Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 septembre 2015, et un mémoire, enregistré le 22 janvier 2016, non communiqué, MmeC..., représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 21 avril 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2015 du préfet de la Vendée ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Vendée de procéder à un nouvel examen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation de ce conseil à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé ;
- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé ;
- la décision portant refus de titre de séjour n'a pas été précédée d'un examen de sa situation personnelle et familiale ; cette décision méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît le principe général de l'Union européenne du droit à être entendu tel qu'il est notamment exprimé au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; elle est dépourvue de base légale ; elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; elle méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ainsi que celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision lui refusant un délai de départ volontaire n'a pas été précédée d'un examen de sa situation personnelle ; elle est dépourvue de base légale ; elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît le principe général de l'Union européenne du droit à être entendu tel qu'il est notamment exprimé au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; cette décision n'a pas été précédée d'un examen de sa situation personnelle au regard des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine ; elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 novembre 2015, le préfet de la Vendée conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme C...ne sont pas fondés.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 août 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bataille,
- et les observations de MeB..., représentant MmeC....
1. Considérant que MmeC..., ressortissante arménienne, relève appel du jugement du 21 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 janvier 2015 du préfet de la Vendée portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français sans délai et fixation du pays de destination ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que, contrairement à ce que soutient MmeC..., le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par l'intéressée, a écarté, avec une motivation suffisante, le moyen tiré de l'insuffisante motivation des décisions portant refus de titre de séjour, refus de délai de départ volontaire et fixation du pays de destination ; que Mme C...n'a pas soulevé en première instance le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
3. Considérant que la décision contestée portant refus de titre de séjour a été prise à la suite du rejet le 16 octobre 2012 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides de la demande de reconnaissance du statut de réfugié présentée par Mme C...et du rejet de son recours contre cette décision le 30 septembre 2013 par la Cour nationale du droit d'asile ; que le préfet de la Vendée était, dès lors, tenu de refuser le titre de séjour demandé sur le fondement des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'autorité administrative qui n'était saisie d'aucune demande à un autre titre, se trouvait ainsi en situation de compétence liée pour refuser de délivrer le titre de séjour sollicité ; que, par suite, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de cette décision, de l'absence d'examen de la situation de l'intéressée, de la méconnaissance des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation, qui sont inopérants, doivent être écartés ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
4. Considérant, en premier lieu, qu'en vertu du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligation de quitter le territoire français n'avait pas à faire l'objet d'une motivation spécifique par rapport à celle du refus de séjour, lequel comporte l'énoncé des éléments de droit et de fait sur lesquels le préfet s'est fondé ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'arrêt Mukarubega (C-166/13) du 5 novembre 2014 de la Cour de justice de l'Union européenne que l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, qui ne s'adresse qu'aux institutions, organes et organismes de l'Union européenne et non pas également à ses Etats membres, n'est pas utilement invoqué dans une procédure relative au droit au séjour d'un étranger ; que si Mme C...peut être regardée comme ayant plus largement invoqué l'atteinte portée au respect des droits de la défense résultant du fait qu'elle n'a pas été entendue avant l'édiction de la mesure d'éloignement prise à son encontre, il ressort des pièces du dossier qu'elle a été mise à même, dans le cadre de sa demande de titre de séjour, de porter à la connaissance de l'administration l'ensemble des informations relatives à sa situation personnelle dont elle souhaitait se prévaloir ; qu'il n'est pas établi qu'elle disposait d'autres informations qu'elle aurait été empêchée de porter à la connaissance des services de la préfecture avant que soit prise à son encontre la décision portant obligation de quitter le territoire français qu'elle conteste et qui, si elles avaient pu être communiquées à temps, auraient été de nature à faire obstacle à l'édiction de cette décision ; que le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu doit, dès lors, être écarté ;
6. Considérant en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) " ; que dès lors que Mme C...a fait l'objet, par l'arrêté contesté, d'une décision portant refus de titre de séjour, elle entrait dans le champ d'application des dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur lesquelles le préfet a fondé sa décision portant obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de base légale de cette décision doit être écarté ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour opposée à Mme C...n'étant pas établie, l'exception d'illégalité de ce refus, soulevée à l'appui des conclusions d'annulation dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écartée ;
8. Considérant, en cinquième lieu, que Mme C...soutient qu'elle a quitté l'Arménie depuis près de 7 ans, qu'elle réside en France depuis 3 ans et demi, que son fils y est scolarisé et qu'elle y est parfaitement intégrée ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressée est entrée récemment et irrégulièrement en France accompagnée de son fils mineur ; qu'elle ne démontre pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu la majeure partie de sa vie ; que son concubin, dont l'intéressée a déclaré, lors du dépôt de sa demande d'asile, qu'il était de nationalité arménienne, a quitté le territoire français au mois de novembre 2014 à destination de la Russie ; que rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue hors de France, et notamment en Arménie où son fils pourra poursuivre sa scolarité ; que, dans ces conditions, en dépit des efforts d'intégration qu'elle a pu réaliser, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas porté d'atteinte disproportionnée au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, la décision contestée n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
En ce qui concerne la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :
9. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...). Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) c) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, de son récépissé de demande de carte de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ; d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...) " ; (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. (...) " ;
10. Considérant que Mme C...soutient que le préfet de la Vendée s'est borné à viser les dispositions précitées du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans indiquer sur lequel des cas envisagés par ces dispositions il a entendu fonder sa décision lui refusant un délai de départ volontaire ; que, toutefois, il se déduit clairement des faits mentionnés dans l'arrêté contesté, qui fait notamment état de ce que Mme C...s'est soustraite à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement, de ce qu'elle n'a pas sollicité le renouvellement de son droit au séjour et de ce qu'elle ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, qu'elle relevait des dispositions précitées du c), du d) et du f) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté ;
11. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Vendée n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle et familiale de MmeC... ;
12. Considérant, en troisième lieu, que, pour refuser à Mme C...un délai de départ volontaire, le préfet de la Vendée a considéré que le risque de fuite était établi aux motifs qu'elle s'est soustraite à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement, qu'elle n'a pas sollicité le renouvellement de son droit au séjour et qu'elle ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'elle n'a produit aucun document d'identité ; qu'elle se trouvait ainsi dans les cas prévus aux c), d) et f) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettant de regarder comme établi le risque qu'elle se soustraie à l'exécution de la mesure d'éloignement dont elle faisait l'objet ; que Mme C...ne peut utilement faire valoir qu'elle réside en France depuis 3 ans et demi, qu'elle ne constitue pas une menace pour l'ordre public, que sa demande de titre de séjour n'était pas infondée ou frauduleuse et qu'elle justifie d'une adresse stable depuis le mois d'avril 2011 dès lors que le préfet de la Vendée ne s'est pas fondé sur ces circonstances pour décider de ne pas assortir l'obligation de quitter le territoire français d'un délai de départ volontaire ; que, dans ces conditions, et en dépit du fait que le fils de l'intéressée était scolarisé, les moyens tirés de ce que le préfet aurait commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation en lui refusant un délai de départ volontaire doivent être écartés ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
13. Considérant, en premier lieu, que la décision fixant le pays à destination duquel Mme C...pourrait être reconduite, qui vise les textes dont elle fait application, notamment l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et souligne que l'intéressée, dont la demande d'asile a été rejetée par les autorités compétentes, n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, est suffisamment motivée ;
14. Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination a méconnu le droit de Mme C...au sens du principe général de l'Union européenne du droit à être entendu tel qu'il est notamment exprimé au 2 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5 du présent arrêt ;
15. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Vendée n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de Mme C...au regard des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine ;
16. Considérant que Mme C..., dont la demande d'asile a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile, soutient qu'un retour en Arménie l'exposerait à des traitements inhumains et dégradants compte tenu de son engagement politique et du contexte d'insécurité et d'instabilité politique régnant dans son pays ; qu'en se bornant ainsi à faire état de considérations d'ordre général, elle n'établit pas la réalité des risques personnellement encourus ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés ;
17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur le surplus des conclusions :
18. Considérant que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction présentées par la requérante ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise au préfet de la Vendée.
Délibéré après l'audience du 4 février 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 février 2016.
Le président rapporteur,
F. Bataille L'assesseur le plus ancien,
S. Aubert
Le greffier,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N 15NT028533