Par une requête et un mémoire, enregistrés le 8 février et le 13 juillet 2018, M.C..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 5 décembre 2017 ;
2°) d'annuler la décision du 4 mai 2015 par laquelle le président de la CCIR Centre-Val de Loire a prononcé son licenciement pour suppression de poste ;
3°) d'enjoindre à la CCIR Centre-Val de Loire de lui verser la somme de 112 889 euros à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de la CCIR Centre-Val de Loire la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a relevé l'irrecevabilité pour tardiveté de ses conclusions à fin d'annulation, dans la mesure où la décision attaquée étant datée du 4 mai 2015, une application immédiate de la jurisprudence " Czabaj " du 13 juillet 2016 porterait, en l'espèce, une atteinte à son droit au recours, celui-ci étant rétroactivement prescrit ;
- le principe de sécurité juridique invoqué par le Conseil d'Etat, aux termes de sa jurisprudence, commande que la règle nouvellement édictée ne soit appliquée qu'aux décisions administratives individuelles notifiées postérieurement au 13 juillet 2016 ;
- il justifie de circonstances particulières permettant de déroger à la règle du délai raisonnable d'un an pour contester la décision administrative individuelle en cause ;
- c'est à tort que le tribunal a relevé l'irrecevabilité de ses conclusions indemnitaires faute de réclamation préalable, cette omission a été régularisée par le mémoire en défense de la chambre de commerce et de l'industrie du 28 mars 2017 ;
Par des mémoires en défense, enregistrés le 23 avril et le 9 juillet 2018, la CCIR Centre-Val de Loire, représentée par la SELARL Avocat Loire Conseil, conclut au rejet de la requête et à la condamnation du requérant à lui verser une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 ;
- l'arrêté interministériel du 25 juillet 1997 relatif au statut du personnel de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie et des groupements inter-consulaires ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pons,
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. C...a été recruté par contrat à durée indéterminée du 14 avril 2005 par la chambre de commerce et d'industrie du Cher, à laquelle a succédé la CCIR Centre-Val de Loire, pour exercer les fonctions de directeur de l'Ecole Supérieure des Techniques Appliquées a la Communication (ESTACOM). Il a été affecté au service développement commercial de la CCIR Centre-Val de Loire à compter du 1er mars 2011. Par délibération du 15 janvier 2015, la CCIR Centre-Val de Loire a décidé de supprimer deux postes au sein de ses effectifs, dont celui occupé par le requérant. La commission administrative paritaire régionale a été informée de cette suppression de poste lors de sa séance du 26 février 2015. M. C...a été convié à un entretien qui s'est déroulé le 25 mars 2015 et la commission administrative paritaire régionale a émis, le 23 avril 2015, un avis partagé s'agissant du licenciement de l'intéressé. Par une décision du 4 mai 2015, le président de la CCIR Centre-Val de Loire a prononcé le licenciement de M. C...pour suppression de poste. Par sa présente requête, M. C...relève appel du jugement du tribunal administratif d'Orléans du 5 décembre 2017 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 mai 2015.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. ". Aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. ". Il résulte de ces dispositions que cette notification doit, s'agissant des voies de recours, mentionner, le cas échéant, l'existence d'un recours administratif préalable obligatoire ainsi que l'autorité devant laquelle il doit être porté ou, dans l'hypothèse d'un recours contentieux direct, indiquer si celui-ci doit être formé auprès de la juridiction administrative de droit commun ou devant une juridiction spécialisée et, dans ce dernier cas, préciser laquelle. Lorsque la notification ne comporte pas les mentions requises, ce délai n'est pas opposable.
3. Toutefois, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance.
4. La règle énoncée ci-dessus, qui a pour seul objet de borner dans le temps les conséquences de la sanction attachée au défaut de mention des voies et délais de recours, ne porte pas atteinte à la substance du droit au recours, mais tend seulement à éviter que son exercice, au-delà d'un délai raisonnable, ne mette en péril la stabilité des situations juridiques et la bonne administration de la justice, en exposant les défendeurs potentiels à des recours excessivement tardifs. Il appartient dès lors au juge administratif d'en faire application au litige dont il est saisi, quelle que soit la date des faits qui lui ont donné naissance.
5. Il est constant que la décision de licenciement en litige du 4 mai 2015 ne comportait pas l'indication des voies et délais de recours. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que cette décision a été notifiée au requérant le 9 mai 2015 et ses conclusions en annulation dirigées contre cette décision ont été enregistrées au greffe du tribunal d'Orléans le 2 août 2016, soit au-delà du délai d'un an sus-évoqué. Il résulte du principe rappelé au point 4 du présent arrêt qu'une application immédiate de la jurisprudence du Conseil d'Etat du 13 juillet 2016 ne saurait porter atteinte à la substance du droit au recours, et le principe de sécurité juridique n'implique nullement que la règle nouvellement édictée ne soit appliquée qu'aux décisions administratives individuelles notifiées postérieurement au 13 juillet 2016. La circonstance, au demeurant non établie, que pendant la durée de son préavis et postérieurement à la fin des relations de travail, M. C... ait pu bénéficier de l'aide de la CCIR Centre-Val de Loire dans le cadre d'une recherche de poste au sein du réseau des chambres de commerce ou qu'il serait demeuré dans un lien de subordination avec son employeur, ne saurait être regardée comme une circonstance particulière permettant de déroger à la règle sus-évoquée. Dans ces conditions, les conclusions en annulation de la décision attaquée, enregistrées au greffe du tribunal d'Orléans le 2 août 2016, soit au-delà du délai raisonnable d'un an suivant la notification de ladite décision, sont tardives et par suite irrecevables.
Sur les conclusions à fin d'indemnisation :
6. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable à la date à laquelle M. C...a saisi d'une requête le tribunal administratif: " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par la voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée (...) ".
7. Il n'est pas contesté que préalablement à la présentation de ses conclusions indemnitaires tendant au versement en dernier lieu d'une somme de 112 889 euros, M. C...n'a pas adressé à la CCIR Centre-Val de Loire de demande tendant au versement des sommes qu'il a réclamées devant le tribunal. Le requérant ne justifie pas davantage avoir formé, postérieurement à l'enregistrement de ces conclusions et avant la clôture de l'instruction, une telle demande qui aurait fait naître une décision avant que le tribunal ne statue par le jugement contesté. Cette omission n'a pas été régularisée par le mémoire en défense de la chambre de commerce et de l'industrie du 28 mars 2017, la CCIR Centre-Val de Loire s'étant bornée à défendre sur les conclusions en annulation formées par le requérant dirigées contre la décision de licenciement, alors que les prétentions indemnitaires de M. C... avaient pour fondement une faute alléguée de la CCIR Centre-Val de Loire dans les conditions de son licenciement.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation et d'indemnisation présentées par M. C..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par le requérant ne peuvent être accueillies.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la CCIR Centre-Val de Loire, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par M. C...au titre des frais liés au litige. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C...la somme réclamée par la CCIR Centre-Val de Loire au titre des mêmes frais.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la CCIR Centre-Val de Loire sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et à la chambre de commerce et d'industrie du Centre-Val de Loire.
Délibéré après l'audience du 15 mars 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président assesseur,
- M. Pons, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 avril 2019.
Le rapporteur,
F. PONS Le président,
H. LENOIR
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT00544