Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 juillet 2014 et le 24 février 2015, la communauté urbaine de Nantes Métropole, représentée par MeA..., demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 22 mai 2014 ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser des intérêts moratoires calculés sur la taxe sur la valeur ajoutée acquittée à tort, d'une part, au titre de l'année 2001 pour un montant de 963 070 euros et, d'autre part, au titre de l'année 2002 pour un montant de 1 488 642 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle était fondée, à l'appui de sa demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée déposée le 23 août 2012, de solliciter la condamnation de l'Etat au versement d'intérêts moratoires sur la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a collectée à tort entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2002, dès lors que cette demande constitue une modalité de résolution du contentieux initialement engagé par le dépôt de sa réclamation du 27 décembre 2005 ;
- dès lors qu'elle a obtenu le remboursement des taxes collectées à tort, elle était en droit, sur le fondement de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, d'obtenir le paiement des intérêts moratoires sur les taxes dégrevées par l'administration.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 14 janvier 2015 et le 7 mai 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la communauté urbaine de Nantes Métropole ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Allio-Rousseau,
- les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant la communauté urbaine de Nantes Métropole.
1. Considérant que la communauté urbaine de Nantes Métropole relève appel du jugement en date du 22 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser des intérêts moratoires afférents au remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 2 451 712 euros au titre des années 2001 et 2002 ;
Sur les intérêts moratoires :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales : " Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration des impôts à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul de l'imposition. les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt légal. Les intérêts courent du jour du paiement (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 198-10 du même livre : " L'administration des impôts ou l'administration des douanes et droits indirects, selon le cas, statue sur les réclamations dans le délai de six mois suivant la date de leur présentation (...) " ; qu'ont le caractère d'un dégrèvement contentieux de la même nature que celui prononcé par un tribunal au sens de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales les remboursements de taxe sur la valeur ajoutée effectués après l'intervention d'une décision de rejet née du silence initialement gardé par l'administration sur la réclamation du contribuable, alors même que le droit à remboursement ne procèderait pas, à l'origine, d'une erreur commise par l'administration dans l'assiette ou le calcul d'une imposition ;
3. Considérant que, par une réclamation en date du 27 décembre 2005, la communauté urbaine de Nantes Métropole a sollicité, en application des dispositions de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, le dégrèvement et la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle estimait avoir acquittée à tort à compter du 1er janvier 2001 ; que, par une décision du 10 juillet 2006, l'administration a fait droit à sa demande en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée acquittée en 2003 et a rejeté sa demande pour la période comprise entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2002, au motif qu'elle était irrecevable au regard des dispositions de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales ; que le tribunal administratif de Nantes, le 9 juillet 2009, puis la présente cour, le 28 juin 2010, ont rejeté la demande de la communauté urbaine de Nantes Métropole tendant à la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée sur la période allant du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2002 pour le même motif ; que le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt en date du 28 juin 2010 et a renvoyé l'affaire devant la présente cour ; que, dans son mémoire en réplique du 23 avril 2012 déposé devant le Conseil d'Etat, le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, tout en maintenant l'irrecevabilité de la demande de restitution de taxe sur la valeur ajoutée au motif que la communauté urbaine de Nantes Métropole n'avait versé aucune taxe sur la valeur ajoutée au Trésor en raison de sa situation créditrice permanente, a invité cette dernière à déposer une demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2002 en précisant que la forclusion ne lui serait pas opposée ; que la communauté urbaine de Nantes Métropole a alors déposé une demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2002 d'un montant total de 2 451 712 euros, assortie d'une demande de versement d'intérêts moratoires ; que le remboursement de l'intégralité de cette somme a été effectué le 14 septembre 2012 au profit de la collectivité, sans liquidation d'intérêts moratoires ; que, dans son arrêt en date du 10 octobre 2013, la présente cour a constaté un non-lieu à statuer à raison du remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le remboursement ainsi obtenu n'est pas intervenu à la suite du rejet par l'administration de la réclamation formée le 27 décembre 2005, mais à la suite de la présentation d'une réclamation déposée le 23 août 2012 dans les conditions fixées par les articles 242-0 A et suivants de l'annexe II au code général des impôts ; que ce remboursement a été prononcé par l'administration un mois après le dépôt de cette réclamation ; que, par suite, le remboursement de taxe sur la valeur ajoutée effectué par l'administration n'a pas le caractère d'un dégrèvement contentieux de même nature que celui prononcé par un tribunal au sens de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, et ne peut, par suite, alors même que la communauté urbaine de Nantes Métropole avait été invitée par le service à déposer une demande de remboursement dans le cadre du litige soumis au juge de l'impôt tendant à la restitution de la taxe litigieuse, ouvrir droit au versement d'intérêts moratoires ;
5. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que l'Etat n'était pas légalement tenu, et alors même qu'une demande avait été présentée, de verser des intérêts moratoires à l'occasion du remboursement de la taxe perçue au titre des années 2001 et 2002 ; que, par suite, la communauté urbaine de Nantes Métropole n'est pas fondée à invoquer l'article 1er du premier protocole additionnel de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la communauté urbaine de Nantes Métropole n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement que la communauté urbaine de Nantes Métropole demande à ce titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la communauté urbaine de Nantes Métropole est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté urbaine de Nantes Métropole et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 21 janvier 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 février 2016.
Le rapporteur,
M-P. Allio-Rousseau Le président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT01865