Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 24 mars 2016, Mme E...épouseC..., représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 21 décembre 2015;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté du préfet du Loiret du 28 mai 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation, et, dans cette attente, de la munir d'une attestation provisoire de séjour, le tout dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil d'une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- les premiers juges ne se sont pas prononcés sur le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-6, celles du 7° de l'article L. 313-11 et celles de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté contesté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mai 2016, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens invoqués par Mme E...épouse C...ne sont pas fondés.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er mars 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Lemoine a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que MmeC..., ressortissante marocaine, née le 21 décembre 1960, est entrée régulièrement en France le 15 août 2014 sous couvert d'un visa de court séjour ; qu'elle relève appel du jugement du 21 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 mai 2015 du préfet du Loiret refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant qu'en indiquant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en refusant de délivrer à Mme E...épouse C...un titre de séjour, le préfet du Loiret ait porté une atteinte disproportionnée au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale, les premiers juges ont répondu, au point 5 du jugement attaqué, au moyen, par ailleurs inopérant, tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée, en tout état de cause, à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une omission à statuer ;
Sur la légalité de l'arrêté contesté :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. (...) " ;
4. Considérant, d'une part, que Mme C...ne peut utilement se prévaloir des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle entre dans la catégorie des personnes susceptibles de bénéficier d'une demande de regroupement familial, étant marié à un ressortissant marocain titulaire d'une carte de résident ; que, pour le même motif, elle ne peut pas davantage faire utilement valoir la circonstance que les ressources de son époux sont insuffisantes pour lui permettre de bénéficier d'une tel regroupement ;
5. Considérant, d'autre part, que si Mme C...soutient que son époux, retraité, réside régulièrement en France et que, compte tenu de son état de santé, sa présence aux côtés de ce dernier est indispensable, il ressort, toutefois, des pièces du dossier que la requérante n'est entrée en France, à la date de l'arrêté contesté, que très récemment, le 15 août 2014 ; qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, où vivent deux de ses enfants et où elle a résidé plusieurs années éloignée de son époux, lequel séjourne sur le territoire national depuis 1973 ; que les certificats médicaux produits en première instance, peu circonstanciés, ne permettent pas d'établir que l'état de santé de son mari nécessiterait l'aide d'une tierce personne dans les actes de la vie quotidienne ; que, dans ces conditions, eu égard, en particulier, à la courte durée de la présence en France de MmeC..., l'arrêté contesté n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, cet arrêté n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme C...;
6. Considérant, en deuxième lieu, que si Mme C...se prévaut de son séjour en France entre 2001 et 2007 ainsi que de sa situation personnelle et familiale, ces circonstances ne constituent pas des motifs exceptionnels ou des considérations humanitaires au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile justifiant qu'un titre de séjour lui soit délivré sur le fondement de ces dispositions ;
7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour " compétences et talents " sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-6 du même code : " La carte de séjour temporaire délivrée à l'étranger qui apporte la preuve qu'il peut vivre de ses seules ressources et qui prend l'engagement de n'exercer en France aucune activité professionnelle porte la mention " visiteur ". " ;
8. Considérant qu'il est constant que MmeC..., qui est entrée sur le territoire national munie d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour, n'était pas en possession d'un visa pour un séjour d'une durée supérieur à trois mois ; que, par suite, le préfet du Loiret a pu légalement se fonder sur ce seul motif pour refuser de lui délivrer la carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur " ;
9. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier des termes mêmes de l'arrêté contesté, que le préfet a examiné l'ensemble de la situation personnelle et familiale de la requérante et ne s'est pas estimé lié par l'absence de visa de long séjour ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise le préfet au regard de la possibilité dont il dispose d'exercer son pouvoir de régularisation doit être écarté ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme E...épouse C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...E...épouse C...et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise au préfet du Loiret.
Délibéré après l'audience du 30 mars 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Coiffet, président-assesseur,
- M. Gauthier, premier conseiller,
- M. Lemoine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 14 avril 2017.
Le rapporteur,
F. LemoineLe président,
O. CoiffetLe greffier,
M. D...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°16NT010502