Par un jugement nos 2104784, 2106060 du 29 novembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. E... A... et M. H... A... F..., la décision du 18 mars 2021 du ministre de l'intérieur et a prononcé une astreinte de 100 euros par jour de retard contre l'Etat aux fins d'assurer l'exécution du jugement du 20 octobre 2020.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée le 6 décembre 2021, sous le n° 21NT03404, le ministre de l'intérieur demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 29 novembre 2021 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) de rejeter les demandes présentées par M. E... A... et M. H... A... F... devant le tribunal administratif.
Le ministre de l'intérieur soutient que la personne qui s'est présentée pour se voir délivrer un visa en exécution du jugement du 20 octobre 2020 du tribunal administratif de Nantes n'était pas M. H... A... F... et a tenté d'usurper son identité.
Par un mémoire en défense enregistré le 9 décembre 2021, M. E... A... et M. H... A... F..., représentés par Me Pronost, concluent au rejet de la requête et à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer un visa d'entrée et de long séjour à M. H... A... F... dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils soutiennent que les moyens soulevés par le ministre de l'intérieur ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 décembre 2021.
II. Par une requête enregistrée le 6 décembre 2021, sous le n° 21NT03405, le ministre de l'intérieur demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement du 29 novembre 2021 du tribunal administratif de Nantes, en application des dispositions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative.
Le ministre de l'intérieur soutient que la personne qui s'est présentée pour se voir délivrer un visa en exécution du jugement du 20 octobre 2020 n'était pas M. H... A... F... et que ce moyen est sérieux et de nature à justifier la réformation du jugement attaqué et le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement.
Par un mémoire en défense enregistré le 9 décembre 2021, M. E... A... et M. H... A... F..., représentés par Me Pronost, concluent au rejet de la demande de sursis à exécution et à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer un visa à M. H... A... F... dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils soutiennent que les moyens soulevés par le ministre de l'intérieur ne sont pas fondés.
M. E... A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 décembre 2021.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Buffet, présidente,
- et les observations de Me Pronost, pour M. E... A... et M. H... A... F....
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 20 octobre 2020, le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. E... A..., la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les refus de visas d'entrée en France a refusé de délivrer à Mme G... B..., à M. H... A... F... et à Mme D... A... C... des visas d'entrée et de long séjour au titre en qualité de membre de famille de réfugié et a enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer les visas sollicités dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement. Si le ministre, a délivré, le 21 avril 2021, à Mme G... B... et à Mme D... A... C... des visas d'entrée et de long séjour, il a refusé, par une décision du 18 mars 2021, d'accorder M. H... A... F... le visa qu'il avait sollicité. Par un jugement du 29 novembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 18 mars 2021 du ministre de l'intérieur et a prononcé contre l'Etat une astreinte de 100 euros par jour de retard si le ministre ne justifiait pas avoir pleinement exécuté le jugement du 20 octobre 2020 dans un délai de deux semaines à compter de la notification de ce jugement. Par la requête n° 21NT03404, le ministre de l'intérieur relève appel de ce jugement. Par la requête n° 21NT03405, il demande à la cour de prononcer le sursis à exécution de ce même jugement.
2. Les requêtes nos 21NT03404 et 21NT03405 présentées par le ministre de l'intérieur sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur la requête n° 21NT03404 :
3. Il ressort des pièces du dossier que le ministre de l'intérieur a refusé de délivrer à M. H... A... F... un visa de long séjour au motif que la personne qui s'était présentée, le 15 février 2021, aux services consulaires en vue de la délivrance de visa ordonnée par le jugement du 20 octobre 2020, n'était pas celle qui s'était présentée le 16 novembre 2018, lors de la demande initiale de visa, et qu'elle tentait d'usurper l'identité de M. H... A... F....
4. Le ministre produit des photographies de l'intéressé prises, respectivement, les 16 novembre 2018 et 15 février 2021. Il soutient que " des éléments précis et objectifs, à savoir la forme générale du visage, celle des sourcils, de la bouche ou encore du nez diffèrent, de manière flagrante " et que " la première photographie montre un début de calvitie qu'on ne retrouve pas sur la photographie prise en 2021 ". Toutefois, ces deux photographies montrent la même personne dont le début de calvitie allégué n'est d'ailleurs pas établi. Au surplus, contrairement à ce que soutient le ministre, les réponses données par M. H... A... F... lors de l'entretien qui s'est tenu le 15 février 2021 comportent seulement des imprécisions et non des lacunes avérées ou des contradictions avec les réponses données par sa mère. Dès lors, les pièces versées au dossier n'établissent pas que la personne qui s'est présentée, le 15 février 2021, au consulat n'était pas H... A... F....
5. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 18 mars 2021 refusant la délivrance d'un visa à M. H... A... F... et a prononcé une astreinte de 100 euros par jour de retard s'il ne justifiait pas avoir pleinement exécuté le jugement dans le délai de deux semaines à compter de sa notification.
Sur les conclusions à fin d'injonction présentées en appel par M. E... A... et M. H... A... F... :
6. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte ".
7. Le présent arrêt n'implique pas le prononcé d'une injonction autre que celle déjà prononcée par le jugement du 20 octobre 2020 du tribunal administratif de Nantes. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de modifier le délai d'exécution et le montant de l'astreinte prononcés par le jugement attaqué.
Sur la requête n° 21NT03405 :
8. La cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête du ministre de l'intérieur tendant à l'annulation du jugement attaqué, les conclusions de sa requête n° 21NT03405 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont devenues sans objet. Par suite, il n'y a pas lieu d'y statuer.
Sur les frais liés au litige :
9. M. E... A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Pronost de la somme globale de 1 200 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête n° 21NT03404 du ministre de l'intérieur est rejetée.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 21NT03405 du ministre de l'intérieur.
Article 3 : L'Etat versera à Me Pronost une somme de 1 200 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : Le surplus des conclusions d'appel présentées par M. E... A... et M. H... A... F... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. E... A... et à M. H... A... F....
Délibéré après l'audience du 21 février 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Buffet, présidente de la formation de jugement,
- M. Frank, premier conseiller,
- Mme Ody, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 mars 2022.
La présidente rapporteure,
C. BUFFETL'assesseur le plus ancien,
A. FRANK
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT03404, 21 NT03405