Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 19 janvier 2017, la SELARL Notaires et Conseils, représentée par la SELARL Cornet-Vincent-Ségurel, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 22 novembre 2016 ;
2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif de Nantes par MmeD... ;
3°) de condamner Mme D...à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- à titre principal, la procédure prévue à l'article L. 1232-3 du code du travail n'a pas été méconnue dès lors que, d'une part, Mme D...n'a jamais indiqué au cours de l'enquête contradictoire qu'elle ignorait les griefs retenus pour son licenciement et que, d'autre part, le compte-rendu d'entretien produit par celle-ci n'a pas été signé ni communiqué à quiconque dans le cadre de cette enquête ; à titre subsidiaire, la méconnaissance de l'article L. 1232-3 du code du travail est sans incidence sur la légalité de la décision de l'inspectrice du travail dès lors qu'elle n'a pas exercé d'influence sur le sens de cette décision ni privé Mme D...d'une garantie ;
- Mme D...a commis une faute suffisamment grave pour que l'autorité administrative puisse accorder la décision d'autorisation de licenciement sans méconnaitre les dispositions de l'article L. 1226-9 du code du travail ;
- Mme D...ne pouvait se prévaloir de la prescription des faits qui lui étaient reprochés dès lors qu'ils procédaient du même comportement fautif que les griefs invoqués dans la lettre de licenciement ;
- la matérialité des faits reprochés à Mme D...est établie ;
- le licenciement de Mme D...n'est pas une sanction disproportionnée au regard des fautes qui lui sont reprochées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 juin 2017, Mme C...D..., représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête, à ce que soit mis à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi qu'à la condamnation de la SELARL Notaires et Conseils au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de ces mêmes dispositions.
Elle soutient que les moyens soulevés par la SELARL Notaires et Conseils ne sont pas fondés.
Un mémoire présenté pour MmeD..., enregistré le 8 mars 2018, n'a pas été communiqué à défaut d'éléments nouveaux au sens de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.
Le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a été mis en demeure de présenter ses observations par courrier du 18 mai 2017, resté sans réponse.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Francfort,
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,
- les observations de MeB..., représentant la SELARL Notaires et Conseils, et celles de MeA..., représentant MmeD....
1. Considérant que, le 1er décembre 2014, Mme D...a été recrutée en contrat à durée indéterminée par la SELARL Notaires et Conseils pour exercer les fonctions de notaire assistant ; qu'elle a été élue déléguée du personnel suppléante le 13 septembre 2013 ; que par décision du 16 mars 2015, l'inspectrice du travail de la quarante-deuxième section de l'unité territoriale de la Loire-Atlantique a autorisé le licenciement pour motif disciplinaire de l'intéressée ; que la SELARL Notaires et Conseils relève appel du jugement du 2 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé l'autorisation du 16 mars 2015 ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1232-2 du code du travail : " L'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1232-3 du même code : " Au cours de l'entretien, l'employeur indique les motifs de la décision envisagée et recueille les explications du salarié " ;
3. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme D...a été reçue par son employeur le 15 février 2015 pour un entretien préalable à une procédure de licenciement ; qu'il résulte du compte-rendu de cet entretien rédigé par la conseillère assistant Mme D...lors de l'entretien préalable, dont la teneur n'est pas sérieusement contestée, qu'aucun des motifs du licenciement envisagé n'a été indiqué à Mme D...par son employeur, lequel n'a pas davantage recueilli les explications de la salariée ; que si la SELARL Notaires et Conseils fait valoir que Mme D...avait précédemment été convoquée, le 4 décembre 2014, en vue d'un entretien préalable à une procédure de licenciement pour faute, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme D...aurait été informée à cette occasion des motifs du licenciement envisagé ; qu'en tout état de cause, eu égard à la procédure de licenciement pour motif économique engagée entre-temps le 23 décembre 2014, l'autorisation litigieuse doit être regardée comme demandée pour un motif nouveau et ne pouvait dès lors être valablement accordée en l'absence d'indication de ces motifs à Mme D...lors de l'entretien préalable du 15 février 2015 ;
4. Considérant, d'autre part, que l'entretien prévu par les dispositions de l'article L. 1232-3 du code du travail est le lieu d'un échange contradictoire entre l'employeur et le salarié, en vue le cas échéant de trouver une alternative au licenciement envisagé ; que la décision par laquelle l'autorité administrative autorise le licenciement d'un salarié protégé ne peut être fondée que sur les motifs indiqués, lors de l'entretien préalable, par l'employeur au salarié ; que dès lors, en raison de l'irrégularité de la procédure préalable au licenciement, tenant à ce que l'employeur de Mme D...n'a ni indiqué à cette dernière les motifs de la décision envisagée, ni recueilli ses observations sur la mesure en cause, l'inspecteur du travail ne pouvait légalement autoriser le licenciement de MmeD... ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SELARL Notaires et Conseil n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 16 mars 2015 par laquelle l'inspectrice du travail de la quarante-deuxième section de l'unité territoriale de la Loire-Atlantique a autorisé le licenciement de MmeD... ;
Sur les frais de la procédure :
6. Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de MmeD..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la SELARL Notaires et Conseils au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
7. Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la SELARL Notaires et Conseils à verser à Mme D...la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ; que, toutefois, les conclusions de Mme D...tendant sur le fondement de ces mêmes dispositions à la condamnation de l'Etat, qui n'est pas partie à la présente instance, ne peuvent qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de SELARL Notaires et Conseils est rejetée.
Article 2 : La SELARL Notaires et Conseils versera à Mme D...une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par MmeD... à l'encontre de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SELARL Notaires et Conseils, à Mme C...D...et à la ministre du travail.
Délibéré après l'audience du 13avril 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Francfort, président de chambre,
- M. Durup de Baleine, premier conseiller,
- M. Bouchardon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 mai 2018.
Le président-rapporteur,
J. FRANCFORTL'assesseur le plus ancien,
A. DURUP DE BALEINE
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne à la ministre du travail en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT00236