Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 novembre 2018, sous le n° 1804160, et un mémoire enregistré le 28 février 2019, la ville de Granville et la communauté de communes Granville Terre et Mer, représentées par Me Santos Pires, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1701411 du 25 septembre 2018 ;
2°) de rejeter, après application éventuelle de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme, la requête des associations ;
3°) de mettre à la charge des associations requérantes le versement, pour chacune, d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
Le jugement est irrégulier en ce que :
- les dispositions de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme ont été méconnues ;
- une erreur d'appréciation a été commise ;
Sur l'effet dévolutif :
- aucune insuffisance n'affecte le rapport de présentation tant en ce qui concerne l'état -initial de l'environnement que l'évaluation de ses incidences sur l'environnement ;
- les articles L. 121-8, L. 121-13, L. 121-23, L. 121-27, L. 151-8 et L. 101-2 du code de l'urbanisme n'ont pas été méconnus.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 février 2019, l'association Manche Nature et l'association Granville et Pays de Granville Terre et Mer, représentées par Me Busson, concluent :
- au rejet de la requête ;
- à l'annulation de la délibération du 29 mai 2017 approuvant la révision du plan local d'urbanisme de Granville ;
- à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la commune de Granville au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent qu'aucun moyen n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le décret n° 2015-1783 du 28 décembre 2015 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu s au cours de l'audience publique du 1er octobre 2019 :
- le rapport de Mme Brisson,
- les conclusions de M Derlange,
- et les observations de Me Santos Pires, représentant la commune de Granville et la communauté de communes Granville Terre et Mer.
Considérant ce qui suit :
1. Par délibération de son conseil municipal du 29 mai 2017, la commune de Granville a approuvé la révision de son plan local d'urbanisme ( PLU). Les associations Manche Nature et Granville et Pays de Granville Environnement ont contesté la légalité de document local d'urbanisme. Par un jugement du 25 septembre 2018, le tribunal administratif de Caen a annulé cette délibération. La ville de Granville et la communauté de communes Granville Terre et Mer relèvent appel de ce jugement.
2. Aux termes de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme : " Dans le respect des objectifs du développement durable, l'action des collectivités publiques en matière d'urbanisme vise à atteindre les objectifs suivants : 1° L'équilibre entre : a) Les populations résidant dans les zones urbaines et rurales ; b) Le renouvellement urbain, le développement urbain maîtrisé, la restructuration des espaces urbanisés, la revitalisation des centres urbains et ruraux ; c) Une utilisation économe des espaces naturels, la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection des sites, des milieux et paysages naturels ; d) La sauvegarde des ensembles urbains et la protection, la conservation et la restauration du patrimoine culturel ; e) Les besoins en matière de mobilité (...)". Ces dispositions doivent être interprétées comme imposant seulement aux auteurs des documents d'urbanisme d'y faire figurer des mesures tendant à la réalisation des objectifs qu'elles énoncent. En conséquence, il appartient au juge administratif d'exercer un simple contrôle de compatibilité entre les règles fixées par le plan local d'urbanisme et les dispositions précitées de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme.
3. Il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport de présentation que la population de Granville, de 13 104 habitants au recensement de 2013, a cru de 419 habitants par rapport à 1999, soit en moyenne de 0,33 % par an. Sur cette même période 1 520 nouveaux logements ont été construits tandis que la population a augmenté dans une proportion légèrement plus importante à l'échelle de l'aire urbaine granvillaise (+ 0.6 % par an entre 2007 et 2012). Cette population se caractérise par une part importante de personnes âgées (près de 39 % en 2012), un indice de jeunesse (33 %) inférieur à la moyenne départementale (57 %) et une part importante de personnes seules ou de couples sans enfants (78 % des ménages). La part des couples avec enfants est de 8 points inférieure à celle de l'intercommunalité. Entre 1982 et 2012, la taille des ménages est passée de 2,4 à 1,76 personnes.
4. Par ailleurs, le parc de logements, composé de 71% de résidences principales, le surplus étant des résidences secondaires, ne répond pas aux besoins de la population. Un important taux de vacance des logements est observé (près de 10 %) dont un tiers seulement pourrait être réhabilité. En outre, le coût très élevé de l'immobilier ne permet pas aux personnes modestes et en particulier aux jeunes ménages avec enfants de pouvoir se loger à Granville, ceux-ci s'installant alors dans des logements pavillonnaires construits dans les communes voisines, induisant ainsi une importante consommation d'espaces et emportant un besoin accru de transports et une moindre utilisation des équipements publics.
5. Sur la base d'un taux de croissance de la population de 0,8 % par an, moindre que celui retenu par le schéma de cohérence territoriale (SCOT) de la Baie du Mont St Michel et le plan local de l'habitat de 1 % conduisant à un objectif de construction de 120 à 135 logements par an, les auteurs du plan local d'urbanisme de Granville, pour parvenir à un gain d'environ 1 700 habitants sur une période de 15 ans, ont estimé nécessaire de construire environ 1 500 logements dont 257 logements environ seront absorbés par le phénomène de desserrement familial (passage de 1,92 à 1,85 personnes par logement d'ici à 2030). A cet effet, ils ont exprimé la volonté de densifier la ville par des opérations de renouvellement urbain en centre-ville ou dans sa périphérie. Un potentiel de 300 logements vacants susceptibles d'être transformés en résidences principales a pu être décelé bien que le nombre élevé de logements individuels limite cette possibilité de densification.
6. Compte tenu en particulier de la volonté de préserver les quartiers patrimoniaux de toute évolution susceptible de les dénaturer, la capacité de construction dans les parties déjà urbanisées de la commune, par comblement des dents creuses ou densification des espaces déjà construits, présente un caractère très limité qui a pu être évalué à 250 nouveaux logements. Les auteurs du plan local d'urbanisme ont considéré que le développement de l'habitat pourra s'effectuer principalement par l'extension de l'urbanisation sur les sites de la Horie (1,52 ha) et la création de la zone à urbaniser de la Clémentière (33 ha) sise en périphérie de l'aire agglomérée, permettant une offre diversifiée de logements avec une densité de construction élevée. En outre, le projet d'aménagement et de développement durables se donne pour objectifs, notamment, d'accueillir de nouveaux habitants sans étalement urbain et de présenter une diversité dans la typologie des logements offerts.
7. Dans ce contexte, en dépit de ce que, au cours des 40 dernières années, le doublement des surfaces urbanisées n'a pas conduit à une augmentation sensible de la population granvillaise, laquelle a au demeurant été durement affectée, par le départ, en 1984, d'un régiment de 900 militaires et de leurs familles ou la fermeture en 1996 d'un site industriel, et qu'une importante périurbanisation, consommatrice d'espaces naturels et agricoles et source d'inconvénients environnementaux peut être constatée dans les communes limitrophes de Granville, laquelle conserve un pouvoir attractif, les auteurs du plan local d'urbanisme se sont donné pour objectif de créer 1 500 habitations nouvelles sur 15 ans tout en instituant une diversité dans les opérations urbaines et sans qu'il ne soit porté atteinte à la richesse architecturale du patrimoine local en concentrant l'urbanisation nouvelle en des lieux prédéterminés. Par suite, aucune incompatibilité ne peut être relevée entre les objectifs du PLU et les principes posés à l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme.
8. Dès lors, c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur ce moyen pour annuler la délibération portant révision du plan local d'urbanisme.
9. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les associations Manche Nature et Granville Terre et Mer devant le tribunal administratif de Caen.
Sur le moyen tiré des insuffisances du rapport de présentation :
10. Aux termes de l'article L. 121-10 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au présent litige : " I. - Font l'objet d'une évaluation environnementale, (...) II. - (...) les documents qui déterminent l'usage de petites zones au niveau local suivants : 1° Les plans locaux d'urbanisme : a) Qui sont susceptibles d'avoir des effets notables sur l'environnement, au sens de l'annexe II à la directive 2001/42/ CE du Parlement européen et du Conseil, du 27 juin 2001, précitée, compte tenu notamment de la superficie du territoire auquel ils s'appliquent, de la nature et de l'importance des travaux et aménagements qu'ils autorisent et de la sensibilité du milieu dans lequel ceux-ci doivent être réalisés ; (...) ". Aux termes de l'article R. 123-2-1 du même code, applicable en l'espèce en vertu des dispositions de l'article 12 du décret n° 2015-1783 du 28 décembre 2015 relatif à la partie réglementaire du livre Ier du code de l'urbanisme et à la modernisation du contenu du plan local d'urbanisme dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le conseil municipal de Granville se serait prononcé pour décider de mettre en oeuvre les dispositions de l'article R. 151-5 du code de l'urbanisme : " Lorsque le plan local d'urbanisme doit faire l'objet d'une évaluation environnementale conformément aux articles L. 121-10 et suivants, le rapport de présentation : / 1° Expose le diagnostic prévu au deuxième alinéa de l'article L. 123-1-2 et décrit l'articulation du plan avec les autres documents d'urbanisme et les plans ou programmes mentionnés à l'article L. 122-4 du code de l'environnement avec lesquels il doit être compatible ou qu'il doit prendre en considération ; / 2° Analyse l'état initial de l'environnement et les perspectives de son évolution (...) ; / 3° Analyse les incidences notables prévisibles de la mise en oeuvre du plan sur l'environnement et expose les conséquences éventuelles de l'adoption du plan sur la protection des zones revêtant une importance particulière pour l'environnement, (...) ; 4° Explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, (...) ; / 5° Présente les mesures envisagées pour éviter, réduire et, si possible, compenser, s'il y a lieu, les conséquences dommageables de la mise en oeuvre du plan sur l'environnement ; / 6° Définit les critères, indicateurs et modalités retenus pour l'analyse des résultats de l'application du plan prévue par l'article L. 123-12-2. (...) ; / 7° Comprend un résumé non technique des éléments précédents et une description de la manière dont l'évaluation a été effectuée. / Le rapport de présentation est proportionné à l'importance du plan local d'urbanisme, aux effets de sa mise en oeuvre ainsi qu'aux enjeux environnementaux de la zone considérée. (...) / Le rapport de présentation peut se référer aux renseignements relatifs à l'environnement figurant dans d'autres études, plans ou documents. ".
11. En premier lieu, il est constant que le territoire de la commune de Granville comprend plusieurs espaces bénéficiant d'une protection particulière (plusieurs zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique - ZNIEFF- , sites Natura 2000, un site Ramsar, un site classé et des sites inscrits). Le rapport de présentation comporte un diagnostic des sites d'enjeux au titre desquels figure le site de La Clémentière (p 442 et s du tome 1 du rapport de présentation) qui décrit avec précision le contexte urbain, analyse les espaces patrimoniaux entourant le site, la topographie, le paysage avec notamment la mise en évidence de covisibilités sur le versant opposé de la vallée de la Saigue, les incidences des trames verte et bleue et les conditions d'accessibilité du site. Il ne ressort pas des dispositions précitées que le rapport de présentation doit contenir des éléments d'information relatifs à la faune aussi précis que ceux devant figurer dans une étude d'impact. En tout état de cause, si l'étude d'impact qui avait été réalisée préalablement à la déclaration d'utilité publique de la zone d'aménagement concerté (ZAC) de la Clémentière faisait état de la présence de milieux intéressants du point de vue écologique tels que des haies bocagères, des zones humides, des prairies en lien avec le vallon central, permettant l'accueil de la faune (comme les amphibiens qui constituent des espèces protégées, ainsi que potentiellement, d'autres espèces animales) et qui notait qu'aucune espèce floristique d'intérêt patrimonial n'a été recensée, cette circonstance ne saurait suffire à établir que le rapport de présentation, dans ses éléments relatifs à l'analyse du site de la Clémentière, serait entaché d'insuffisance.
12. En deuxième lieu, le rapport de présentation a notamment pour objectif de préserver les espaces boisés situés à proximité des résidences patrimoniales. Si des suppressions de boisement sont prévues sur le site de la Horie, situé en périphérie de la ville, sur lequel la commune envisage de créer une zone à urbaniser, l'étude phytosanitaire effectuée par un expert foncier mentionne que les boisements qui s'y trouvent, jeunes, ne présentent aucun intérêt particulier et seront remplacés par de nouveaux boisements.
13. En troisième lieu, si les requérants allèguent que la méthode itérative d'élaboration du plan local d'urbanisme " au fil de l'eau " est de nature à induire en erreur, ils ne l'établissent pas, cette méthode ayant l'intérêt de permettre d'apprécier les modifications apportées lors de l'élaboration de ce document.
14. En quatrième lieu, il ne découle pas des termes de l'article R.123-2-1 du code de l'urbanisme que le rapport de présentation devrait nécessairement être accompagné d'une étude des incidences du plan local d'urbanisme sur la qualité de l'air. En tout état de cause, le rapport a mentionné que le territoire de la commune de Granville ne comporte pas d'activités polluantes et si l'accroissement de la population est susceptible d'accroître les déplacements urbains, des modes de déplacement doux seront développés.
15. En dernier lieu, le rapport de présentation comporte (p 417 à 437 du tome 1) une analyse approfondie de l'environnement et des paysages de Chausey, de l'architecture qui s'y trouve et dont les enjeux sont récapitulés (p. 509 du tome 1). Il précise également (p 105 du tome 3) que le projet portuaire est susceptible d'avoir un effet direct sur la ZNIEFF située à proximité mais dont il est constant que l'état est dégradé et comporte (p. 154 à 170 du tome 3) une étude des incidences du projet de plan local d'urbanisme sur le site Natura 2000 de Chausey et de la Baie du Mont St Michel et des sites à enjeux écologiques (zones de protection spéciale). La circonstance que des études complémentaires devront être effectuées à l'occasion de la mise en oeuvre du projet de réaménagement du site du port ne saurait révéler une insuffisance du rapport de présentation sur ce point.
Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme :
16. Aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme : " L'extension de l'urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. ". Il ressort des pièces du dossier et notamment des cartes et documents graphiques composant le plan local d'urbanisme, que celui-ci a pu, sans méconnaître ces dispositions, prévoir l'aménagement et l'agrandissement de l'espace portuaire consistant à déplacer vers l'Est une partie des activités économiques et à valoriser les espaces terrestres à l'interface de la ville et du port au sein de la partie agglomérée du centre-ville de Granville.
Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme :
17. Aux termes de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme : " L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés au 1° de l'article L. 321-2 du code de l'environnement est justifiée et motivée dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. / Toutefois, ces critères ne sont pas applicables lorsque l'urbanisation est conforme aux dispositions d'un schéma de cohérence territoriale ou d'un schéma d'aménagement régional ou compatible avec celles d'un schéma de mise en valeur de la mer. ".
18. Pour déterminer si une zone peut être qualifiée d'espace proche du rivage au sens des dispositions précitées, trois critères doivent être pris en compte, à savoir la distance séparant cette zone du rivage, son caractère urbanisé ou non et la covisibilité entre cette zone et la mer. L'objectif d'urbanisation limitée visé par ces dispositions exige que soit retenu, comme espace proche du rivage, un territoire dont le développement urbain forme un ensemble cohérent. Le critère de covisibilité n'implique pas que chaque parcelle située au sein de l'espace ainsi qualifié soit située en covisibilité de la mer, dès lors qu'une telle parcelle ne peut être séparée de l'ensemble cohérent dont elle fait partie.
19. S'il ressort des pièces du dossier que certaines des parcelles sises le plus à l'ouest du site de la Clémentière se trouvent en situation de covisibilité avec le littoral et à une distance de plus d'un km, tel n'est pas le cas de toutes les parcelles composant ce site. La ZAC projetée, d'une superficie de 33 ha, jouxte le sud de la partie urbanisée de la ville de Granville dont elle forme le prolongement. Ce site est, dans son intégralité, situé à l'est du tracé de la limite des espaces proches du rivage. De plus, le plan local d'urbanisme prévoit d'urbaniser en premier la partie la plus à l'est de cette zone. Dans ces conditions, le projet d'aménagement du site de la Clémentière qui constitue le principal secteur dans lequel une extension de l'urbanisation est possible, doit, en l'espèce, être regardé comme revêtant le caractère d'une extension limitée de la ville de Granville.
Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme :
20. Aux termes de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme : " Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. ".
21. S'il est constant qu'un talwegg à l'origine d'une zone humide se situe au sud du site de la Clémentière, cet espace n'est d'une superficie que de 3 ha alors que l'ensemble de la zone d'aménagement concerté ( ZAC) en comporte 33. De plus, comme il a été dit ci-dessus, la présence de faune ou de flore protégée n'est pas avérée. Par suite, contrairement à ce que soutiennent les requérants, ce site ne peut être regardé comme présentant les caractéristiques d'un site remarquable. Dans ces conditions, les dispositions précitées du code de l'urbanisme n'ont pas été méconnues.
Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 121-27 du code de l'urbanisme :
22. Aux termes de l'article L. 121-27 du code de l'urbanisme : " Le plan local d'urbanisme classe en espaces boisés, au titre de l'article L. 113-1, les parcs et ensembles boisés existants les plus significatifs de la commune ou du groupement de communes, après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites. ".
23. Si le site de la Horie comporte au nord un parc constitutif d'un espace boisé qui a antérieurement bénéficié d'un classement en espace boisé classé (EBC), il ressort du diagnostic d'un expert foncier, dont les conclusions ne sont pas contredites, que, comme il a été indiqué ci-dessus, cet ensemble végétal, relativement jeune, ne comprend pas d'essence rare pour la région. Les zones constructibles seront situées sur les limites nord et nord-est du site et les boisements supprimés seront compensés par la création de nouveaux boisements au sud. Dans ces conditions, alors même que la commission départementale de la nature, des paysages et des sites a émis un avis défavorable à la suppression de boisements sur ce site, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que les auteurs du plan local d'urbanisme auraient entaché leur décision de supprimer ce classement en EBC d'une erreur manifeste d'appréciation.
Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme :
24. Aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ".
25. En premier lieu, si les requérantes arguent que le développement du port est susceptible d'aggraver le phénomène d'envasement déjà constaté, il ressort cependant des pièces du dossier que le volume des sédiments sera moins important que par le passé compte tenu de la réduction des surfaces permanentes en eau et que des études hydrosédimentaires complémentaires seront à effectuer lors de la finalisation du projet portuaire. Le règlement de la zone 1AUp correspondant aux espaces maritimes destinés à accueillir le projet d'extension portuaire et prévoyant la possibilité de permettre les ouvrages techniques liés à l'activité portuaire est ainsi cohérent avec l'objectif d'accompagnement du projet portuaire qui prévoit de soigner le traitement paysager des futurs terre-pleins visibles depuis la mer et de l'extension du port du Herel vers l'est, de permettre une réappropriation des espaces portuaires par la ville, de protéger le patrimoine naturel et de procéder à des aménagements respectueux de l'environnement tout en améliorant l'interface ville-port.
26. En deuxième lieu, il ressort notamment des documents graphiques que le talwegg du site de la Clémentière est classé, non pas en zone AU, mais en zone N, permettant ainsi de préserver cet espace et le réseau hydrographique qu'il comporte.
27. En troisième lieu, il ressort des termes mêmes du projet d'aménagement et de développement durables que les auteurs du plan local d'urbanisme ont pour objectif de préserver le site naturel de Chausey en prenant les mesures propres à en limiter la fréquentation laquelle n'a pas pour seule origine les bateaux provenant de la gare maritime de Granville.
28. En quatrième lieu, alors que les zones A et U sont en légère augmentation par rapport au plan local d'urbanisme de 2008 (+ 7 ha environ), la seule circonstance qu'une trentaine d'ha sera utilisée pour permettre l'extension des zones urbanisées de la ville, n'est pas, à elle seule, alors qu'une densité minimale de 25 logements par ha est prévue afin de limiter la consommation d'espaces, de nature à établir une incompatibilité avec l'objectif d'extension maîtrisée de la ville prévue par le projet d'aménagement et de développement durables.
29. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Granville et la communauté de communes Granville Terre et Mer sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a annulé la délibération du 29 mai 2017 approuvant la révision du PLU de Granville.
Sur les frais liés au litige :
30. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Granville et de la communauté de communes Granville Terre et Mer, le versement d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées à ce titre par les associations Manche Nature et Granville et Pays de Granville environnement ne peuvent dès lors être accueillies.
31. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge des associations Manche Nature et Granville et Pays de Granville environnement une somme de 3 000 euros qui sera versée, pour chacune, à la commune de Granville et à la communauté de communes Granville Terre et Mer au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 25 septembre 2018 du tribunal administratif de Caen est annulé.
Article 2 : La demande des associations Manche Nature et Granville Terre et Mer présentée devant le tribunal administratif de Caen est rejetée.
Article 3 : Les associations Manche Nature et Granville Terre et Mer verseront chacune à la commune de Granville et à la communauté de communes Granville Terre et Mer la somme de 3 000 euros en application de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Granville, à la communauté de communes Granville Terre et Mer, à l'association Manche Nature et à l'association Granville et pays de Granville environnement.
Délibéré après l'audience du 1er octobre 2019, où siégeaient :
- M. Perez, président de chambre,
- Mme Brisson, président-assesseur,
- M. L'hirondel, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 21 octobre 2019.
Le rapporteur,
C. Brisson Le président,
A. PEREZ
Le greffier,
A BRISSET
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT04160