Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 24 septembre 2015, le 9 octobre 2015 et le 23 mai 2016, M. B..., représenté par Me C...et par MeD..., demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 11 septembre 2015 ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation aux fins de délivrance d'un titre de séjour dans le délai de quinze jours suivant l'arrêt à intervenir sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour a été signée par une autorité incompétente ; elle est entachée d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle méconnaît les stipulations du §1 de l'article 3 et celles de l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été signée par une autorité incompétente ; l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour entraîne celle de la décision portant obligation de quitter le territoire ;
- la décision fixant le pays de destination a été signée par une autorité incompétente ; l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire entraîne celle de la décision fixant le pays de renvoi ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans a été signée par une autorité incompétente ; l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire entraîne celle de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français ; cette décision méconnaît les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle méconnaît les stipulations du §1 de l'article 3 et celles de l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 avril 2016, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. B...n'est fondé.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 octobre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Allio-Rousseau a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.B..., ressortissant ivoirien né le 7 août 1984, relève appel du jugement du 11 septembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 mai 2015 du préfet de Maine-et-Loire portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français sans délai et fixation du pays de destination ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant que l'arrêté du 6 mai 2015 a été signé par Mme Elodie Degiovanni, secrétaire générale de la préfecture de Maine-et-Loire, qui disposait d'une délégation de signature consentie par un arrêté du préfet de Maine-et-Loire du 2 septembre 2013, régulièrement publié le 3 septembre suivant au recueil des actes administratifs de la préfecture de Maine-et-Loire, à l'effet de signer notamment tous actes, correspondances et décisions, à l'exception de certains actes limitativement énumérés au nombre desquels ne figurent pas les décisions sur le séjour des étrangers ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté doit être écarté comme manquant en fait ;
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) "
4. Considérant, d'une part, que M. B... était, à la date de la décision portant refus de titre de séjour, détenu à la maison d'arrêt d'Angers pour une durée totale de trente-sept mois après avoir été condamné par les tribunaux correctionnels de Nantes et d'Angers, à quatre reprises, en 2008, 2012, 2013 et 2014, à des peines d'emprisonnement après révocation des sursis accordés, pour usage et détention de stupéfiants, vol et escroquerie ; que, dès lors, eu égard au caractère récent des infractions commises, à leur nature délictueuse et à leur gravité ainsi qu'à leur réitération créant pour certaines une situation de récidive, le préfet a pu estimer, sans commettre d'erreur d'appréciation, que le comportement de M. B... représentait une menace pour l'ordre public, en dépit de son comportement en détention ;
5. Considérant, d'autre part, que M. B...n'établit pas avoir participé à l'éducation de son fils né le 13 juillet 2013 avant et depuis son incarcération ; qu'il ne verse de pension alimentaire pour cet enfant que depuis le mois d'octobre 2014 à la suite du jugement rendu par le juge aux affaires familiales de Saint-Brieuc, le 8 septembre 2014, sur requête déposée par la mère de l'enfant ; que, dans ces conditions, il est établi que M. B... n'a pas participé à l'entretien de l'enfant depuis sa naissance ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;
6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B..., basketteur professionnel entré en juillet 2005 en France, y a résidé régulièrement jusqu'au 22 octobre 2010 en qualité de conjoint de Français ; qu'il a rencontré par la suite la mère de son enfant, né le 13 juillet 2013 ; que si M. B... a reconnu par anticipation cet enfant, il ressort des pièces du dossier qu'il n'a tissé avec celui-ci aucun lien avant son incarcération ; que si ces éléments témoignent de liens familiaux sur le territoire français, il ressort également des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit précédemment, que M. B...représente, eu égard aux faits graves et répétés pour lesquels lui ont été infligées plusieurs condamnations, en dernier lieu en 2014, une menace à l'ordre public ; que dans ces conditions, si la décision de refus de séjour opposée à M. B... est susceptible de porter atteinte à son droit au respect de sa vie familiale, cette atteinte n'apparaît pas, eu égard aux buts de préservation de l'ordre public en vue desquels la décision a été prise, disproportionnée ; qu'ainsi, le préfet de Maine-et-Loire n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du §1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation ; qu'il n'est pas établi que la présence de M. B...en France serait nécessaire pour l'enfant, confiée principalement à sa mère ; que le refus de séjour ne prive pas l'intéressé de la possibilité d'entretenir des liens avec son enfant ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnaît les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
9. Considérant, en quatrième lieu, que les stipulations de l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés ; que, par suite, M. B...ne peut utilement se prévaloir des stipulations de cet article pour demander l'annulation du refus de titre de séjour ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
10. Considérant que l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour opposée à M. B...n'étant pas établie, l'exception d'illégalité de ce refus, soulevée à l'appui des conclusions d'annulation dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écartée ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
11. Considérant que l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français n'étant pas établie, l'exception d'illégalité de ces décisions, soulevée à l'appui des conclusions d'annulation dirigées contre la décision fixant le pays de destination, ne peut qu'être écartée ;
En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :
12. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. (...) - Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour pour une durée maximale de trois ans à compter de sa notification. (...) - L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) " ;
13. Considérant que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français indique que le comportement de M. B... constitue une menace à l'ordre public, que malgré sa présence en France depuis plus de dix ans, ce dernier n'a pas développé de liens forts sur le territoire et que l'intéressé a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement à laquelle il n'a pas déféré le 4 avril 2012 ; que, dans ces conditions, le préfet de Maine-et-Loire, qui a suffisamment motivé sa décision tant sur le principe que sur la durée de l'interdiction de retour, a pu sans commettre d'erreur d'appréciation assortir sa mesure d'éloignement d'une interdiction de retour en France de deux ans ; que, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7, 8 et 9, cette décision ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni celles du §1 de l'article 3 ou de l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur le surplus des conclusions :
15. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par le requérant ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 1er juin 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 16 juin 2016.
Le rapporteur,
M-P. Allio-RousseauLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT02921