Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 avril 2014 et 5 janvier 2015, M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 18 février 2014 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la proposition de rectification qui lui a été adressée, laquelle se borne à faire référence à la proposition de rectification envoyée à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) AB Patrimoine, est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne donne pas le détail, opération par opération, des sommes réputées distribuées ;
- le vérificateur n'a pas ménagé des espaces de dialogue au sein de l'entreprise avec le requérant ;
- le tribunal administratif a fait peser la charge de la preuve sur le requérant ; il s'est ainsi mépris quant à la dévolution de celle-ci :
- les états de frais kilométriques, présentés au vérificateur par l'EURL AB Patrimoine, justifiaient du bien-fondé des remboursements de frais kilométriques consentis à M.C... ; si le vérificateur a relevé certaines doubles comptabilisations, cette circonstance ne l'autorisait pas à remettre en cause l'ensemble des charges correspondant à ces remboursements ; compte tenu de son fonctionnement, il est incohérent de refuser à l'EURL AB Patrimoine la déduction des frais de déplacement de son gérant ;
Par des mémoires en défense, enregistrés les 20 novembre 2014 et 9 février 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'en l'absence de mise en recouvrement des suppléments d'impôt au titre de l'année 2008, les conclusions y relatives sont dépourvues d'objet et que les moyens soulevés au soutien du surplus des conclusions présentées par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jouno,
- et les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public.
1. Considérant que l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) AB Patrimoine, qui avait opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ; qu'au titre des exercices clos en 2008, 2009 et 2010, cette entreprise a comptabilisé en charges les sommes respectives de 4 880,94 euros, 16 367,58 euros et 18 465,25 euros à titre de remboursement de frais de déplacement de son gérant et associé unique, M. C... ; que, par une proposition de rectification du 8 septembre 2011, l'administration a estimé que ces charges n'étaient appuyées d'aucun justificatif et les a réintégrées aux résultats de l'entreprise ; que, par une proposition de rectification du 16 décembre 2011, elle les a regardées comme des revenus distribués à M. C...sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts au titre des années 2008 et 2009 et du 2° du 1 du même article au titre de l'année 2010 ; qu'il en a résulté des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des ces années, assortis de pénalités ; que M. C...a demandé devant le tribunal administratif d'Orléans la décharge de ces impositions et pénalités ; que, par le jugement attaqué, dont il relève appel, ce tribunal a rejeté sa demande ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter, outre la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base des redressements, ceux des motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés qui sont nécessaires pour permettre au contribuable de formuler utilement ses observations ; qu'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 16 décembre 2011 adressée à M. C...comportait l'ensemble de ces mentions, précisant notamment le montant des sommes versées, mois par mois, à M. C... par l'EURL AB Patrimoine à titre de remboursement de frais de déplacements ; qu'au demeurant, si elle faisait référence à la proposition de rectification du 8 septembre 2011 adressée à l'EURL AB Patrimoine, cette dernière lui était jointe ;
3. Considérant, en second lieu, que, compte tenu de l'indépendance des procédures menées entre, d'une part, l'EURL AB Patrimoine, soumise à l'impôt sur les sociétés, et, d'autre part, son associé unique, M.C..., ce dernier ne peut utilement soutenir que le vérificateur n'a pas offert à cette entreprise la possibilité d'avoir avec lui un débat oral et contradictoire ; que M.C..., qui n'a pas fait l'objet d'une vérification de comptabilité, ne peut par ailleurs utilement invoquer la circonstance qu'un tel débat ne lui aurait pas été offert ;
Sur le bien-fondé des impositions :
4. Considérant que les rectifications, notifiées à M. C...selon la procédure contradictoire, ont été contestées par l'intéressé dans le délai légal ; que la charge de la preuve incombe ainsi à l'administration ;
5. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) " ;
6. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 1, l'EURL AB Patrimoine avait établi son bénéfice net sous déduction de sommes correspondant prétendument à des frais de déplacement engagés par M. C... ; que, toutefois, dès lors qu'aucun élément justifiant de la réalité de tels frais n'a été produit et qu'il ne résulte pas de l'instruction que ceux-ci étaient impliqués par le fonctionnement même de l'entreprise, l'administration doit être regardée comme ayant démontré que les sommes en cause devaient être réintégrées aux résultats de l'EURL AB Patrimoine ;
7. Considérant qu'il n'est pas contesté que les sommes en cause ont été versées à M. C... ; qu'au demeurant, en sa double qualité de gérant et d'associé unique de l'EURL AB patrimoine, M. C...était maître de l'affaire ; que, compte tenu de ces circonstances, l'administration justifie de ce qu'il avait appréhendé ces sommes, réputées distribuées par l'entreprise ;
8. Considérant que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par l'administration, il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, la somme que M. C...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 21 janvier 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- M. Jouno, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 février 2016.
Le rapporteur,
T. JounoLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT01015