Procédure devant la cour :
Par une requête et trois mémoires en production de pièces, enregistrés le 25 juillet 2016, le 16 septembre 2016, le 14 novembre 2016 et le 24 novembre 2016, M.D..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 23 juin 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 4 février 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa demande de titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, un récépissé valant autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée et n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation ; elle méconnaît les stipulations du a de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ainsi que celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est insuffisamment motivée et n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation ; elle est illégale dès lors que la décision portant refus de titre de séjour est elle-même entachée d'illégalité ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation avant d'édicter sa décision fixant le pays de renvoi ; cette dernière est illégale compte tenu de l'illégalité dont sont entachées les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 septembre 2016, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête en s'en rapportant à ses écritures de première instance.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- la code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bougrine,
- et les observations de MeC..., substituant MeB..., représentant M.D... ;
1. Considérant que M.D..., ressortissant algérien né le 24 octobre 1973 à Chahna (Algérie), est entré, pour la dernière fois, sur le territoire français en 2012 ; qu'il a épousé, le 18 octobre 2014, une ressortissante française et a bénéficié, à ce titre, d'un certificat de résidence algérien, valable du 23 décembre 2014 au 22 décembre 2015, sur le fondement du 2) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, par un arrêté du 4 février 2016, le préfet de la Loire-Atlantique a rejeté sa demande tendant au renouvellement de ce titre de séjour et à la délivrance d'un certificat de résidence de dix ans sur le fondement du a) de l'article 7 bis du même accord, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ; que M. D... relève appel du jugement du 23 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française (...) / (...) / Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2) ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux. " et qu'aux termes de l'article 7 bis de ce même accord : " (...) / Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : / a) Au ressortissant algérien, marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 6 nouveau 2) et au dernier alinéa de ce même article ; (...) " ;
3. Considérant que pour refuser à M. D...le renouvellement de son certificat de résidence d'un an, sur le fondement du 2) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ainsi que la délivrance d'un certificat de résidence de dix ans, sur le fondement du a) de l'article 7 bis de cet accord, le préfet de la Loire-Atlantique a estimé que, compte tenu des données recueillies à l'occasion d'une enquête administrative, la communauté de vie entre M. D... et son épouse n'était pas établie ; que, toutefois, la teneur du rapport d'enquête administrative, seul élément sur lequel s'appuie le préfet, établi le 14 décembre 2015 à la suite d'une visite au domicile conjugal et d'une enquête de voisinage effectuées le 2 décembre 2015 ainsi que d'une audition du couple par la police aux frontières le 3 décembre 2015, ne suffit pas à établir l'absence de communauté de vie entre les époux alors que le requérant verse aux débats de nombreuses pièces justifiant de sa domiciliation à la même adresse que son épouse et que l'effectivité de la communauté de vie est attestée par plusieurs voisins ; qu'ainsi, en rejetant les demandes de certificats de résidence présentées par M. D... au seul motif que la communauté de vie entre l'intéressé et son épouse n'était pas établie, le préfet de la Loire-Atlantique a commis une erreur d'appréciation ; que, dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. D...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et, par voie de conséquence, celle tendant à l'annulation des décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
4. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement le réexamen de la demande de M.D... ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de procéder à ce réexamen, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et de délivrer à l'intéressé, dans l'attente, un récépissé de demande de titre de séjour l'autorisant à séjourner en France ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. D... de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 23 juin 2016 et l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 4 février 2016 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Loire-Atlantique de réexaminer la demande de titre de séjour de M. D...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans l'attente, un récépissé l'autorisant à séjourner en France.
Article 3 : L'Etat versera à M. D...la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...D...et au ministre de l'intérieur.
Une copie sera adressée au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 1er décembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- Mme Bougrine, conseiller.
Lu en audience publique, le 16 décembre 2016.
Le rapporteur,
K. BougrineLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16NT02402