Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 30 juin 2014, la SARL B...Frères, représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 29 avril 2014 ;
2°) de prononcer la décharge partielle des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2007, 2008 et 2009, d'autre part, des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009 et, enfin, des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.et le remboursement de la contribution à l'aide juridique acquittée tant devant le tribunal administratif d'Orléans que devant la cour.
Elle soutient que :
- elle a été privée d'un débat oral et contradictoire en ce qui concerne l'exercice clos en 2007 dès lors qu'elle n'a été informée des motifs de rehaussements qu'au cours de la réunion de synthèse qui s'est tenue postérieurement à l'envoi de la proposition de rectification ;
- la constitution d'une provision pour créance douteuse d'un montant de 64 192 euros était justifiée dans son principe au titre de chaque exercice ;
- le chiffre d'affaires qu'elle a déclaré au titre de l'exercice 2008 inclut, contrairement à ce que soutient l'administration fiscale, le produit de la vente de la construction de l'immeuble consentie au profit de son gérant, M. A...B... ;
- les apports en compte courant de M. B...sont justifiés ;
- les charges dont la déduction a été refusée à hauteur de 25 558 euros au titre de l'exercice clos en 2008 sont justifiées à hauteur de 23 920 euros ;
- les crédits inscrits sur le compte courant de M. B...correspondent aux débits du compte report à nouveau existant dans la comptabilité de la société B...et ne constituent pas en conséquence des distributions ;
- la pénalité pour manquement délibérée doit être déchargée dès lors qu'elle a justifié que l'opération de construction réalisée au profit de son gérant a été correctement comptabilisée au titre de l'année 2008.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 novembre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la SARL B...Frères ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Allio-Rousseau,
- et les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public.
1. Considérant que la société à responsabilité limitée (SARL) B...Frères exerce une activité de maçonnerie générale ; qu'elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009 ; que, par une proposition de rectification du 13 décembre 2010, pour l'année 2007, et du 21 février 2011, pour les années 2008 et 2009, l'administration a mis à sa charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2007, 2008 et 2009 d'un montant total de 59 242 euros et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période allant du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009 d'un montant total de 13 824 euros ; qu'une partie des rehaussements effectués au titre de l'exercice clos en 2008 a été assortie de la pénalité pour manquement délibéré ; que la SARL B...Frères relève appel du jugement en date du 29 avril 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge, d'une part, de ces cotisations et droits supplémentaires à hauteur de 59 242 euros en matière d'impôt sur les sociétés et de 3 920 euros en matière de taxe sur la valeur ajoutée et, d'autre part, des pénalités pour manquement délibéré appliquées au titre de l'exercice clos en 2008 ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant que, dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée, comme il est de règle, dans ses propres locaux, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat ; qu'en l'espèce, il résulte de l'instruction que la vérification de la comptabilité de la SARL B...Frères qui s'est déroulée du 8 novembre 2010 au 4 février 2011 a eu lieu dans ses locaux ; que cinq interventions ont eu lieu, en présence de son dirigeant, les 8, 22 et 26 novembre 2010 et les 3 et 10 décembre 2010, préalablement à 1'envoi de la proposition de rectification concemant 1'année 2007 ; qu'il incombe, dès lors, à la société requérante, qui conteste l'existence d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur lors de la procédure de vérification, d'établir que ce dernier se serait refusé à tout échange de vues avec elle ; qu'en se bornant toutefois à reprocher au vérificateur, alors qu'il n'y était pas tenu au regard de la loi fiscale, de ne pas avoir organisé une réunion de synthèse avant l'envoi de la proposition de rectification du 13 décembre 2010 pour exposer les motifs des rehaussements envisagés au titre de l'année 2007, la société requérante n'établit l'absence de débat oral et contradictoire au cours des opérations de vérification ;
Sur le bien-fondé des impositions :
3. Considérant, en premier lieu, que la SARL B...Frères reprend en appel, sans plus de précisions ou de justifications, le moyen qu'elle avait présenté devant le tribunal administratif d'Orléans et tiré de ce que les provisions qu'elle a constatées à la date de clôture de l'exercice 2007 étaient justifiées et en conséquence déductibles de son résultat fiscal en application du 5° du 1. de l'article 39 du code général des impôts ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable en vertu de l'article 209 en matière d'impôt sur les sociétés : " (...) / 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. " ; que la SARL B...Frères conteste la réintégration dans son résultat au titre de l'exercice clos en 2008 d'une somme de 36 848 euros, correspondant à des travaux de gros oeuvre réalisés sur deux pavillons dont M. A...B..., gérant de l'entreprise, est propriétaire et ayant fait l'objet d'une facture du 28 janvier 2008 ; que l'administration a constaté au cours des opérations de contrôle que cette facture n'a pas été enregistrée en comptabilité ; que si la SARL B...Frères fait valoir qu'elle a fait l'objet d'un avoir en raison de travaux non prévus qui ont été réalisés par la suite, aucune pièce justificative, et notamment un avoir annulant la facture initiale, n'a été présentée ; que, par ailleurs, la somme de 47 840 euros comptabilisée à la clôture de l'exercice 2008 au compte 418 " clients factures à établir " qui retrace selon la société requérante l'inscription en comptabilité de cette opération, correspond en réalité, selon les explications fournies au cours de la vérification de comptabilité par son gérant le 8 janvier 2011, au solde des travaux réalisés pour la construction d'un bâtiment commercial au profit de la société civile immobilièreB... ; que, dans ces conditions, l'administration était fondée à rehausser le résultat de la SARL B...Frères d'une somme de 36 848 euros au titre de l'exercice clos en 2008 ;
5. Considérant, en troisième lieu, que l'administration a réintégré dans les résultats de chacun des exercices en litige les sommes portées au crédit du compte courant d'associé de M.B..., gérant, en estimant que ce passif était injustifié ; qu'il appartient, en application de l'article 39 du code général des impôts, à la société qui a porté dans ses écritures comptables cette dette à l'égard de son associé d'apporter les éléments en justifiant le principe et le montant ; que, d'une part, si au titre de l'exercice clos en 2007 la SARL B...Frères fait valoir que la somme de 44 887 euros inscrite au crédit du compte courant de son gérant provient du débit du compte " report à nouveau " et correspond à une distribution de son résultat au profit de cet associé, il est constant qu'aucune assemblée générale de cette société n'a décidé de la répartition des bénéfices réalisés en 2007 au profit de l'intéressé ; que, dans ces conditions, et alors même que la comptabilité de la société requérante retrace l'écriture de virement entre le compte d'associé de M. B...et le compte de report à nouveau, la SARL B...Frères ne justifie pas de l'existence d'une distribution de bénéfices au titre de l'exercice clos en 2007 au profit de M. B...justifiant du crédit d'une somme de 44 887 euros sur son compte courant ; qu'au titre des exercices clos en 2008 et en 2009, si la SARL B...Frères explique que les crédits inscrits sur le compte courant de son gérant, à hauteur de 39 274 euros en 2008 et de 3 500 euros en 2009, correspondent à une écriture comptable de régularisation, ce dernier ayant acquitté avec ses fonds propres des dépenses incombant à la société, elle n'en justifie pas ;
6. Considérant, en quatrième lieu, qu'au titre de l'exercice clos en 2008, l'entreprise n'a pas été en mesure de produire les factures des achats de marchandises et de prestations sous-traitées de sorte que l'administration a rejeté leur déduction en application de l'article 39 du code général des impôts ; que la SARL B...Frères se borne à alléguer sans en justifier que la somme de 20 000 euros a déjà fait l'objet en 2008 d'une reprise au titre du compte courant d'associé de son gérant ; que ce faisant elle n'établit pas l'existence d'une double imposition à hauteur de cette somme ;
7. Considérant, en cinquième lieu, que, comme l'ont estimé les premiers juges, si la SARL B...Frères indique contester la qualification de revenus distribués retenue par le service pour certaines sommes inscrites au crédit du compte courant de son gérant, une telle qualification est sans incidence sur le bien-fondé de l'imposition de ces sommes à l'impôt sur les sociétés ;
8. Considérant, en sixième et dernier lieu, que la SARL B...Frères ne présente en appel aucun moyen en matière de taxe sur la valeur ajoutée ;
Sur le bien-fondé des pénalités :
9. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) " ;
10. Considérant qu'il ressort des termes de la proposition de rectification en date du 24 février 2011 que l'administration a appliqué, en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée, la pénalité pour manquement délibéré au chef de rehaussement correspondant à la minoration du chiffre d'affaires résultant de la non comptabilisation de la facture relative aux travaux de gros oeuvre réalisés sur un bien appartenant à son gérant ; qu'elle a motivé l'application de cette pénalité en se fondant sur l'importance de l'omission et sur la circonstance que la société ne pouvait ignorer l'obligation d'intégrer cette recette dans son résultat, une opération identique ayant été réalisée à la même période sur un autre bien appartenant au gérant ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 4 que la SARL B...Frères n'apporte pas la preuve, contrairement à ce qu'elle indique, de la comptabilisation dans ses recettes et dans son chiffre d'affaire déclarés au titre de l'exercice 2008, de la somme de 36 848 euros ; que, par suite, l'administration était fondée à appliquer la pénalité pour manquement délibéré ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL B...Frères n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et au remboursement de la contribution pour l'aide juridique:
12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, d'une part, le versement de la somme demandée par la SARL B...Frères au titre des frais exposés et non compris dans les dépens et, d'autre part, le remboursement de la contribution pour l'aide juridique acquittée par cette société ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL B...Frères est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL B...Frères et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 21 janvier 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 février 2016.
Le rapporteur,
M-P. Allio-Rousseau Le président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT01732