Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 12 mars 2015, M. B...représenté par Me C...demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 5 novembre 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 11 juin 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision contestée est insuffisamment motivée ;
- le préfet s'est abstenu de procéder à un examen de sa situation personnelle ;
- l'arrêté contesté a été pris en méconnaissance des articles L. 313-11 2°bis, L. 313-15, L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il a clairement manifesté sa volonté de déposer une demande d'asile ;
- l'illégalité de la décision de refus de séjour entraîne celle de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- l'illégalité des décisions de refus de séjour et d'obligation de quitter le territoire français entraînent celle de la décision fixant le pays de renvoi ;
- la décision méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mai 2015, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 février 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Millet.
1. Considérant que M.B..., ressortissant malien, relève appel du jugement du 5 novembre 2014, par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 juin 2014 du préfet de la Loire-Atlantique lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le Mali, ou tout autre pays où il établirait être légalement admissible, comme pays de renvoi ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté du 11 juin 2014 du préfet de la Loire-Atlantique, mentionne les considérations de droit et les circonstances de fait sur lesquelles il se fonde ; qu'en particulier il rappelle les conditions d'entrée et de séjour de M.B..., examine sa situation personnelle au regard des articles L. 313-11 2°bis et L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne que l'intéressé a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance à l'âge de 17 ans et qu'il suit une formation polyvalente non destinée à lui apporter une qualification professionnelle ; qu'en outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait abstenu de procéder à un examen complet de sa situation personnelle ; que par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et de l'absence d'examen de sa situation personnelle doivent être écartés ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigée. " ;
4. Considérant qu'étant âgé de plus de seize ans lorsqu'il est entré en France et a été confié à l'aide sociale à l'enfance, M. B...n'entrait pas dans le champ d'application des dispositions précitées du 2° bis de l'article L. 313-11 ; que, par suite, le préfet de la Loire-Atlantique a pu légalement refuser de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé " ;
6. Considérant que M. B...a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance du conseil général de la Loire-Atlantique le 19 septembre 2013, alors qu'il était âgé de dix-sept ans ; que s'il n'est pas contesté que le requérant remplit la condition du placement à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et de dix-huit ans, l'intéressé n'établit pas qu'à la date de la décision contestée, il suivait depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle au sens de l'article L. 313-15, son apprentissage de la langue française au sein du dispositif scolaire CDEF et le stage effectué depuis le 6 janvier 2014 ne pouvant en tenir lieu ; que, par suite, et alors même que l'intéressé présente un rapport éducatif et social favorable, le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées, en ne lui délivrant pas la carte de séjour prévue au 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans..." ;
8. Considérant que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; que dès lors que M. B...n'a pas sollicité son admission au séjour au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ne peut utilement en invoquer la méconnaissance ; qu'en tout état de cause ni son état de santé, ni sa prise en charge par l'aide sociale à l'enfance en septembre 2013 ne peuvent être regardés comme des motifs exceptionnels ou des considérations humanitaires au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
9. Considérant, en cinquième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...est entré récemment et irrégulièrement sur le territoire français, qu'il est célibataire sans enfant, et n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident notamment sa mère et son frère et où il a vécu toute sa vie ; qu'il ressort, en outre, des rapports versés au débat qu'il n'a ni réseau amical, ni famille en France ; que, dès lors, alors même que sa volonté d'intégration n'est pas contestée, M. B...est dépourvu d'attaches anciennes, intenses et stables sur le territoire français ; qu'il ne peut utilement se prévaloir de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur ; que, par suite, en lui refusant la délivrance du titre de séjour sollicité, le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
10. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande et procède à la détermination de l'Etat responsable (...) " ; que si M. B...fait valoir qu'il avait manifesté son intention de former une demande d'asile, il est constant que le préfet de la Loire-Atlantique n'était saisi que d'une demande de régularisation de la situation de l'intéressé en raison de sa majorité et non pas de la demande d'asile prétendument souhaitée ; que par suite, le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
11. Considérant, en septième lieu, que l'illégalité des décisions de refus de séjour et d'obligation de quitter le territoire français n'étant pas établie, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi serait dépourvue de base légale ne peut qu'être écarté ;
12. Considérant, enfin, que M. B...fait valoir qu'il encourt des risques de traitement contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine en raison d'une mésentente intrafamiliale et d'une situation sécuritaire préoccupante au Mali ; que, toutefois, ces affirmations à portée générale ne suffisent pas à établir que l'intéressé encourrait personnellement des risques en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le préfet n'a méconnu ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
14. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B...n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction de l'intéressé doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
15. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le conseil de M.B..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.
Une copie sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 2 février 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. Millet, président-assesseur,
- M. François, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er mars 2016.
Le rapporteur,
J-F. MILLETLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT00911