Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 12 mars 2015 et un mémoire complémentaire du 1er juin 2015, M.A..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 24 octobre 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 1er août 2014 du préfet du Loiret ;
3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 250 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué a omis de statuer sur le moyen de légalité externe invoqué devant lui ;
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;
- la grossesse de son épouse et la naissance de son premier enfant postérieurement à la décision contestée sont des circonstances exceptionnelles au sens de l'article L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, permettant d'écarter l'application de l'article L.311-7 du même code ;
- la décision contestée méconnaît également l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- l'avis de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRRECTE) sur la situation de l'emploi dans le métier qu'il doit exercer étant fondé sur un code " répertoire opérationnel des métiers et des emplois " (ROME) erroné, la décision contestée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mai 2015, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que les moyens soulevés par M.A... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 10 décembre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 31 décembre 2015 à 12 h.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. François,
- et les observations de MeC..., substituant MeB..., représentant M.A....
1. Considérant que M.A..., ressortissant turc né le 2 janvier 1985, est entrée irrégulièrement en France le 27 septembre 2007 ; que sa demande d'asile a été rejetée par décision du 19 décembre 2007 par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, confirmée le 24 juin 2008 par la Cour nationale du droit d'asile ; qu'il n'a pas déféré aux arrêtés des 9 juillet 2008 et 20 janvier 2011 du préfet du Loiret portant obligation de quitter le territoire français ; que par un arrêté du 1er août 2014, le préfet du Loiret a pris à son encontre un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français et fixé la Turquie comme pays de destination ; que l'intéressé relève appel du jugement du 17 février 2015 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'en réponse au moyen tiré de ce que la signataire de l'arrêté contesté ne justifiait pas de délégation de signature, le jugement attaqué énonce : " qu'il en est justifié dans le mémoire en défense " ; qu'il est par suite suffisamment motivé ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du préfet du Loiret :
3. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté litigieux qui vise les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il fait application, ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et fait également état d'éléments concernant la biographie et la situation personnelle de M. A... est suffisamment motivé en droit et en fait ; que par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;
5. Considérant que si M. A... fait valoir qu'il s'est marié le 29 mars 2013 avec une ressortissante française et qu'un enfant est né de cette union le 24 septembre 2014, postérieurement à la décision contestée, il n'établit pas toutefois qu'à défaut de circonstances particulières ayant entouré la grossesse de son épouse et nécessité impérativement sa présence, son éloignement aurait eu pour lui-même ou pour sa femme des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, par suite, et alors que la possibilité de revenir ultérieurement en France sous couvert d'un titre régulier ne lui est pas fermée, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la décision contestée sur sa situation personnelle ; que, dès lors, le préfet du Loiret n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
6. Considérant, en troisième lieu, que la légalité d'une décision doit être appréciée à la date de son édiction ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut être utilement invoqué par M. A...dès lors qu'il n'était le père d'aucun enfant lorsque l'arrêté litigieux a été pris le 1er août 2014 ;
7. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative (...) l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. " ;
8. Considérant que si en vue de l'application de ces dispositions, M. A...a produit un contrat de travail à durée indéterminée conclu avec la société G Construction pour un emploi de chef d'équipe finisseur au Mée-sur-Seine dans le département de Seine-et-Marne, il ressort des pièces du dossier que la situation de l'emploi dans le secteur d'activité concerné était alors caractérisée en Ile-de-France par 10 027 demandes d'emploi pour 1 305 offres ; que, par ailleurs et en tout état de cause, l'employeur potentiel de l'intéressé, qui est son beau-père, n'établit pas ni même n'allègue qu'il aurait recherché en vain une personne susceptible d'occuper l'emploi proposé, M. A... ne démontrant pas pour sa part qu'il disposerait d'une compétence sanctionnée par un diplôme lui permettant d'exercer cette profession ou qu'il aurait acquis une expérience suffisante dans ce domaine lui permettant de prétendre à l'exercice de ce métier ; que dans ces conditions, et à supposer même qu'une erreur aurait affecté le code dit " ROME " mentionné par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRRECTE) dans son avis à destination du préfet, ce dernier a pu légalement refuser à M. A...la délivrance d'un titre de séjour fondé sur les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par le requérant ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A...et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise au préfet du Loiret.
Délibéré après l'audience du 2 février 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. Millet, président assesseur,
- M. François, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er mars 2016.
Le rapporteur,
E. FRANCOISLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT00888