Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 28 juin, 6 novembre et 6 décembre 2019, Mme C..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de procéder à un réexamen de sa demande dans le même délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le signataire de l'arrêté contesté n'était pas compétent pour le prendre ;
- l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration devait être annexé à l'arrêté contesté ; il été adopté par des médecins qui n'ont pas été nommés conformément aux dispositions de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour est insuffisamment motivée, a été prise sans un examen préalable de sa situation personnelle, méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment en raison de l'absence d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine et l'autorité absolue de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour du 2 mai 2014 en ne lui délivrant pas le titre de séjour qu'il lui a été enjoint de délivrer, est entachée d'erreurs de fait tant sur le plan personnel et familial que sur le plan de son état de santé, méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 novembre 2019, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 juillet 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- et les observations de Me A..., représentant Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Le 27 octobre 2017, Mme C..., ressortissante camerounaise, née le 31 mars 1954, a demandé au préfet de la Loire-Atlantique la délivrance d'un titre de séjour en tant qu'étranger malade sur le fondement du 11° de l'article L. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 30 octobre 2018, le préfet de la Loire-Atlantique a pris à son encontre un refus de titre de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office lorsque le délai sera expiré. Par un jugement du 23 mai 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de Mme C... tendant à l'annulation de l'arrêté. L'intéressée relève appel de ce jugement.
2. Mme C... reprend en appel sans apporter aucun élément de droit et de fait nouveau son moyen invoqué en première instance et tiré de ce que le signataire de l'arrêté contesté n'était pas compétent pour le prendre. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif, d'écarter ce moyen.
Sur la légalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :
3. En premier lieu, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au préfet de communiquer à l'étranger l'avis du collège de médecins émis dans le cadre de l'instruction d'une demande de titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration devait être annexé à l'arrêté contesté.
4. En deuxième lieu, le préfet de la Loire-Atlantique a rappelé, dans l'arrêté contesté, le sens de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 1er juillet 2018 et a ensuite considéré notamment que l'état de santé de Mme C... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par cette formulation, il a porté sa propre appréciation sur la situation médicale de l'intéressée. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que le préfet a entaché sa décision d'un défaut de motivation.
5. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de la requérante.
6. En quatrième lieu, il ressort de la décision du 8 juin 2018 du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, et notamment de son annexe 1, que les docteurs Joseph, Ortega et Mettais-Cartier, signataires de l'avis du 1er juillet 2018, figuraient sur la liste des médecins désignés pour participer au collège à compétence nationale. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'avis a été adopté par des médecins qui n'ont pas été nommés conformément aux dispositions de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. En cinquième lieu, la partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'accès effectif ou non à un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
8. L'avis du 1er juillet 2018 mentionne que l'état de santé du demandeur nécessite une prise en charge médicale, que le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'au vu des éléments du dossier et à la date de l'avis, l'état de santé de l'intéressée peut lui permettre de voyager sans risque vers le pays d'origine. Dès lors, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'était pas tenu de se prononcer sur la possibilité pour Mme C... de bénéficier d'un accès effectif à un traitement approprié dans son pays d'origine. Cette circonstance n'a pas été de nature à rendre insuffisante la motivation de l'avis et rend inopérants les moyens relatifs à l'absence d'un traitement approprié à son état de santé au Cameroun, même si le préfet de la Loire-Atlantique a retenu dans son arrêté que la requérante pouvait bénéficier d'un tel traitement.
9. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Loire-Atlantique, en estimant que Mme C..., qui se prévaut de certificats médicaux indiquant qu'elle souffre notamment de lombalgies chroniques, d'une arthrose fémoro-tibiale interne du genou droit et d'hypertension artérielle et utilise un déambulateur, ne remplissait pas les conditions pour bénéficier d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade, a commis une erreur de fait dans l'appréciation de son état de santé et fait une inexacte application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
10. En dernier lieu, Mme C... reprend en appel, sans apporter aucun élément nouveau de droit et de fait, son moyen invoqué en première instance et tiré de ce que le préfet de la Loire-Atlantique a méconnu l'autorité absolue de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour du 2 mai 2014 en ne lui délivrant pas le titre de séjour qu'il lui a été enjoint de délivrer. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif, d'écarter ce moyen.
11. Mme C... est entrée en France le 18 octobre 2017. C'est sans erreur de fait que le préfet de la Loire-Atlantique a pu préciser que l'intéressée est en France depuis un an à la date de l'arrêté contesté.
12. Mme C..., après avoir vécu en France de 2009 à 2013, est retournée au Cameroun pour y vivre pendant une période allant de la fin de l'année 2013 au 18 octobre 2017, date de sa dernière entrée en France, qui est récente. Si elle se prévaut de la présence de membres de sa famille, dont deux filles de nationalité française, elle ne contredit pas le préfet de la Loire-Atlantique lorsque celui-ci mentionne dans son arrêté que résident au Cameroun son époux et deux autres enfants. Ainsi, la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressée une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'elle a poursuivis, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences sur sa situation personnelle.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
13. La décision de refus de titre de séjour n'étant pas annulée, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence.
14. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 12, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
15. La décision de refus de titre de séjour n'étant pas annulée, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence.
16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... et au ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 10 septembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. B..., président assesseur,
- M. Brasnu, premier conseiller.
Lu en audience publique le 24 septembre 2020.
Le rapporteur,
J.-E. B...
Le président,
F. Bataille La greffière,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 19NT02552