- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Coiffet, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant malien, né le 1er janvier 1992, entré irrégulièrement en France le 26 septembre 2018, a présenté le 16 octobre 2018 auprès du préfet de l'Essonne une demande d'admission provisoire au séjour en vue de demander l'asile. Une attestation de demande d'asile relevant de la " procédure Dublin " lui a été délivrée le 16 octobre 2018. La consultation du fichier Eurodac a permis de constater que ses empreintes digitales avaient été relevées en Italie le 31 août 2015. Les autorités italiennes, saisies le 29 novembre 2018 d'une demande de reprise en charge de M. A..., sur le fondement des dispositions de l'article 20.5 du règlement n° 604/2013 visé ci-dessus, ont accepté cette reprise par un accord implicite du 17 décembre 2018. La préfète du Cher a alors décidé, par deux arrêtés du 21 décembre 2018, notifiés le 14 janvier 2019, d'une part, la remise de M. A... aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile et, d'autre part, de l'assigner à résidence pour une durée de quarante-cinq jours renouvelable deux fois.
2. M. A... relève appel du jugement du 22 janvier 2019 par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation des deux arrêtés du 21 décembre 2018.
Sur les conclusions tendant à obtenir l'aide juridictionnelle provisoire :
3. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 22 février 2019. Par suite, les conclusions du requérant tendant à obtenir l'aide juridictionnelle à titre provisoire sont sans objet. Il n'y a pas lieu de statuer sur ces conclusions.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
4. En premier lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : / a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; / b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; / c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; / d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert; (...) / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. (... ) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que, le 16 octobre 2018, les services de la préfecture de l'Essonne ont remis au requérant le guide du demandeur d'asile non seulement en langue bambara mais également en langue française, langue que le requérant a déclaré comprendre, ce que confirment d'ailleurs expressément ses écritures d'appel, ainsi que la brochure intitulée " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de ma demande ' " et le guide d'information " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' " qui précise notamment les modalités de détermination de l'Etat responsable de la demande d'asile de l'étranger. Par suite, le moyen tiré de ce qu'il n'a pas été complètement et clairement informé de ses droits, en méconnaissance de l'article 4 précité du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé sera écarté.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. (...) / 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les Etats membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. (...) / 5. L'entretien a lieu dans les conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. (...) " / 6. L'Etat membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'Etat membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile du résumé (...) ".
7. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a bénéficié d'un entretien individuel le 16 octobre 2018 qui a fait l'objet d'un compte-rendu écrit. Le compte-rendu, signé par l'intéressé, mentionne notamment, en page 2/2, que celui-ci certifie sur l'honneur que " le guide du demandeur d'asile et l'information sur les règlements communautaires [lui] ont été remis ". Par suite, le moyen tiré de l'absence d'entretien individuel qui manque en fait doit ainsi être écarté.
8. En troisième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. ". En outre, le transfert d'un demandeur d'asile vers un Etat membre responsable au sens du règlement " Dublin III " ne peut être autorisé, lorsque cet Etat n'est pas en mesure, en raison des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil, de prendre en charge le demandeur d'asile sans lui faire courir le risque réel d'être soumis à des traitements inhumains ou dégradants. Il appartient au juge administratif de rechercher si, à la date d'édiction de la décision litigieuse et eu égard aux éléments produits devant lui et se rapportant à la procédure d'asile appliquée dans l'Etat membre initialement désigné comme responsable au sens de ces dispositions, il existait des motifs sérieux et avérés de croire qu'en cas de remise aux autorités de ce même Etat membre du demandeur d'asile, ce dernier n'aurait pu bénéficier d'un examen effectif de sa demande d'asile, notamment en raison d'un refus opposé à tout enregistrement des demandes d'asile ou d'une incapacité structurelle à mettre en oeuvre les règles afférentes à la procédure d'asile, ou si la situation générale du dispositif d'accueil des demandeurs d'asile dans ce même Etat était telle qu'un renvoi à destination de ce pays aurait exposé l'intéressé, de ce seul fait, à un risque de traitement prohibé par les dispositions et stipulations précitées.
9. M. A... qui invoque le bénéfice des dispositions du paragraphe 1 de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 rappelées au point précédent fait état, à l'encontre de la décision du 21 décembre 2018 par laquelle la préfète du Cher a ordonné son transfert aux autorités italiennes, de la situation exceptionnelle dans laquelle se trouve l'Italie, confrontée à un afflux sans précédent de réfugiés, dont le gouvernement a adopté le 24 septembre 2018 un décret-loi restreignant davantage encore l'accueil des migrants et qui l'exposerait à un risque de violation des dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En se bornant à faire état de considérations non circonstanciées datant de l'automne 2018, M. A... n'établit pas que les défaillances systémiques de la procédure d'asile en Italie qu'il invoque de manière générale, exposeraient sa demande d'asile à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Il ne démontre pas davantage qu'il serait personnellement exposé à des risques de traitements inhumains ou dégradants en Italie alors que ce pays est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, le moyen tiré de ce qu'en ne dérogeant pas aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile, l'arrêté contesté aurait été pris en méconnaissance de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, ne peut qu'être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation qui aurait été commise à cet égard sera également écarté.
10. En quatrième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " I.- L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : / 1° Doit être remis aux autorités compétentes d'un Etat membre de l'Union européenne en application des articles L. 531-1 ou L. 531-2 ou fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 (...) ". L'article L. 742-5 du même code énonce que : " Les articles L. 551-1 et L. 561-2 sont applicables à l'étranger faisant l'objet d'une décision de transfert dès la notification de cette décision (...) ". Il résulte de ce qui précède que l'illégalité de la décision de transfert de M. A... vers l'Italie n'est pas établie. Le moyen tiré de ce que la décision d'assignation à résidence prise à son encontre serait dépourvue de base légale ne peut qu'être écarté.
11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Par voie de conséquence doivent être rejetées les conclusions du requérant aux fins d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. A... tendant à obtenir l'aide juridictionnelle à titre provisoire.
Article 2 : La requête de M. A... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera transmise pour information à la préfète du Cher.
Délibéré après l'audience du 15 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Coiffet, président-rapporteur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 décembre 2019.
Le rapporteur
O. COIFFETLe président
H. LENOIR
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT00733 2
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