Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 7 avril 2014, M.C..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 6 février 2014 ;
2°) d'annuler la décision du 16 juin 2011 rejetant sa réclamation ;
3°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2006 ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal était irrégulièrement composé ;
- en ne se prononçant pas sur le caractère indirect de la cession et en ne définissant pas la notion d'entreprise mentionnée au point 4 de sa décision, le tribunal a insuffisamment motivé son jugement ;
- le jugement est entaché de contradiction de motifs ;
- il a légitimement estimé avoir procédé à une cession indirecte des parts sociales, au sens du 3° de l'article 150-0 A I du code général des impôts, par l'intermédiaire de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) créée par son fils pour cette opération ;
- le 3° de l'article 150-0 A I du code général de l'impôt, qui ne répond pas à l'exigence de clarté de la loi, est contraire à la Constitution ;
- en lui opposant la réponse ministérielle Ligot qui n'admet le bénéfice de l'exonération qu'au profit d'une société de personnes relevant de l'article 8 du code général des impôts, l'administration méconnaît le principe d'égalité des citoyens devant la loi ;
- l'avis d'imposition supplémentaire, qui n'est pas suffisamment motivé, le prive d'une garantie d'information conforme à l'article L. 253 du livre des procédures fiscales ;
- la décision du 16 juin 2011 rejetant sa réclamation est entachée d'incompétence ;
- elle est insuffisamment motivée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le recours pour excès de pouvoir formé contre la décision de rejet de la réclamation n'est pas recevable ;
- les moyens tirés de l'incompétence du signataire de la décision de rejet de la réclamation et de l'insuffisance de motivation de cette décision sont sans incidence sur la régularité et le bien-fondé de l'imposition ;
- les autres moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Aubert,
- les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public,
- et les observations de Me A...pour M.C....
1. Considérant que M.C..., ingénieur actuellement à la retraite, a exercé son activité de réalisation d'études techniques destinées au secteur de l'industrie dans le cadre de la société à responsabilité limitée (SARL) " C...Recherche ", dont il détenait vingt-quatre des cinquante parts sociales, les vingt-six autres parts étant détenues par son fils, M. B...C... ; que, le 29 décembre 2006, il a cédé l'intégralité de ses parts à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Barfi dont M. B...C...était l'unique associé ; qu'estimant que cette cession, réalisée au prix de 328 128 euros, entrait dans le champ d'application de l'exonération d'imposition prévue par le 3° du I de l'article 150-0 A du code général des impôts, il n'a pas déclaré la plus-value ainsi réalisée ; que le bénéfice de cette exonération ayant été remis en cause par le service, il a saisi le tribunal administratif de Nantes d'une demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre de l'année 2006 ; qu'il relève appel du jugement du 6 février 2014 par lequel le tribunal a rejeté cette demande ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant que le moyen tiré de l'irrégularité de la composition de la formation de jugement n'est pas assorti de précisions suffisantes pour permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé ;
3. Considérant qu'en indiquant au point 2 du jugement que " le législateur a entendu faire bénéficier de l'exonération la cession de parts sociales aux seules personnes physiques " et à son point 3 que " M. C...ne conteste pas que l'EURL Barfi est une société dotée d'une personnalité distincte de celle de son associé unique ", les premiers juges ont répondu au moyen invoqué par le requérant tiré de la possibilité pour le cédant de bénéficier de l'exonération d'imposition prévue par le 3° du I de l'article 150-0 A du code général des impôts lorsque la cession est indirectement consentie à un descendant par l'intermédiaire d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée ; qu'ayant écarté, au point 4 du même jugement, la possibilité d'invoquer le paragraphe 20 de l'instruction administrative 7 D-1-09 du 2 avril 2009 au motif qu'elle ne porte pas sur l'exonération dont le bénéfice est demandé mais sur les droits de mutation à titre onéreux applicables dans le cas de la reprise d'une entreprise, ils n'avaient pas à définir la notion d'entreprise ainsi employée ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement doit, dès lors, être écarté ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision de rejet de la réclamation :
4. Considérant que la décision de rejet de la réclamation de M. C...prise par le directeur des finances publiques du Maine-et-Loire le 16 juin 2011, qui n'est pas détachable de la procédure d'imposition, n'est pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; qu'il suit de là que les conclusions tendant à son annulation qui, au surplus sont nouvelles en appel, sont irrecevables ; qu'elles doivent, dès lors, être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à la décharge de l'imposition :
5. Considérant qu'en refusant le bénéfice de l'exonération prévue par le 3° du I de l'article 150-0 A du code général des impôts au motif que le requérant n'avait pas cédé ses parts dans la société " C...Recherche " directement à son fils mais par l'intermédiaire d'une EURL après avoir indiqué, au considérant 3 de son jugement que la réponse ministérielle invoquée " ne restreint pas le champ d'application de la loi mais au contraire, en a une interprétation extensive profitant aux contribuables dès lors qu'elle permet aux sociétés de personnes relevant de l'article 8 du code général des impôts, de pouvoir intégrer le groupe familial ", les premiers juges ont entaché leur jugement d'une contradiction de motifs qui en affecte le bien-fondé ;
6. Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. C...tant en première instance qu'en appel ;
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
7. Considérant que les irrégularités qui peuvent entacher un avis relatif à une imposition recouvrée par voie de rôle sont sans incidence sur la régularité ou le bien-fondé de l'imposition que cet avis met à la charge du contribuable ; qu'il suit de là que la circonstance que l'avis d'imposition adressé à M. C...ne se réfère pas à une procédure de rectification et ne comporterait pas des précisions suffisantes relatives à la nature et au montant des impositions contestées n'est pas utilement invoquée ;
En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :
8. Considérant qu'aux termes du 3° du I de l'article 150-0 A du code général des impôts : " Lorsque les droits détenus directement ou indirectement par le cédant avec son conjoint, leurs ascendants et leurs descendants dans les bénéfices sociaux d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés et ayant son siège en France ont dépassé ensemble 25 % de ces bénéfices à un moment quelconque au cours des cinq dernières années, la plus-value réalisée lors de la cession de ces droits, pendant la durée de la société, à l'une des personnes mentionnées au présent alinéa, est exonérée si tout ou partie de ces droits sociaux n'est pas revendu à un tiers dans un délai de cinq ans. A défaut, la plus-value est imposée au nom du premier cédant au titre de l'année de la revente des droits au tiers. " ; qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions que l'exonération qu'elles prévoient ne s'applique qu'aux droits cédés directement au conjoint du cédant, à ses ascendants ou à ses descendants, à l'exclusion des droits cédés indirectement à l'une de ces personnes par l'intermédiaire d'une personne morale, quels que soient la qualité et le nombre de ses associés ;
9. Considérant que l'administration a précisé, tant dans la proposition de rectification notifiée à M. C...que dans la décision de rejet de la réclamation, en se référant à la réponse ministérielle Ligot publiée le 24 août 1987 relative à l'interprétation de l'alinéa 2 du I de l'article 160 du code général des impôts applicable jusqu'au 31 mars 2000 et dont les dispositions ont été reprises par le 3° du I de l'article 150-0 A du même code, que l'exonération dont le requérant demande le bénéfice " n'est pas applicable aux apports ou cessions consentis à une société, même de structure familiale, dès lors qu'une telle société est dotée d'une personnalité juridique distincte de celle de ses membres " et qu'" une telle opération ne garantirait pas, en effet, le respect de l'obligation de conservation des droits sociaux puisqu'elle permettrait en pratique d'éluder cette condition par le biais d'une cession des titres de la société " ; que, toutefois et tout en état de cause, cette réponse ministérielle ne comportant aucune interprétation de la loi fiscale, l'administration n'a pas restreint le champ d'application de l'exonération d'imposition dont le bénéfice est demandé en s'y référant ;
10. Considérant que M. C...n'ayant pas cédé les parts qu'il détenait dans la SARL " C...Recherche " à son fils M. B...C...mais à l'EURL Barfi, la cession n'entre pas dans le champ d'application du 3° du I de l'article 150-0 A du code général des impôts alors même que ce dernier était alors l'unique associé de cette entreprise ;
11. Considérant qu'il n'appartient pas au juge administratif de se prononcer sur la conformité de la loi à la Constitution ; que le moyen tiré de ce que le 3° du I de l'article 150-0 A du code général des impôts ne répondrait pas à l'objectif à valeur constitutionnelle de clarté de la loi doit, dès lors, être écarté ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. C...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C...et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 21 janvier 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- M. Jouno, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 février 2016.
Le rapporteur,
S. AubertLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
''
''
''
''
1
N° 14NT00910 3
1