1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 21 mai 2019 ;
3°) dans le dernier état de ses écritures, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à Me B... en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi sur l'aide juridique.
Elle soutient que :
- la requête est recevable ;
- il appartiendra au signataire de l'acte, de verser aux débats la délégation de signature qui lui a permis de prendre la décision litigieuse, ainsi que le justificatif de sa publication ;
- l'impossibilité de pouvoir revenir sur le territoire français durant une période d'un an porte gravement atteinte à son droit à une vie privée et familiale ;
- sa situation familiale particulière constitue une circonstance humanitaire exceptionnelle, au sens de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté préfectoral a été pris sans apprécier sa situation particulière, alors qu'elle a un enfant entièrement dépendant d'elle, mais qui présente un polyhandicap tel qu'il nécessite sa prise en charge dans un centre spécialisé ;
- sa fille Lorana ne peut être prise en charge en Albanie ;
- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par des mémoires en défense enregistrés les 19 février 2020 et 9 septembre 2020, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé et que, par un arrêté du 25 mai 2020, la demande de titre de séjour de Mme A... en tant qu'accompagnante d'un enfant malade a été rejetée, rejet qui a été accompagné d'une obligation de quitter le territoire français.
Un mémoire enregistré le 23 septembre 2020 et présenté par le préfet du Calvados n'a pas été communiqué.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 octobre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- et les observations de Me E..., substituant Me B... et représentant la requérante.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... A..., née le 11 juin 1988, de nationalité albanaise, est arrivée en France le 12 juillet 2018 accompagnée de ses deux filles. Elle a déposé une demande d'asile, qui a été rejetée le 9 avril 2019. Elle s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français. Par un arrêté du 21 mai 2019, le préfet du Calvados lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a interdit le retour sur le territoire pendant une durée d'un an et a fixé le pays vers lequel elle pourra être reconduite. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Caen l'annulation de l'interdiction de retour d'une durée d'un an prononcée à son encontre par le préfet du Calvados le 21 mai 2019. Par un jugement du 11 juillet 2019, le tribunal a rejeté sa demande. Mme A... fait appel de ce jugement.
2. En premier lieu, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte contesté.
3. En deuxième lieu, si le préfet n'a pas mentionné, dans la décision contestée, l'état de santé d'une des filles de Mme A..., qui est polyhandicapée, il n'est pas établi par la seule circonstance que le médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a reçu un certificat médical la concernant que cette information aurait été portée à la connaissance du préfet. Dès lors, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation de la requérante doit être écarté.
4. En troisième et dernier lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
5. Il est constant que Mme A... n'a pas contesté l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre. Contrairement à ce que soutient la requérante, l'interdiction de retour en cause n'a pas pour effet de la séparer de sa fille polyhandicapée née en 2008, dès lors que cette dernière, compte tenu de son âge et du fait qu'elle n'a aucun membre de sa famille en France, a vocation, alors même qu'elle bénéficiait d'une prise en charge médicale en France, à suivre sa mère. La requérante établit que le défaut de prise en charge de l'enfant l'exposerait à des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Toutefois, le certificat médical du 11 mars 2019 indiquant que l'enfant n'aurait pas la possibilité d'avoir en Albanie la même prise en charge pluridisciplinaire que celle qu'elle a en France ne suffit pas à établir que l'enfant ne pourrait pas être prise en charge, alors même que, comme le soutient la requérante, cela ne correspondrait pas aux " standards de santé européens ". Si la requérante établit que le mécanisme " PEG " permettant de nourrir sa fille par gastrostomie n'est pas disponible dans les services de santé albanais financés par le fonds de sécurité sociale obligatoire, il n'est pas établi, notamment par la seule mention lapidaire, sur un certificat médical du 26 juin 2020, qu'il n'y aurait " pas de possibilité de se procurer des sondes en Albanie ", qu'aucun autre dispositif équivalent ne pourrait être mis en place. De même, la seule mention dans ce certificat, sans autre précision, qu'il n'y aurait " pas de possibilité de prescription de corset en Albanie " pour traiter la scoliose de l'enfant n'est pas suffisamment probante. Il ressort d'un courrier de 2015 émanant de l'ambassade de France en Albanie que " l'offre de soins en Albanie est complète et équivalente à celle proposée dans les pays d'Europe de l'Ouest. Les éléments généraux apportés par la requérante, issus de rapports d'organisations internationales, ne suffisent pas à établir le contraire. Il n'est pas davantage établi, par un certificat du 13 juillet 2020, qu'à la date de l'arrêté contesté, l'état de santé de la requérante ne lui permettait pas de ramener sa fille avec elle en Albanie. Enfin, le préfet n'était pas tenu de saisir pour avis le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peuvent qu'être écartés.
6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi sur l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Calvados.
Délibéré après l'audience du 22 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président assesseur,
- Mme D..., premier conseiller.
Lu en audience publique le 5 novembre 2020.
Le rapporteur,
P. D...
Le président,
F. Bataille
Le greffier,
A. Rivoal
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT04815