Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 5 mars 2015 et 16 juin 2015, M.C..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 21 octobre 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 23 mai 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- il est fondé à exciper de l'illégalité de la décision du 22 janvier 2014 par laquelle le préfet de la Loire-Atlantique lui a refusé le bénéfice de l'admission provisoire au séjour au titre de l'asile au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour ;
- le refus d'admission provisoire au séjour est entaché d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation, le préfet s'étant cru lié par la décision du conseil d'administration de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 7 juillet 2004 inscrivant la Géorgie sur la liste des pays d'origine sûrs ;
- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, son comportement n'ayant pas constitué une fraude délibérée ou un recours abusif aux procédures d'asile au sens de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- la décision fixant le pays de renvoi est contraire à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- n'ayant pas annexé son mémoire de première instance au mémoire d'appel dans lequel il déclare s'en remettre à ses écritures de première instance, le préfet doit être regardé comme acquiesçant aux faits ; ses conclusions ne sont pas recevables ; il méconnaît le principe du contradictoire ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mai 2015, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Il déclare s'en remettre à ses écritures de première instance.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 février 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Aubert.
1. Considérant que M.C..., de nationalité géorgienne, relève appel du jugement du 21 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 23 mai 2014 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;
Sur le mémoire en défense du préfet :
2. Considérant que le mémoire en défense produit par le préfet de la Loire-Atlantique en appel ne comportant pas de conclusions tendant à la réformation ou à l'annulation du jugement attaqué par le requérant, la fin de non-recevoir tirée de son défaut de motivation, invoquée sur le fondement de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, doit être écartée ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 612-6 du code de justice administrative : " Si, malgré une mise en demeure, la partie défenderesse n'a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant. " ; qu'aucune mise en demeure de produire un mémoire en défense n'ayant été adressée par la cour au préfet de la Loire-Atlantique sur le fondement de ces dispositions du code de justice administrative, M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'ayant produit un mémoire dans lequel il déclare s'en remettre à ses écritures de première instance, non produites en appel, le préfet doit être regardé comme ayant acquiescé aux faits ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
4. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 722-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le conseil d'administration de l'Office français de protections des réfugiés et apatrides fixe notamment, dans les conditions prévues par les dispositions communautaires en cette matière, la liste des pays considérés au niveau national comme des pays d'origine sûrs, mentionnés au 2° de l'article L. 741-4 ; qu'aux termes de cet article L. 741-4 : " Sous réserve du respect des stipulations de l' article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 2° L'étranger qui demande à bénéficier de l'asile a la nationalité d'un pays pour lequel ont été mises en oeuvre les stipulations du 5 de l'article 1er de la convention de Genève susmentionné ou d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr. Un pays est considéré comme tel s'il veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'Etat de droit, ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La prise en compte du caractère sûr du pays d'origine ne peut faire obstacle à l'examen individuel de chaque demande (...) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente. Constitue, en particulier, un recours abusif aux procédures d'asile la présentation frauduleuse de plusieurs demandes d'admission au séjour au titre de l'asile sous des identités différentes. Constitue également un recours abusif aux procédures d'asile la demande d'asile présentée dans une collectivité d'outre-mer s'il apparaît qu'une même demande est en cours d'instruction dans un autre Etat membre de l'Union européenne. " ; qu'aux termes de l'article L. 742-1 du même code : " Lorsqu'il est admis à séjourner en France (...), l'étranger qui demande à bénéficier de l'asile se voit remettre un document provisoire de séjour lui permettant de déposer une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. L'Office ne peut être saisi qu'après la remise de ce document au demandeur. Après le dépôt de sa demande d'asile, le demandeur se voit délivrer un nouveau document provisoire de séjour. Ce document est renouvelé jusqu'à ce que l'Office statue et, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d'asile, jusqu'à ce que la Cour statue " ; qu'aux termes de l'article L. 742-3 du même code : " L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 742-6 du même code : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. (...) " ;
5. Considérant que, conformément aux dispositions de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une mesure d'éloignement ne peut être mise à exécution, après la décision de l'Office de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) rejetant une demande d'asile, qu'à l'encontre d'un étranger entrant dans le champ d'application du 2° au 4° de l'article L. 741-4 du même code ; qu'il incombe de ce fait au juge saisi de la contestation de la légalité d'une obligation de quitter le territoire français après la décision de l'OFPRA fondée notamment sur le 4° de cet article, de s'assurer que l'étranger entre bien dans le cas visé par ces dispositions ; que la seule circonstance qu'une décision administrative ait refusé l'admission au séjour à raison du caractère frauduleux ou abusif du recours aux procédures d'asile mentionné au 4° de cet article et qu'elle n'ait pas été contestée ou qu'elle n'ait pas été annulée par le juge administratif ne fait pas obstacle à ce que le juge détermine lui-même, sans se prononcer sur la légalité de cette décision, si la demande d'asile relevait bien des cas mentionnés à l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dans l'hypothèse où il estime que tel n'était pas le cas, et alors même que l'intéressé n'avait pas été effectivement admis à séjourner en France, cet étranger ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur son recours ; qu'il suit de là que les premiers juges ont refusé à tort de déterminer si M. C...entrait bien dans le champ d'application de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'a estimé le préfet de la Loire-Atlantique ;
6. Considérant toutefois que la décision du 22 janvier 2014 portant refus d'admission provisoire au séjour en France est fondée sur le comportement du requérant caractérisant l'existence d'une fraude délibérée et un recours abusif aux procédures d'asile et sur le fait que la Géorgie figure sur la liste des pays d'origine sûrs établie par délibération du conseil d'administration de l'OFPRA le 16 décembre 2013 ; qu'il ressort des termes mêmes de sa décision que le préfet ne s'est pas cru lié par cette délibération ; qu'en outre, M. C...a successivement déposé des demandes d'asile aux Pays-Bas, en Autriche et en Pologne et, en dernier lieu, en France sans attendre que les autorités polonaises auxquelles il devait être remis en exécution d'une décision du 19 octobre 2012 aient statué sur sa demande ; qu'enfin, il ne s'est pas présenté au rendez-vous qui lui avait été fixé le 19 décembre 2012 en vue de sa remise aux autorités polonaises et s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français où il a présenté une nouvelle demande d'asile le 8 janvier 2014 ; qu'il entre ainsi dans le champ d'application du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, le préfet de la Loire-Atlantique a légalement pris à son encontre une décision portant obligation de quitter le territoire français sans attendre que la Cour nationale du droit d'asile statue, le cas échéant, sur la décision de l'OFPRA du 20 mars 2014 ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui est dit au point 6 du présent arrêt que la décision du préfet de la Loire-Atlantique du 22 janvier 2014 n'est pas illégale ; que, dès lors, M. C...n'est pas fondé à exciper de son illégalité au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, un tel moyen étant au surplus inopérant ;
8. Considérant que l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour n'étant pas établie, M. C...n'est pas fondé à exciper de son illégalité au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
9. Considérant que pour contester la décision fixant le pays de renvoi, le requérant se borne à reprendre en appel, sans apporter aucun élément nouveau, le moyen invoqué en première instance tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur le surplus des conclusions :
11. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par le requérant ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 4 février 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 février 2016.
Le rapporteur,
S. AubertLe président,
F. Bataille
Le greffier,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 1500798 3
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