Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 20 février 2018 et 13 février 2019, la commune d'Yquelon, représentée par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 27 décembre 2017 ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme C...devant le tribunal administratif de Caen ;
3°) de mettre à la charge de Mme C...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal ne pouvait se fonder sur l'illégalité du PLU de la commune pour annuler l'arrêté contesté dès lors que celui-ci était régulier, contrairement à ce qu'a pu juger le tribunal administratif de Caen ;
- à titre subsidiaire, si l'ancien PLU devait être remis en vigueur, le permis sollicité par Mme C...devrait également être refusé car la qualification de son projet " d'hébergement hôtelier " n'est pas conforme à la destination du projet.
Par des mémoires en défense enregistré les 29 mars 2018 et 27 mars 2019, MmeC..., représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la commune d'Yquelon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par la commune d'Yquelon ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Giraud,
- les conclusions de M. Derlange, rapporteur public,
- et les observations de MeD..., représentant la commune d'Yquelon.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A...C...a déposé une demande de permis de construire, sur la parcelle cadastrée AK n° 80 située au lieu-dit le Taillais, un hébergement hôtelier composé de cinq logements dits " lodges " et d'un bâtiment annexe, d'une superficie totale de 259,54 m². Par un arrêté du 27 septembre 2016, le maire a sursis à statuer sur sa demande au motif que le plan local d'urbanisme (PLU) était en cours de révision. Mme C...a confirmé le 9 décembre 2016 sa demande initiale après que le nouveau plan d'urbanisme a été approuvé par délibération du conseil municipal du 7 novembre 2016. Par un arrêté du 9 février 2017, le maire d'Yquelon a refusé de délivrer le permis demandé en raison du classement de la parcelle en zone N. Saisi par MmeC..., le tribunal administratif de Caen a annulé cet arrêté par un jugement du 27 décembre 2017. La Commune d'Yquelon relève appel de ce jugement.
Sur la légalité de la décision contestée:
2. Par deux arrêts n°17NT03837 et 17NT03833, la cour administrative d'appel de céans a annulé les jugements n° 1700016 et n° 1700047 du tribunal administratif de Caen par lesquels celui-ci avait annulé la délibération du 7 novembre 2016 approuvant le nouveau plan local d'urbanisme. Ainsi, c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Caen a annulé la décision contestée après avoir constaté l'illégalité de la délibération du 7 novembre 2016.
3. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les demandeurs devant le tribunal administratif de Caen.
4. En premier lieu, l'arrêté contesté mentionne notamment les dispositions du plan local d'urbanisme applicables à la parcelle de MmeC..., la nature du projet envisagé par celle-ci sur cette parcelle. Ainsi, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté serait insuffisamment motivé doit être écarté.
5. En second lieu, aux termes des dispositions de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison :1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; 2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; 3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ; 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ; 5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues. ".
6. Le rapport de présentation du PLU et le projet d'aménagement et de développement durables (PADD) indiquent que la collectivité a souhaité créer un sous-secteur " Nj ", comportant des jardins, des prairies et des vergers, afin de préserver le caractère traditionnel mais aussi les parties naturelles situées en coeur de bourg. Selon les termes du PADD, il s'agit de : " faire entrer la nature au sein des espaces urbanisés autrement que par la simple réalisation d'espaces verts ", de " trouver des connexions possibles visant à recréer une trame verte et bleue cohérente, y compris dans les espaces urbanisés " en s'appuyant " sur des éléments naturels existants comme les cours d'eau, les zones humides et les bois ". La trame bleue définie par ce document est notamment constituée de parcelles comportant des cours d'eau et de zones humides. Le rapport de présentation prévoit également comme objectif de " Centrer le développement urbain sur le bourg " et d'" Eviter la délimitation de zones à urbaniser en extension de l'enveloppe bâtie existante "
7. D'une part, il ressort des pièces du dossier, et en particulier du rapport de présentation, que la parcelle de Mme C...se situe dans une zone humide, soumise au risque de remontée de nappe phréatique, à proximité immédiate de l'affluent du Bosq. D'autre part, la parcelle de Mme C...se situe en extension de la zone bâtie existante et s'ouvre sur des champs à l'ouest, au nord et à l'est dans la partie la plus septentrionale de la parcelle. Ainsi, compte tenu des différents objectifs du PADD, qui contrairement à ce que soutient MmeC..., ne se limitent pas à préserver une ceinture verte autour du bourg et des zones bâties mais favorisent la création au sein de celui-ci d'une trame verte et bleue, des considérations esthétiques, écologiques et des choix d'urbanisation de la commune, et en particulier de la partie traditionnelle du bourg, et alors même que le commissaire enquêteur a indiqué ne pas voir d'obstacle au maintien en zone U des 2/3 sud de cette parcelle, le moyen tiré de ce que le classement de la parcelle de la requérant en zone Nj serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, doit être écarté.
8. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Yquelon est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a annulé l'arrêté du 9 février 2017.
Sur les frais liés au litige:
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune d'Yquelon, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que Mme C...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de cette dernière la somme sollicitée à ce titre par la commune d'Yquelon.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Caen du 27 décembre 2017 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme C...devant le tribunal administratif de Caen, ainsi que ses conclusions présentées en appel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la commune d'Yquelon tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Yquelon, à la communauté de communes Granville Terre et Mer et à MmeC....
Délibéré après l'audience du 20 mai 2019, où siégeaient :
- M. Perez, président de chambre,
- Mme Brisson, président-assesseur,
- M. Giraud, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 7 juin 2019.
Le rapporteur,
T. GIRAUDLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT00764