Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 16 novembre 2015 Mme A..., représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 26 juin 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Finistère de produire l'entier dossier de la requérante ;
4°) d'enjoindre au préfet du Finistère, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
5°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- le tribunal a omis de statuer sur ses conclusions tendant à ce que qu'il soit enjoint au préfet de produire son entier dossier ;
- elle aurait dû être informée avant l'audience de ce que le rapporteur public y prononcerait ou non des conclusions ;
- la décision portant refus de titre de séjour a été prise en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle s'en rapporte à ses moyens de légalité externe et interne présentés en première instance qu'elle entend de nouveau invoquer en ce qui concerne cette décision ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- elle s'en rapporte à ses écritures de première instance en ce qui concerne les autres moyens de légalité externe ou interne se rapportant à cette décision, à la décision fixant la durée du délai de départ volontaire et à la décision l'obligeant à remettre son passeport et à se présenter une fois par semaine au commissariat.
Par un mémoire enregistré le 23 mai 2016, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 octobre 2015.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979,
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Coiffet a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme A..., ressortissante du Cameroun, relève appel du jugement du 26 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 novembre 2014 du préfet du Finistère refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de destination et l'obligeant à remettre son passeport et à se présenter une fois par semaine aux services de la circonscription de sécurité publique de Brest ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 711-3 du code de justice administrative : "(...) Lorsque l'affaire est susceptible d'être dispensée de conclusions du rapporteur public, en application de l'article R. 732-1-1, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, si le rapporteur public prononcera ou non des conclusions et, dans le cas où il n'en est pas dispensé, le sens de ces conclusions." ;
3. Considérant qu'il ne ressort ni des pièces du dossier, ni de la fiche Sagace, que Mme A..., ou son conseil, auraient été informés avant la tenue de l'audience devant le tribunal administratif de Rennes que le rapporteur public serait dispensé de prononcer ses conclusions ; qu'ainsi la requérante est fondée à soutenir que le jugement attaqué est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière ; que, par suite, ce jugement doit être annulé ;
4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Rennes ainsi que sur les autres conclusions présentées par elle devant la cour ;
Sur la légalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français :
5. Considérant que le préfet du Finistère a, par un arrêté du 18 septembre 2014 régulièrement publié, donné délégation de signature à M. Eric Etienne, secrétaire général de la préfecture du Finistère, à l'effet notamment de signer tous les actes relevant des attributions du préfet, à l'exception de certains actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions relatives au séjour et à l'éloignement des étrangers ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des décisions contestées manque en fait ;
6. Considérant que l'arrêté contesté comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et les principaux éléments relatifs au parcours et à la situation personnelle et familiale de Mme A... tels que portés à la connaissance du préfet ; que, dès lors, les décision portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sont suffisamment motivées ;
7. Considérant que pour refuser la délivrance du titre de séjour sollicité par la requérante, le préfet du Finistère s'est fondé sur l'avis émis le 5 novembre 2014 par le médecin de l'agence régionale de santé de Bretagne indiquant notamment que l'état de santé de Mme A... nécessitait une prise une charge dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que si l'intéressée soutient qu'il est très difficile de traiter l'hépatite C dans son pays d'origine et que son mari y est décédé de cette maladie, elle ne produit aucun justificatif de nature à infirmer l'avis précité du médecin de l'agence régionale de santé ; que, dès lors, en refusant la délivrance d'un titre de séjour à l'intéressée et en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet du Finistère n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du 10° de l'article L. 511-4 du même code ;
8. Considérant que la requérante, qui n'établit pas avoir présenté sa demande de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut utilement se prévaloir de ce que la décision contestée portant refus de titre de séjour aurait été prise en méconnaissance de ces dispositions ;
9. Considérant que si Mme A..., entrée en France le 6 mai 2014 sous couvert d'un visa de court séjour, soutient que, son époux étant décédé, elle souhaite vivre auprès de ses quatre filles et de ses petits-enfants qui résident en France, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressée n'est pas dépourvue de toute attache familiale au Cameroun, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 58 ans et où résident trois autres de ses enfants ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment des conditions et de la durée du séjour en France de l'intéressée, les décisions contestées portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français n'ont pas porté au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises ; que, dès lors, en prenant ces décisions, le préfet du Finistère n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
10. Considérant que, compte tenu de ce qui précède, Mme A... n'est pas fondée à exciper, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
11. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 7 et 9, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante doit être écarté ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
12. Considérant que les décisions de refus de séjour et d'obligation de quitter le territoire français n'étant pas illégales, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi serait dépourvue de base légale ne peut qu'être écarté ;
Sur la légalité de la décision déterminant un délai de départ volontaire :
13. Considérant que, contrairement à ce que soutient Mme A..., les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur lesquelles s'est fondé le préfet du Finistère pour fixer à trente jours le délai de départ volontaire contesté, en ce qu'elle prévoient que l'autorité administrative peut prolonger, le cas échéant, le délai de départ volontaire d'une durée appropriée pour faire bénéficier les étrangers dont la situation particulière le nécessiterait, ne sont pas incompatibles avec les objectifs poursuivis par le paragraphe 2 de l'article 7 de la directive du 16 décembre 2008, qu'elles ont pour objet de transposer ;
14. Considérant qu'en l'espèce il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A... aurait demandé au préfet du Finistère de bénéficier d'une prolongation du délai accordé pour exécuter volontairement l'obligation de quitter le territoire français ; que, par ailleurs, l'intéressée ne justifie d'aucun élément précis de nature à regarder le délai de trente jours prévu par la décision contestée comme n'étant pas approprié à sa situation personnelle ; que Mme A... n'est, par suite, pas fondée à soutenir que la décision du préfet du Finistère lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours serait entachée d'un défaut d'examen ou d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Sur l'obligation de remise du passeport et l'obligation de présentation aux autorités de police :
15. Considérant que, contrairement à ce que soutient Mme A..., les dispositions des articles L. 513-4 et R. 513-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur le fondement desquelles il lui a été enjoint de remettre son passeport et de se présenter une fois par semaine aux autorités de police, ne sont pas incompatibles avec celles de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 qu'elles ont eu pour objet de transposer ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée serait dépourvue de base légale doit être écarté ;
16. Considérant que si Mme A... soutient que l'obligation de remettre son passeport et de se présenter une fois par semaine auprès des services de police à laquelle le préfet du Finistère l'a astreinte est excessive dès lors qu'elle n'a pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement, qu'elle ne présente pas de risques de fuite avérés et qu'elle connaît des difficultés de santé, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que les modalités de cette mesure seraient disproportionnées ou entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;
17. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la demande présentée par Mme A... tendant à l'annulation des différentes décisions contestées ne peut qu'être rejetée ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
18. Considérant, d'une part, qu'il relève du seul office du juge d'apprécier l'opportunité de demander aux parties de produire des pièces complémentaires ;
19. Considérant, d'autre part, que le présent arrêt, qui rejette la demande de Mme A..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que par suite, les conclusions de l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au préfet du Finistère de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation, doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
20. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par Mme A... et non compris dans les dépens ;
D E C I D E
Article 1er : Le jugement n° 1501460 du 26 juin 2015 du tribunal administratif de Rennes est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Rennes ainsi que le surplus des conclusions présentées par elle devant la cour sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...F...A..., née E...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Finistère.
Délibéré après l'audience du 9 juin 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- M. Lemoine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 juin 2016.
Le rapporteur,
O. Coiffet
Le président,
I. Perrot
Le greffier,
M. D...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT034643