Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 20 août 2015, M. D...B..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 15 juillet 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Sarthe du 4 mars 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, après l'avoir muni d'une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le mémoire en réplique qu'il a produit le 26 juin 2015 n'est pas visé par le jugement et n'a pas été communiqué au préfet en méconnaissance du principe du contradictoire et des droits de la défense ;
- les premiers juges n'ont pas pris en compte les éléments invoqués dans ce mémoire ;
- compte tenu de sa situation familiale, le refus de titre de séjour est entaché d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 et l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le refus de séjour est contraire au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le coût élevé du traitement dont il bénéficie l'empêchera d'y accéder dans son pays d'origine ;
- il ne pourra pas le suivre efficacement en République Démocratique du Congo, les troubles psychiatriques qu'il présente trouvant leur cause dans les événements qu'il y a subis ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai n'a pas fait l'objet de la notification administrative prévue par le II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle n'est pas spécifiquement motivée ;
- il n'entre dans aucun des cas dans lesquels la mesure d'éloignement peut ne pas être assortie d'un délai ;
- l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour entraînera son annulation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'annulation des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français entraînera celle de la décision fixant le pays de renvoi ;
- la décision fixant le pays de renvoi est contraire à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 novembre 2015, le préfet de la Sarthe conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'en l'absence d'éléments nouveaux, il s'en remet à ses écritures de première instance.
M. D...B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 octobre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Aubert.
1. Considérant que M. D...B..., ressortissant de la République Démocratique du Congo, relève appel du jugement du 15 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Sarthe du 4 mars 2015 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de destination ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant que, contrairement à ce que soutient le requérant, le mémoire en réplique qu'il a produit le 25 juin 2015 est visé par le jugement attaqué ;
3. Considérant que la double circonstance que ce mémoire en réplique n'a pas été communiqué au défendeur et que les premiers juges n'ont pas expressément porté une appréciation sur les éléments qui y étaient invoqués, tendant à démontrer l'absence de traitement approprié à l'état de santé de M. D...B...en République Démocratique du Congo, ne permet pas de regarder le jugement comme entaché d'irrégularité en raison de la méconnaissance du principe du contradictoire ou d'une atteinte aux droits de la défense, invoquées par le requérant ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé : " (...) le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / - la durée prévisible du traitement. (...) " ;
5. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;
6. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d 'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
7. Considérant que, par un avis rendu le 4 décembre 2014, le médecin de l'agence régionale de santé des Pays de la Loire a estimé que l'état de santé de M. D...B...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existait pas en République Démocratique du Congo de traitement approprié à cet état de santé ; que le préfet de la Loire-Atlantique, qui n'était pas lié par cet avis, a toutefois refusé de délivrer le titre de séjour demandé au motif de l'existence d'un traitement approprié dans ce pays ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des pièces produites en première instance par M. D...B..., qu'il souffre d'un état de stress post-traumatique nécessitant un traitement médical ; que le préfet de la Loire-Atlantique a justifié en première instance de la possibilité pour le requérant de bénéficier du traitement dont il a besoin par la production de la fiche sanitaire de la République Démocratique du Congo mise à jour le 25 octobre 2006 mentionnant l'existence d'une offre de soins pour le traitement de l'état de stress post-traumatique ; qu'en se bornant à soutenir que cette fiche est trop ancienne pour être prise en compte et en se prévalant des passages de rapports établis par des organisations non gouvernementales faisant état, d'une part, de l'insuffisance de l'offre de soins psychiatriques en milieu hospitalier, alors qu'il n'est pas établi que son état de santé nécessite une hospitalisation, et, d'autre part, du coût des médicaments alors que les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans leur rédaction en vigueur n'impliquent aucune appréciation quant au caractère effectif de l'accès au traitement en raison de la situation particulière du demandeur, le requérant ne remet pas sérieusement en cause les éléments de preuve apportés par le préfet, lesquels établissent de manière suffisante qu'il pourra bénéficier dans son pays d'origine d'un traitement médical adapté à son état de santé ;
9. Considérant que les autorités compétentes en matière d'asile ont estimé que ses déclarations ne permettaient pas de tenir pour établie la réalité des persécutions alléguées ; que, dans ces conditions, l'état de stress post-traumatique que le requérant présente ne peut être regardé, ainsi qu'il le soutient, comme trouvant sa cause dans ces événements ; qu'il s'ensuit que M. D...B...n'est pas fondé à soutenir que l'origine de sa pathologie l'empêche de bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en République Démocratique du Congo ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet a pu légalement s'écarter de l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé et refuser de délivrer au requérant un titre de séjour en qualité d'étranger malade ;
11. Considérant que, pour le surplus, M. D...B...se borne à reprendre en appel, sans invoquer aucun élément de fait ou de droit nouveau, les moyens invoqués en première instance, tirés de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste commise dans l'appréciation de sa situation ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
12. Considérant que si M. D...B...soutient ne pas avoir tenté de se soustraire à la mesure d'éloignement prise à son encontre le 13 mai 2013 après la décision de rejet de sa demande d'asile mais être resté sur le territoire français en raison d'une nouvelle demande de titre de séjour présentée sur un autre fondement le 29 avril 2013, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette demande, réceptionnée par les services de la préfecture de la Sarthe le 6 mai 2013, remplissait les conditions requises pour ouvrir droit à la délivrance d'un récépissé de demande de titre de séjour ; qu'il suit de là que le préfet a pu légalement prendre à l'encontre de l'intéressé une décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai, en application du d) du 3° de l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
13. Considérant que M. D...B...fait valoir qu'il est bien inséré en France où sa mère et ses trois soeurs résident régulièrement, sa mère et l'une de ses soeurs ayant la qualité de réfugié, que son père est décédé en 1992 et que ses deux frères vivent au Congo-Brazzaville ; qu'il se prévaut en outre de sa formation universitaire en sciences économiques ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'entré en France en novembre 2011, il a passé la majeure partie de son existence en République Démocratique du Congo où il est né le 15 décembre 1983 ; qu'il est célibataire et sans enfant et n'établit pas, par les pièces qu'il produit, le départ de ses deux frères de ce pays ; qu'il suit de là que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, dès lors, être écarté ;
14. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux mentionnés aux points 8 et 9 du présent arrêt, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
15. Considérant que, pour le surplus, M. D...B...se borne à reprendre en appel, sans invoquer aucun élément de fait ou de droit nouveau, les moyens invoqués en première instance, tirés du défaut de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de l'illégalité, invoquée par voie d'exception, du refus de titre de séjour ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
16. Considérant que M. D...B...se borne à reprendre en appel, sans invoquer aucun élément de fait ou de droit nouveau, les moyens invoqués en première instance, tirés de la méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'illégalité, invoquée par voie d'exception, du refus de titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
Sur le surplus des conclusions :
17. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par le requérant ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D...B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Sarthe.
Délibéré après l'audience du 19 mai 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 juin 2016.
Le rapporteur,
S. AubertLe président,
F. Bataille
Le greffier,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT02631 2
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