Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 29 février 2016, M.D..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 5 janvier 2016 ;
2°) d'annuler la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 12 février 2015 ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer le visa sollicité ou, à défaut, d'examiner à nouveau sa demande de visa, dans un délai de sept jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il n'est pas établi que son mariage présenterait un caractère frauduleux ;
- cette décision est également contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'elle conduit à séparer un couple marié.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 mars 2016, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. D...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Massiou a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.D..., ressortissant tunisien né en 1983 entré irrégulièrement en France en 2003, a épousé MmeB..., ressortissante française née en 1995, le 14 février 2014 ; qu'il a ensuite sollicité la délivrance d'un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française, qui lui a été refusé par une décision des autorités consulaires françaises à Tunis du 5 novembre 2014, confirmée le 12 février 2015 par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ; que M. D...relève appel du jugement du 5 janvier 2016 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette dernière décision ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors en vigueur : " (...) le visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public (...) " ; qu'il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français dont le mariage n'a pas été contesté par l'autorité judiciaire le visa nécessaire pour que les époux puissent mener une vie familiale normale ; que pour y faire obstacle, il appartient à l'administration, si elle allègue une fraude, d'établir, sur la base d'éléments précis et concordants, que le mariage a été entaché d'une telle fraude, de nature à justifier légalement le refus de visa ;
3. Considérant que pour refuser de délivrer le visa sollicité, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a estimé que le mariage de M. D...et Mme B...avait été contracté à des fins étrangères à l'union matrimoniale, en se fondant sur l'absence de preuves suffisamment probantes du maintien d'échanges entre les époux, le fait qu'il n'était pas établi que le couple ait un projet de vie commune, celui que M. D...ne participe pas aux charges du mariage et la circonstance que ce dernier a antérieurement tenté d'obtenir frauduleusement une carte d'identité française en produisant un faux acte de naissance ; que si l'intéressé soutient qu'il connaissait Mme B...depuis plus de quatre ans lorsqu'ils se sont mariés, il ne produit aucun élément attestant de cette relation pour la période antérieure à ce mariage, ni relatif au mariage lui-même, si ce n'est l'acte de mariage ; que s'il ressort des pièces du dossier que le couple a ensuite vécu chez la mère de Mme B...pendant quelques mois et que cette dernière s'est rendue à trois reprises en Tunisie en 2014, sans qu'il soit établi qu'elle ait rencontré son époux à cette occasion, ces seuls éléments ne sont pas de nature à démontrer la réalité de leur intention matrimoniale ; que le requérant ne conteste pas, par ailleurs, avoir tenté d'obtenir frauduleusement une carte d'identité française en 2009 par la production de plusieurs faux documents dont un faux acte de naissance ; qu'il n'est pas établi ni même allégué que l'épouse de M.D..., qui n'exerce pas d'activité professionnelle, ne pourrait pas aller vivre en Tunisie auprès de son époux ; qu'enfin les pièces relatives au domicile qu'occupent les époux depuis le mois de juillet 2015 sont postérieures à la décision attaquée et, dès lors, insusceptibles d'exercer une influence sur sa légalité ; qu'il n'est pas établi, dans ces conditions, qu'en refusant le visa sollicité, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France aurait commis une erreur d'appréciation ou méconnu le droit au respect de la vie privée et familiale de M. D...garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M.D..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions de la requête à fin d'injonction doivent, dès lors, également être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. D...sollicite le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 17 mars 2017, où siégeaient :
- M. Francfort, président,
- M. Mony, premier conseiller,
- Mme Massiou, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 avril 2017.
Le rapporteur,
B. MASSIOULe président,
J. FRANCFORT
Le greffier,
F. PERSEHAYE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16NT00707