2°) d'annuler ces décisions ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, à titre principal, de lui délivrer une autorisation de séjour et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours et de lui délivrer dans cette attente un récépissé ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat au bénéfice de Me Néraudau la somme de 2 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 34 et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le tribunal a omis de répondre au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce qui concerne la décision fixant le pays de destination ;
- il a exécuté la décision d'éloignement ; en conséquence, le tribunal aurait dû prononcer un non-lieu à statuer ;
- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est insuffisamment motivée ; elle a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu tel qu'exprimé à l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ainsi que par les dispositions de l'article 5 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ; elle méconnaît l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant son pays de renvoi d'office est insuffisamment motivée ; elle méconnaît l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 5 juillet 2019, le préfet de la
Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- il s'en remet à ses écritures de première instance ;
- les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés ;
- il appartient au requérant de solliciter le réexamen de sa demande d'asile, ce qu'il n'a pas fait ;
- le requérant n'a pas mis à exécution la mesure d'éloignement, puisque l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que l'intéressé doit rejoindre le pays dont il a la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne.
Par une décision du 13 décembre 2018, M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Brasnu,
- et les observations de Me Néraudau, représentant M. E....
Considérant ce qui suit :
1. M. E..., ressortissant géorgien né le 16 octobre 1982, déclare être entré en France le 16 décembre 2016. Sa demande de reconnaissance du statut de réfugié a été rejetée par une décision du 29 août 2017 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par un arrêt du 17 janvier 2018 de la Cour nationale du droit d'asile. Il relève appel du jugement du 3 septembre 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 27 avril 2018 par lesquelles la préfète de la Loire-Atlantique lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, si le requérant fait valoir qu'il est allé en Italie et a ainsi exécuté la décision d'éloignement, cette circonstance n'a pas eu pour effet de priver d'objet la requête, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges. Au demeurant, contrairement à ce que soutient le requérant, le fait d'être allé en Italie ne saurait être regardé comme une exécution de la mesure d'éloignement, l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoyant que l'étranger doit rejoindre le pays dont il a la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne. Par suite, M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a écarté l'exception de non-lieu à statuer.
3. En deuxième lieu, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ". Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne (10 septembre 2013, affaire n° C-383/13) qu'une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la décision faisant grief que si la procédure administrative aurait pu, en fonction des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, aboutir à un résultat différent du fait des observations et éléments que l'étranger a été privé de faire valoir.
5. En l'espèce, M. E... fait valoir que la préfète de Loire-Atlantique n'a pas donné suite à sa demande d'entretien en date du 21 février 2018. Il soutient qu'il aurait pu à cette occasion confirmer l'actualité de ses craintes, et également faire part de nouveaux éléments, et notamment de l'agression de son frère en janvier 2018. Cependant, M. E... n'a produit aucune pièce relative à ces éléments nouveaux. Ces allégations demeurent .en outre imprécises Dans ces conditions, M. E... n'établit pas qu'un entretien avec les services de la préfecture aurait pu lui permettre de mieux faire valoir ses droits et, partant, d'avoir une incidence sur la décision prise par la préfète de Loire-Atlantique. Dès lors, le moyen doit être écarté.
6. En quatrième lieu, les dispositions de la directive 2008/115/CE du Parlement et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, ont été transposées en droit interne par la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité et son décret d'application du 8 juillet 2011. Ainsi, M. E... ne peut utilement invoquer l'article 5 de la directive 2008/115/CE du Parlement et du Conseil du 16 décembre 2008 pour contester la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
7. En cinquième lieu, les dispositions de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile s'appliquent par dérogation à l'article L. 743-1 du même code. En l'espèce, il est constant que M. E... entrait dans le champ de l'article L. 743-1, dès lors que sa demande d'asile a été rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 17 janvier 2018. Par suite, le requérant ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
8. En sixième lieu, à supposer que le requérant ait entendu soulever le moyen tiré du défaut d'examen de sa situation, en particulier au regard de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas des termes de la décision, que le préfet s'est abstenu de procéder à un examen particulier de sa situation personnelle.
9. En dernier lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que le requérant reprend en appel sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau, doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
10. A l'appui de sa demande devant le tribunal administratif de Nantes, M. E... soutenait que la décision fixant le pays de destination méconnaissait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le tribunal administratif, qui ne s'est pas prononcé sur ce moyen et ne l'a pas visé, a ainsi entaché sur ce point son jugement d'une irrégularité. Il y a lieu, par suite, d'annuler ce jugement dans cette mesure.
11. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de statuer immédiatement, et par la voie de l'évocation, sur les conclusions de M. E... tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination.
12. En premier lieu, l'arrêté a été signé par M. C..., directeur de la règlementation et des libertés publiques de la préfecture de la Loire-Atlantique. Par arrêté du 29 décembre 2017 publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, la préfète lui a donné délégation à l'effet de signer notamment les décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté.
13. En deuxième lieu, la décision fixant le pays de destination comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elle se réfère notamment aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'absence de justification par l'intéressé de l'existence d'une menace personnelle en cas de retour dans son pays d'origine. Dès lors, la décision fixant le pays de destination est suffisamment motivée.
14. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ".
15. M. E... fait valoir qu'il craint de subir une vendetta en cas de retour en Géorgie à la suite de sa relation avec une femme mariée. Il ne produit cependant au soutien de ses allégations qu'un article de presse de 2015 sur les vendettas en Géorgie. En outre, sa demande de reconnaissance de la qualité de réfugié a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile. Dans ces conditions, la préfète, en fixant le pays de destination, n'a méconnu ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
16. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".
17. Si le requérant fait valoir que la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il se borne à faire référence aux arguments déjà invoqués à l'appui de la contestation de la mesure d'éloignement. Or, ainsi qu'il a été rappelé au point 9 du présent arrêt, le requérant n'établit pas que la mesure d'éloignement porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par conséquent, il n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination méconnaît ces stipulations.
18. Il résulte de tout ce qui précède que la demande présentée par M. E... devant le tribunal administratif de Nantes tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination doit être rejetée et que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté ses autres demandes. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles relatives aux frais liés à l'instance doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 3 septembre 2018 est annulé en tant qu'il a statué sur les conclusions de M. E... dirigées contre la décision fixant le pays de destination.
Article 2 : La demande présentée par M. E... devant le tribunal administratif de Nantes tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 26 septembre 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président,
- M. Geffray, président-assesseur,
- M. Brasnu, premier conseiller.
Lu en audience publique le 10 octobre 2019.
Le rapporteur,
H. BrasnuLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT00079