Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 février et le 11 juillet 2018, M.A..., représenté par Me Lerat, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 19 décembre 2017 ;
2°) de condamner solidairement La Poste et l'Etat à lui verser la somme de 49 385,11 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral, des troubles dans les conditions d'existence et du préjudice financier qu'il a subis du fait de la minoration de sa pension de retraite, cette somme devant être majorée des intérêts au taux légal à compter de la réception de ses demandes préalables, soit à compter du 8 juillet 2014 ;
3°) de mettre à la charge solidaire de La Poste et de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête est recevable et sa demande ne se heurte pas à la prescription en matière civile ;
- le jugement attaqué est irrégulier, en ce qu'il est insuffisamment motivé ;
- l'Etat et La Poste, en s'abstenant d'organiser des voies de promotion interne pour les corps de reclassement, ont commis des fautes de nature à engager leur responsabilité à son égard ;
- l'autorité de chose jugée ne peut lui être opposée, dès lors que sa demande porte sur la réparation d'un préjudice qui n'a pas été indemnisé par les juridictions administratives, en l'occurrence le préjudice résultant de la minoration de sa pension de retraite ;
- la cour administrative d'appel de Nantes, dans son arrêt du 22 décembre 2011 par lequel elle a condamné La Poste et l'Etat à lui verser une indemnité de 25 000 euros, dont 5 000 euros au titre de son préjudice moral, évalue un préjudice qui a été subi et ne mentionne nullement le préjudice de retraite ;
- le préjudice global lié à la minoration de se pension de retraite s'élève à 39 385,11 euros auquel s'ajoutent un préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence résultant de cette minoration de pension pouvant être évalué à la somme de 10 000 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mai 2018, le ministre de l'économie, représenté par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 200 euros soit mise à la charge de M. A...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient, à titre principal, que la requête de M. A...est irrecevable et, à titre subsidiaire, que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 5 juillet et le 12 juillet 2018, La Poste, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient, à titre principal, qu'elle est fondée à opposer aux conclusions indemnitaires du requérant l'exception de chose jugée et, à titre subsidiaire, que la requête est irrecevable et que le préjudice est prescrit.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pons,
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,
- les observations de Me Lerat, avocate de M. A...et de MeB..., substituant Me E...représentant La Poste.
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., fonctionnaire de La Poste titularisé le 5 avril 1973 dans le grade de préposé, promu le 6 décembre 1977 dans le grade d'agent d'exploitation distribution et acheminement, puis dans le grade d'agent d'administration principale distribution acheminement le 1er janvier 1992, a refusé, lors du changement de statut de son employeur, d'intégrer les corps dits de " reclassification " et a opté en faveur de la conservation de son grade régi par les décrets du 25 mars 1993. Par courriers du 7 juillet 2014, il a demandé à La Poste et à l'Etat le versement d'une somme de 49 385,11 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral, des troubles dans les conditions d'existence et du préjudice financier qu'il aurait subi du fait de la minoration de sa pension de retraite. Ses demandes ont été rejetées par décisions implicites. Par sa présente requête, M. A...relève appel du jugement du tribunal administratif de Nantes du 19 décembre 2017 ayant rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de La Poste et de l'Etat à lui verser la somme de 49 385,11 euros précitée.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête ;
2. Il résulte de l'instruction que la demande présentée par M. A...tendant au versement de la somme globale de 49 385,11 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral, des troubles dans les conditions d'existence et du préjudice financier qu'il aurait subi du fait de la minoration de sa pension de retraite est en lien direct avec celle relative au blocage de sa carrière. L'arrêt du 22 décembre 2011 de la présente cour, passé en force de chose jugée, a déjà condamné La Poste et l'Etat à indemniser M. A...des préjudices subis du fait du blocage de sa carrière en raison de l'absence fautive de toute promotion interne avant le 14 décembre 2009 dans le cadre des corps dits de " reclassement ". Contrairement à ce qui est allégué, la circonstance que l'arrêt du 22 décembre 2011 fasse référence au préjudice qui " a été subi " par le requérant ne saurait induire que cette dernière n'a pas pris en compte le préjudice lié à la minoration de la pension de retraite de M.A..., l'intéressé ayant lui-même, dans ses écritures produites au cours cette première instance, présenté la minoration de sa pension de retraite comme l'un des éléments constitutifs de son préjudice matériel. Si M. A...invoque la perte de chance d'une meilleure retraite, il ne résulte pas de l'instruction que La Poste aurait commis des agissements fautifs distincts de cette faute déjà indemnisée au titre de la perte de chance. Ainsi, la demande présentée par M. A...porte sur le même préjudice que celui pour lequel il a déjà été indemnisé. Elle ne constitue pas, par suite, une aggravation de ce préjudice qui serait apparue postérieurement à l'arrêt cité. Dans ces conditions, La Poste est fondée à opposer l'exception de la chose jugée par la cour à la demande de M. A....
3. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
4. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge solidaire de l'Etat et La Poste, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme réclamée par M. A...au titre des frais liés au litige. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A...les sommes réclamées par le ministre de l'économie et par La Poste au titre des mêmes frais.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du ministre de l'économie et de La Poste sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A..., au ministre de l'économie et des finances et à La Poste.
Délibéré après l'audience du 15 mars 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président assesseur,
- M. Pons, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 avril 2019.
Le rapporteur,
F. PONSLe président,
H. LENOIR
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT00710