Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 24 février 2015, M.B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 20 novembre 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 27 juin 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, sous astreinte de 75 euros par jour de retard, de lui délivrer un certificat de résidence dans un délai de quinze jours ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, MeC..., d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation de ce conseil à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- le tribunal administratif a omis de statuer sur la substitution de motifs demandée à titre subsidiaire en première instance par le préfet ;
- la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour est insuffisamment motivée ; elle méconnaît les stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; en effet, d'une part, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que le défaut de prise en charge de sa pathologie était susceptible d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que les traitements appropriés n'étaient pas disponibles en Algérie ; or, dès lors que le préfet ignore la pathologie exacte dont il souffre, il ne peut justifier de ce qu'un traitement approprié existe en Algérie, contrairement à ce qu'a estimé le médecin ; l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision relative au séjour ; le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été méconnu ;
- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mai 2015, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 février 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Jouno.
1. Considérant que M.B..., ressortissant algérien né en 1979, a demandé, le 15 octobre 2013, la délivrance d'un certificat de résidence d'un an sur le fondement du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, par arrêté du 27 juin 2014, le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de faire droit à cette demande ; que M. B...relève appel du jugement en date du 20 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ; que M. B...relève appel de ce jugement ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que M. B...reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance, tirés de l'insuffisance de motivation de la décision portant refus de séjour et de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Nantes ;
3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux demandes de certificats de résidence formées par les ressortissants algériens en application des stipulations précitées de l'accord franco-algérien : " (...) Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) " ;
4. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;
5. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
6. Considérant que, si M. B...soutient que le préfet de la Loire-Atlantique ne connaissait pas sa pathologie, il ressort d'un courrier écrit de sa main et reçu en préfecture le 17 octobre 2013 que celle-ci relevait de la psychiatrie ; que, par un avis rendu le 17 avril 2014, le médecin de l'agence régionale de santé des Pays de la Loire a estimé que l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il n'existait pas en Algérie de traitement approprié et que les soins nécessités par son état de santé devaient être poursuivis pendant une durée d'un an ; que le préfet de la Loire-Atlantique, qui n'était pas lié par cet avis, a toutefois refusé de délivrer à M. B...le certificat de résidence qu'il demandait sur le fondement du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien au double motif qu'il n'était pas établi que le défaut de prise en charge de la pathologie de M. B... ait des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'intéressé pouvait disposer d'un traitement approprié à sa pathologie en Algérie ; que, pour justifier de l'existence et de la disponibilité d'un tel traitement, le préfet s'est appuyé, notamment, sur une " fiche pays ", réalisée le 25 octobre 2006 par les services de l'Etat, un document établi par l'Organisation mondiale de la santé relatif à la prise en charge des maladies mentales en Algérie en 2011, et le " programme national de santé mentale " fixé par le ministère algérien en charge de la santé et mis en oeuvre à partir de 2001 ;
7. Considérant, d'une part, qu'il ressort de ces documents, dont, contrairement aux allégations du requérant, aucun élément ne permet de supposer qu'ils ne reflèteraient pas l'état du système de santé algérien à la date de l'arrêté, qu'une offre de soins existe en Algérie s'agissant des pathologies psychiatriques ; que M. B...ne livre aucune indication qui, dans le respect des règles relatives au secret médical, permettrait au juge de vérifier si la pathologie psychiatrique dont il souffre est au nombre de celles pour lesquelles l'offre de soins est insuffisante ;
8. Considérant, d'autre part, que si M. B...allègue qu'il ne peut avoir effectivement accès à un tel traitement en Algérie, il n'assortit pas cette allégation des précisions nécessaires pour que la cour en apprécie le bien-fondé ;
9. Considérant qu'il suit de là que le préfet a pu légalement s'écarter de l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé et refuser de délivrer à M. B...le certificat de résidence qu'il demandait en qualité d'étranger malade ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
10. Considérant que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision relative au séjour doit, compte tenu de ce qui vient d'être dit, être écarté ; que le moyen tiré d'une méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit quant à lui être écarté pour les motifs exposés aux points 6 à 8 ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
11. Considérant que M. B...reprend en appel le moyen qu'il avait invoqué en première instance, tiré de l'insuffisance de motivation de la décision fixant le pays de destination ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Nantes ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M.B..., qui, dès lors que le tribunal administratif a écarté l'ensemble de ses moyens, n'est pas fondé à prétendre que les premiers juges auraient omis de statuer sur la demande de substitution de motifs demandée à titre subsidiaire par le préfet devant eux, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
13. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M.B..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
14. Considérant que les dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, la somme dont M.B..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, demande le versement au profit de son avocat au titre des frais non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 21 janvier 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- M. Jouno, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 février 2016.
Le rapporteur,
T. Jouno Le président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT00694