Par un arrêt n° 13NT03220 du 30 avril 2015, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par M. B...contre ce jugement.
Par une décision n°391552 du 13 juin 2016, le Conseil d'État statuant au contentieux a annulé cet arrêt du 30 avril 2015 et renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Nantes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 26 novembre 2013, 23 février et 27 mars 2015, M. B...a demandé à la cour administrative d'appel de Nantes :
1°) d'annuler le jugement du 26 septembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2002, 2003 et 2006 ainsi que des pénalités correspondantes ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités ;
3°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il n'a pas sollicité le responsable financier de la banque en vue de prêts fictifs et doit donc être déchargé des impositions litigieuses ou, à tout le moins, des pénalités ;
- la somme de 36 642,34 euros perçue en 2002 par la société civile immobilière MG dont il est associé correspond à un prêt contracté par cette société et n'est en conséquence pas imposable dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ;
- les sommes versées sur son compte bancaire en 2002 et 2003, d'un montant total de 172 150,81 euros, correspondent à un prêt en vue de l'acquisition d'un immeuble aux Sables d'Olonne qui a d'ailleurs déjà été en partie remboursé par prélèvement bancaire en 2004 à hauteur de 150 000 euros ;
- la société civile immobilière (SCI) la Huchonnière a bénéficié en 2006 d'une offre de prêt modulable de 200 000 euros et les sommes relevées par l'administration au titre de l'année 2006 pour un montant de 166 888 euros proviennent du déblocage partiel de ce prêt ; elles ne constituent pas des sommes imposables ;
- les sommes d'un montant de 27 000 euros perçues en 2006 à titre personnel correspondent à un remboursement partiel de son compte courant d'associé dans les livres de la SCI la Huchonnière et par suite ne sont pas imposables ;
- il a été relaxé du chef de recel de biens obtenus à l'aide d'un abus de confiance par un jugement en date du 27 mai 2013 du tribunal de grande instance de La Roche-sur-Yon, siégeant en audience correctionnelle ;
- pour pouvoir imposer dans le cadre de la procédure contradictoire des sommes sur le fondement de l'article 92 du code général des impôts, l'administration doit établir qu'il s'agit de profits tirés d'une activité ; or l'administration n'apporte pas en l'espèce la preuve que les sommes qu'il a appréhendées sont des revenus tirés d'une activité déterminée ; en particulier, elle n'établit pas l'existence de l'activité de détournement de fonds ;
- à titre subsidiaire, les sommes en cause constituent des avances de trésorerie qui ne sont dès lors pas imposables.
Par des mémoires en défense enregistrés les 18 mars 2014, 16 mars et 31 mars 2015, le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués par M. B...n'est fondé.
Procédure devant la cour après cassation :
Par un mémoire enregistré au greffe de la cour le 8 septembre 2016, le ministre des finances et des comptes publics demande à la cour de rejeter la requête d'appel de M. B...en se référant à ses précédentes écritures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lemoine,
- et les conclusions de M. Giraud, rapporteur public.
1. Considérant qu'à l'issue de la procédure de rectification contradictoire faisant suite à l'examen de sa situation fiscale personnelle l'administration fiscale a rehaussé les revenus déclarés par M. B...au titre des années 2002, 2003 et 2006, et soumis à l'impôt, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, à raison d'une source de profits ne se rattachant à aucune autre catégorie de bénéfices ou de revenus, des sommes créditées sur le compte que ce contribuable détenait à la Caisse d'Epargne des Pays de la Loire ainsi que sur les comptes détenus par la société civile immobilière (Sci) MG et la société civile immobilière La Huchonnière, dont il détenait la moitié des parts ; que M. B... a saisi d'une demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales résultant de ces redressements le tribunal administratif de Nantes qui, par un jugement du 26 septembre 2013, a rejeté ses conclusions ; que, par un arrêt n° 13NT03220 du 30 avril 2015, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par M. B...contre ce jugement ; que, par une décision n°391552 du 13 juin 2016, le Conseil d'État, statuant au contentieux a annulé cet arrêt et renvoyé à la cour administrative d'appel de Nantes l'affaire, qui porte désormais le n°16NT01968 ;
Sur les conclusions aux fins de décharge :
En ce qui concerne le bien-fondé de l'impôt :
2. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 92 du code général des impôts : "Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus." ; qu'il appartient à l'administration, lorsqu'elle entend fonder une imposition sur les dispositions de cet article, en dehors de toute procédure de taxation d'office, d'établir que les sommes réintégrées dans les bases imposables du contribuable constituent des revenus ; que dans ce cadre, il incombe au juge de l'impôt d'apprécier si l'administration établit la nature de revenus des sommes en cause, compte tenu des éléments de preuve qu'elle présente et, le cas échéant, des éléments que lui soumet le contribuable qui soutient que les sommes en litige ne présentent pas la nature de revenus ou relèvent d'une autre catégorie d'imposition et de ceux que l'administration lui oppose alors en vue d'établir, par tout autre moyen complémentaire, le bien-fondé de l'imposition ;
3. Considérant que, par un arrêt du 14 février 2014, la cour d'appel de Poitiers statuant en matière correctionnelle a, dans le cadre d'une procédure pénale initiée au début de l'année 2008, condamné le directeur de l'agence de la Caisse d'Épargne des Pays de la Loire, dans laquelle M. B... et les sociétés civiles immobilières La Huchonnière et MG détenaient des comptes, des chefs d'abus de confiance et de faux en écritures pour avoir accordé à certains de ses clients des prêts sans respecter les formalités légales, par prélèvement d'argent sur d'autres comptes, ces prélèvements étant à leur tour ultérieurement comblés par d'autres prélèvements ; qu'à l'occasion de l'examen de la situation fiscale personnelle de M.B..., réalisé au cours de l'année 2008, l'administration fiscale a relevé que d'importantes sommes avaient été créditées par la même agence bancaire sur les comptes personnels de M. B...et sur ceux des Sci dont il était l'associé à hauteur de 50 % ; que ces sommes, perçues sous la forme de dix virements ou chèques de banque pour les montants respectifs de 36 642,34 euros et 136 661 euros en 2002, 30 489,81 euros et 5 000 euros en 2003, 10 000 euros, 11 000 euros, 145 888 euros ainsi que 5 000 euros, 8 000 euros et 14 000 euros en 2006, et dont les caractéristiques sont détaillées ci-dessous, n'avaient aucune cause identifiée et ne correspondaient à aucun acte de prêt régulièrement consenti ; qu'elles pouvaient, dans ces conditions, être regardées comme constituant des sources renouvelées de profits de nature à justifier leur imposition sur le fondement des dispositions de l'article 92 du code général des impôts rappelées au point 2 ;
4. Considérant, en premier lieu, que, pour contester les impositions mises à sa charge dans les conditions rappelées ci-dessus, M. B...fait valoir qu'il a été relaxé par la cour d'appel de Poitiers des chefs d'accusation de recel qui avaient été retenus contre lui ; que, toutefois, si cette décision de relaxe permet de regarder pour établi le fait que l'intéressé ignorait que les crédits dont il avait bénéficié avaient pour origine des faits délictueux commis par le responsable de l'agence bancaire dont il relevait, elle ne saurait, sur le fondement invoqué de l'autorité de la chose jugée qui s'attache aux constatations de faits opérées par le juge pénal, avoir eu pour effet d'attribuer aux sommes en litige la qualification de prêts bancaires et de déterminer ainsi leur régime fiscal ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'en ce qui concerne le virement bancaire d'un montant de 36 642,34 euros dont a été bénéficiaire la Sci MG au titre de l'année 2002, il résulte des énonciations de l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers en date du 14 février 2014 que si M. B... reconnaît devoir cette somme à la Caisse d'Épargne, la Sci MG n'a pas procédé à son remboursement ; qu'en l'absence de tout document ou même de tout acte comptable établissant la nature de prêt de la somme en litige, la Sci MG ne peut ainsi qu'être regardée comme ayant disposé de cette somme sans contrepartie ; que c'est, par suite, à bon droit que l'administration a imposée celle-ci en tant que source de profit au sens des dispositions du 1 de l'article 92 du code général des impôts à hauteur des parts d'associé de M. B...dans la Sci MG, soit 50 %, pour un montant de 18 321 euros ;
6. Considérant, en troisième lieu, que M. B...a bénéficié, au titre de l'année 2002 et conjointement avec M.D..., d'une somme de 136 661 euros en vue de financer l'acquisition d'un immeuble aux Sables d'Olonne ; que cette somme a été mise à disposition sur un compte bancaire n° 04063540972 ouvert au nom de MM. "B...ou D..." à la Caisse d'Epargne des Pays de la Loire ; que les intéressés ont également perçu, en 2003, deux versements de 30 489,81 euros et de 5 000 euros enregistrés sur le même compte bancaire, qui a été ainsi crédité au titre des deux années de la somme totale de 172 150 euros, destinée selon les affirmations non contestées du contribuable, à une acquisition immobilière ; que si aucun acte de prêt ni aucun document bancaire ou comptable ne permet de qualifier les trois sommes en litige de crédits remboursables, et par voie de conséquence non imposables, il est cependant non contesté que le même compte bancaire n° 04063540972 a été débité, par un virement auquel a procédé d'office le responsable bancaire le 17 septembre 2004 sous l'intitulé " remboursement de prêt ", de la somme de 150 000 euros ; que, dans ces conditions, et alors qu'il n'est pas démontré que les intéressés auraient conservé la disposition de cette somme à une autre fin, le remboursement des sommes créditées en 2002 et 2003 pour un montant total de 172 150 euros au profit du contribuable et de M. D...et, par voie de conséquence, leur qualification de prêt et non de profit doivent, à hauteur de 150 000 euros, être regardés comme établis ; que, par suite, le montant de revenus restant, au titre de ce chef de redressement, à imposer comme source de profit entre les mains de M. B...doit être ramené à zéro au titre de l'année 2002 et, au titre de l'année 2003, à 22 150 / 2 euros, soit 11 075 euros constituant la part de 50% dont a bénéficié M. B...au titre de cette année ;
7. Considérant, en quatrième lieu, qu'au cours de l'année 2006 la Sci La Huchonnière, dont M. B...est l'associé à hauteur de 50 % des parts, a obtenu le versement d'une somme globale de 166 888 euros, dont 145 888 euros versés directement par la Caisse d'Epargne des Pays de la Loire à maîtreC..., notaire, et de deux virements de 10 000 et 11 000 euros crédités sur le compte professionnel de cette société auprès de l'agence des Herbiers de la Caisse d'Epargne, en vue de l'acquisition d'un immeuble à Cholet ; que cette somme n'a fait, en l'état de l'instruction, l'objet d'aucun remboursement de la part de la société bénéficiaire ; que si M. B... soutient qu'il aurait bénéficié d'une offre de prêt modulable d'un montant total de 200 000 euros, les seuls documents produits par lui, consistant en une simulation de prêt et un tableau d'amortissement non datés et non authentifiables ne sauraient en constituer la preuve ; que, par conséquent, c'est également à bon droit que l'administration fiscale a estimé que la somme de 166 888 euros obtenue sans contrepartie avérée constituait un bénéfice ou une source de profit au sens des dispositions du 1 de l'article 92 du code général des impôts pouvant être ajouté aux revenus imposables de M. B...à hauteur de ses parts d'associé, soit 50 %, pour un montant de 83 444 euros ;
8. Considérant, en cinquième et dernier lieu, que le compte bancaire personnel de M. B... a été crédité les 13 mai 2006, 20 mai 2006 et 11 octobre 2006 de trois montants inexpliqués de 5 000 euros, 8 000 euros et 14 000 euros, soit un total de 27 000 euros ; que si M. B... soutient que ces sommes provenaient de son compte courant d'associé dans la Sci La Huchonnière, aucun document ni mouvement comptable ne permet de confirmer ses propos, alors que l'administration affirme sans être contredite que ce compte d'associé était, au 1er janvier de l'année 2006, débiteur de 15 000 euros ; que, par suite, l'administration fiscale était en droit de réintégrer la somme de 27 000 euros dans les revenus d'origine non commerciale de M. B... au titre de l'année 2006 ;
9. Considérant, enfin, que M. B...ne développe aucun moyen propre à l'encontre des pénalités prévues à l'article 1729 du code général des impôts ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'assiette d'imposition de M. B... telle qu'elle résulte des redressements litigieux doit être ramenée à 18 321 euros au titre de l'année 2002 et à 11 075 euros au titre de l'année 2003 ; que M. B...est seulement fondé dans cette mesure à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à M. B...d'une somme de 1 500 euros en remboursement des frais que celui-ci a exposés à l'occasion de la présente instance et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La base d'imposition à l'impôt sur le revenu de M. B...telle qu'elle résulte des redressements contestés est ramenée à 18 321 euros au titre de l'année 2002 et à 11 075 euros au titre de l'année 2003.
Article 2 : M. B...est déchargé des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales et des pénalités s'y rapportant correspondant à la réduction de base d'imposition prononcée à l'article 1er.
Article 3 : Le jugement n° 1102975 du 26 septembre 2013 du tribunal administratif de Nantes est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'État versera à M. B...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 8 décembre 2016 à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- M. Gauthier, premier conseiller,
- M. Lemoine, premier conseiller.
Lu en audience publique le 23 décembre 2016.
Le rapporteur,
F. Lemoine
Le président,
I. Perrot
Le greffier,
M. E...
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°16NT01968