. L'intéressé a sollicité le 20 novembre 2017 son admission au séjour au titre de sa vie privée et familiale. Par un arrêté du 10 décembre 2018, le préfet du Bas-Rhin lui a refusé le séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... B... relève appel du jugement du 3 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce dernier arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) " Aux termes des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
3. Il ressort des pièces versées au dossier que le requérant est entré sur le territoire français entre octobre et novembre 2017 et ne justifie que de 14 mois de présence en France à la date de l'arrêté attaqué. Ainsi, il a vécu la majeure partie de sa vie dans son pays d'origine, qu'il n'a quitté qu'à l'âge de 26 ans. Il a vécu séparé de son père pendant 15 ans, lequel s'est installé en France en 2002 et a reconstruit sa propre cellule familiale avec sa seconde épouse et leurs trois enfants. Par ailleurs, le requérant a vécu chez son oncle lorsque sa mère est décédée en 2012, de sorte qu'il ne saurait valablement soutenir qu'il n'a plus d'attaches au Ghana. La circonstance que le père de l'intéressé lui versait régulièrement de l'argent lorsqu'il était encore au Ghana n'est pas de nature à attester de l'intensité des liens entretenus avec les membres de sa famille résidant en France. Enfin, le requérant qui se borne à produire une attestation de cours de français datée de février 2019, n'apporte aucun élément tendant à démontrer une insertion sur le territoire français, tant sur un plan privé que professionnel. Par suite, au regard de la durée et des conditions de son séjour en France, M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet, en lui refusant le séjour, aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Le préfet n'a ainsi méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales précité, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
4. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour.
5. En deuxième lieu, eu égard à ce qui a été dit au point 3, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
6. En troisième lieu, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure d'éloignement à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour. Lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 du présent arrêt que le requérant ne remplit pas les conditions pour obtenir la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de ce que le préfet ne pouvait prendre une mesure d'éloignement au motif qu'il peut prétendre au bénéfice d'un titre de de séjour de plein droit sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit ainsi être écarté.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
7. Eu égard à ce qui a été dit précédemment, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et d'obligation de quitter le territoire, ne peut qu'être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 10 décembre 2018 ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
2
N° 20NC00705