Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 19 décembre 2018, Mme H..., veuve E..., représentée par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 27 novembre 2018 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 15 mai 2018 du préfet du Bas-Rhin ;
3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et de réexaminer sa demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt, le tout sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de fait, d'une erreur de droit et d'une insuffisance de motivation en ce qu'il se prononce sur le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte contesté ;
- l'arrêté contesté a été pris par une autorité incompétente dès lors que le secrétaire général n'était ni absent, ni empêché à la date à laquelle il a été signé ;
- cet arrêté a été pris au terme d'une procédure irrégulière dès lors que le nom du médecin rapporteur ne figure pas dans l'avis rendu par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, et qu'il n'est pas établi que le médecin rapporteur n'aurait pas siégé au sein de ce collège ;
- le préfet a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a omis de procéder à un examen sérieux de sa situation et, de ce fait, a entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet du Bas-Rhin qui n'a pas produit de mémoire.
Mme H... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 février 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Antoniazzi, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... H..., veuve E..., ressortissante arménienne, est entrée en France en février 2015, selon ses déclarations. Elle a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'Office français des réfugiés et des apatrides (OFPRA) le 16 septembre 2015, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 30 juin 2016. Elle a ensuite bénéficié d'autorisations provisoires de séjour jusqu'au 10 juillet 2018 en tant qu'accompagnante de sa mère, titulaire d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 15 mai 2018, le préfet du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine. Mme H... fait appel du jugement du 27 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort du jugement attaqué que le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments de la requérante, a suffisamment répondu au moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté. Si Mme H... soutient également que les juges ont commis une erreur de fait et une erreur de droit concernant la compétence du signataire de l'arrêté en litige, de tels moyens ont trait au bien-fondé de la réponse que le tribunal y a apporté et sont sans incidence sur sa régularité. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. En premier lieu, par un arrêté du 18 octobre 2017, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 20 octobre 2017, le préfet du Bas-Rhin a donné à M. C..., secrétaire général de la préfecture, délégation pour signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports et correspondances administratives diverses relevant des attributions de l'Etat dans le département, et, en cas d'absence ou d'empêchement de ce dernier, à Mme B..., secrétaire générale adjointe. Au nombre des exclusions de la délégation ne figurent pas les décisions en litige. Il appartient à la partie qui conteste la qualité du délégataire pour signer l'arrêté attaqué d'établir que le secrétaire général de la préfecture n'était ni absent ni empêché. Or, la seule circonstance que M. C... ait signé d'autres décisions administratives le 4 juillet 2018 n'est pas par elle-même de nature à établir que ce dernier n'était pas absent ou empêché lorsque la décision litigieuse a été signée par Mme B.... Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté manque en fait et doit être écarté.
4. En deuxième lieu, dans sa requête, Mme H... se borne à reprendre le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure entachant le refus de délivrance d'un titre de séjour opposé à sa mère sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans l'assortir d'aucune justification nouvelle ni d'aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause le bien-fondé du jugement attaqué. Dès lors, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges.
5. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme H... avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infrastructures pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
7. Il ressort des pièces du dossier que Mme H..., entrée en France à l'âge de cinquante-et-un ans, est célibataire et sans enfant à charge. Si elle réside chez son fils, titulaire d'une carte de séjour temporaire en France, il ressort toutefois des pièces du dossier que sa mère et son autre fils sont également en situation irrégulière sur le territoire et qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a elle-même vécu la majeure partie de sa vie. Par suite, eu égard aux conditions et à la durée du séjour de Mme H... en France, la décision de refus de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations et des dispositions précitées doit être écarté.
8. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point ci-dessus, le moyen tiré de ce que le préfet du Bas-Rhin aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision en litige quant à sa situation personnelle doit être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme H... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme H... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... H..., veuve E... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
Délibéré après l'audience du 24 septembre 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme D..., présidente,
- Mme Antoniazzi, premier conseiller,
- M. Michel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 octobre 2019.
Le rapporteur,
Signé : S. AntoniazziLa présidente,
Signé : C. D...
La greffière,
Signé : F. Dupuy
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
F. Dupuy
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N°18NC03411