M. et Mme B...ont relevé appel de ces jugements devant la Cour administrative d'appel de Paris. Par deux arrêts n° 13PA04784 du 28 mai 2015 et 15PA01895 du 25 juin 2015, la Cour administrative d'appel de Paris a rejeté les appels formés par M. et MmeB....
Par une décision n° 392063, 392065 du 25 janvier 2017, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé les arrêts de la Cour administrative d'appel de Paris des 28 mai et
25 juin 2015 et renvoyé l'affaire à ladite Cour.
Procédure devant la Cour :
I) Par une requête n° 17PA00378 et des mémoires enregistrés les 24 décembre 2013,
19 août 2014 et 11 février 2015, M. et MmeB..., représentés par MeC..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1222321/2-2 du 28 octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la réduction des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010 et des contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2009 ;
2°) de prononcer la restitution des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010 assorties des intérêts moratoires ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 7 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- ils ont suffisamment justifié l'existence et la nature de la cession de parts intervenue le 16 décembre 2009 qui doit être regardée comme une vente ;
- la circonstance que le prix de cession des titres en litige soit nul ne fait pas obstacle à l'application des dispositions de l'article 150-0-D du code général des impôts ;
- la moins-value réalisée à l'occasion de cette cession doit être prise en compte pour la détermination du montant des plus ou moins-values nettes imposables, au sens des dispositions de l'article 150-0-A du code général des impôts.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 30 juin et 18 décembre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les conclusions de la requête portant sur les contributions sociales de l'année 2010 sont irrecevables ;
- les moyens soulevés par M. et Mme B...ne sont pas fondés.
II) Par une requête n°17PA00403 enregistrée le 3 avril 2015, M. et MmeB..., représentés par MeC..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1403152/2-2 du 2 février 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de contribution sociale généralisée, de contribution au remboursement de la dette sociale, de prélèvement social et de contributions additionnelles auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 et des pénalités correspondantes ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions et pénalités ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 7 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que :
- ils ont suffisamment justifié l'existence et la nature de la cession de parts intervenue le 16 décembre 2009 qui doit être regardée comme une vente ;
- la circonstance que le prix de cession des titres en litige soit nul ne fait pas obstacle à l'application des dispositions de l'article 150-0-D du code général des impôts ;
- la moins-value réalisée à l'occasion de cette cession doit être prise en compte pour la détermination du montant des plus ou moins-values nettes imposables, au sens des dispositions de l'article 150-0-A du code général des impôts.
(III) Par deux mémoires présentés le 10 mars 2017 et deux mémoires présentés
le 10 avril 2017, postérieurement à la décision susmentionnée du Conseil d'Etat,
M. et Mme B...maintiennent leurs conclusions précédentes par les mêmes moyens ; ils soutiennent en outre que les opérations en litige sont exclusives de toute intention libérale et que la société Whitehall Street Employee Fund 2007 était la bénéficiaire de l'option d'achat.
Par deux mémoires présentés le 10 mars 2017 postérieurement à la décision susmentionnée du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie et des finances maintient ses conclusions précédentes par les mêmes moyens.
Par ordonnance du 10 mars 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 10 avril 2017.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts ;
- le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Magnard, rapporteur,
- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant M. et MmeB....
1. Considérant en premier lieu que M. B...a réalisé, au cours des années 2007 et 2008, un investissement de 455 000 dollars, soit environ 350 000 euros, lui permettant d'acquérir 4 550 parts de la société Whitehall Street Global Repia Fund, laquelle réalisait des investissements immobiliers ; que le 16 décembre 2009, ces parts ont été transférées à la société Whitehall Street Employee Funds 2007 GP ; que M. et Mme B...ont estimé qu'ils avaient réalisé, du fait de cette opération, une moins-value de cession imputable, sur le fondement de l'article 150-0 D du code général des impôts, sur des plus-values de même nature ; que les intéressés, qui n'avaient pas déclaré cette moins-value au titre de l'année 2009, ont demandé, par une réclamation du 5 mars 2012, une réduction des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils avaient été assujettis au titre de l'année 2009 en conséquence de l'imputation de cette moins-value sur les plus-values de même nature réalisées par eux au cours de cette même année, ainsi qu'une réduction des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles ils avaient été assujettis au titre de l'année 2010 à raison du report du solde de la moins-value en cause sur les plus-values réalisées en 2010 ; que l'administration ayant rejeté leur réclamation, ils ont saisi le Tribunal administratif de Paris ; que M. et Mme B...relèvent appel du jugement du 28 octobre 2013 par lequel ce tribunal a rejeté leur demande ;
2. Considérant, en second lieu, que l'administration, après avoir établi les contributions sociales dues par M. et Mme B...au titre de l'année 2010 en tenant compte du report du solde de la moins-value mentionnée au point 1., qui avait entre-temps fait l'objet d'une déclaration rectificative, a remis en cause l'existence de cette moins-value et a assujetti en conséquence les intéressés à un supplément de contributions sociales ; que l'administration ayant rejeté la réclamation qu'ils avaient formée, M. et Mme B...ont demandé la décharge de ce supplément au Tribunal administratif de Paris ; que M. et B...relèvent appel du jugement du 2 février 2015 par lequel ce tribunal a rejeté leur demande ;
3. Considérant que ces requêtes formées par le même contribuable présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; que, dès lors, il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;
Sur la fin de non-recevoir présentée par le ministre :
4. Considérant que les conclusions de M. et Mme B...relatives aux contributions sociales mises à leur charge au titre de l'année 2010 étant recevables dans le cadre de la requête évoquée au point 2., la fin de non-recevoir soulevée par le ministre tendant à ce que ces conclusions soient rejetées pour irrecevabilité dans le cadre de la requête évoquée au point 1. est dans ces conditions dépourvue de portée ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
5. Considérant que M.B..., alors directeur salarié dans le groupe Goldman Sachs, a acquis, les 25 septembre 2007 et 8 décembre 2008, au prix de 455 000 dollars (USD),
soit 351 731 euros, 4 550 actions de la société à responsabilité limitée Whitehall Street Global Repia Fund 2007, société de droit luxembourgeois appartenant au groupe Goldman Sachs, ayant pour objet l'acquisition d'immeubles ou d'avoirs immobiliers ; que, faute pour M. B...d'avoir souscrit à une nouvelle augmentation de capital en décembre 2009, ses parts ont été rachetées le 16 décembre 2009, pour un prix nul, et transférées à la société Whitehall Street Employee Funds 2007 GP, LLC, société de personnes ayant son siège dans l'Etat du Delaware, aux Etats-Unis, et appartenant également au groupe Goldman Sachs ; que M. et Mme B...font valoir qu'ils ont ainsi réalisé en 2009 une cession à titre onéreux de valeurs mobilières et que la moins-value qui a été constatée lors de ladite cession est, en application du 11 de l'article 150-0 D du code général des impôts, imputable sur les plus-values de même nature réalisées par eux en 2009 et en 2010 ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article 150-0 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - 1. (...) les gains nets retirés des cessions à titre onéreux (...) de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres mentionnés au 1° de l'article 118 et aux 6° et 7° de l'article 120, de droits portant sur ces valeurs, droits ou titres ou de titres représentatifs des mêmes valeurs, droits ou titres, sont soumis à l'impôt sur le revenu (...) " ; qu'aux termes de l'article 150-0 D du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " 1. Les gains nets mentionnés au I de l'article 150-0 A sont constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix effectif d'acquisition par celui-ci ou, en cas d'acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation (...) / 11. Les moins-values subies au cours d'une année sont imputables exclusivement sur les plus-values de même nature réalisées au cours de la même année ou des dix années suivantes (...) " ; qu'une opération de cession de valeurs, droits ou titres ne peut être requalifiée en libéralité n'entrant pas dans le champ de ces dispositions, alors même qu'elle interviendrait pour un prix nul ou symbolique ou sans paiement du prix convenu au contrat, en l'absence d'intention libérale du cédant vis-à-vis du cessionnaire ;
7. Considérant que M. et Mme B...soutiennent que ce prix nul résultait de l'application des clauses des statuts de la société Whitehall Street Global Repia Fund ainsi que des prescriptions d'un document intitulé " Private Offering Memorandum ", annexé à ces statuts et auxquels ils renvoyaient, qui prévoyaient que si M. B...ne participait pas aux futures augmentations de capital de la société, ses parts pouvaient d'office être transférées à la société The Goldman Sachs Group, Inc. pour un prix établi selon une formule de calcul fixée par le " Private Offering Memorandum ", laquelle, si elle avait eu pour effet, compte tenu des conséquences de la crise immobilière de 2008, d'aboutir en l'espèce à un prix symbolique ou nul, n'avait pas par elle-même, selon eux, un tel objet ; qu'ils en déduisent que, dans ces conditions, le transfert des parts pour un prix nul ne manifestait aucune intention libérale de M. B... vis-à-vis du cessionnaire et que, dès lors, l'opération ne pouvait être qualifiée de libéralité ;
8. Considérant d'une part qu'il résulte effectivement de l'instruction que le transfert des parts de la société Whitehall Street Global Repia Fund pour un prix nul à une société du groupe Goldman Sachs s'imposait juridiquement à M. B...en conséquence des engagements pris par ce dernier à l'occasion de la souscription des parts en cause ; qu'en effet, contrairement à ce que soutient le ministre, la seule décision de ne pas participer à l'augmentation de capital impliquait le transfert automatique des parts selon la formule de calcul susmentionnée ; qu'il ne résulte pas de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas soutenu ni que la décision de ne pas participer à l'augmentation de capital soit elle-même constitutive d'une libéralité ni même d'ailleurs que M. B...ait agi contrairement à son intérêt en choisissant d'abandonner les parts déjà souscrites plutôt que de participer à ladite augmentation de capital ; qu'il n'est ni établi ni même allégué par le ministre que la formule de calcul susmentionnée n'aurait pas été respectée ; qu'il résulte également de l'examen du mémorandum susmentionné qu'il prévoyait, en cas de non souscription à une augmentation de capital, le transfert des parts de la société Whitehall Street Global Repia Fund à l'une quelconque des sociétés du groupe Goldman Sachs ; que la société Whitehall Street Employee Funds 2007 étant une filiale du groupe Goldman Sachs, le ministre ne saurait valablement soutenir que le transfert en cause ne procédait pas des conditions de souscription desdites parts ; que la seule circonstance que l'augmentation de capital à laquelle M. B...n'a pas souhaité souscrire soit intervenue à la date à laquelle leur a été notifié leur défaut de souscription et le transfert de titres, n'est pas de nature à établir que le transfert des parts en litige ne procédait pas des conditions de l'accord souscrit antérieurement, aux termes duquel M. B...disposait d'un délai de 30 jours pour donner suite à cette augmentation ;
9. Considérant d'autre part que la seule circonstance que la formule de calcul contenue dans le mémorandum susmentionné, laquelle n'avait d'ailleurs vocation à s'appliquer qu'en cas de refus de participer à une augmentation de capital, et dont le résultat était fonction de paramètres propres à la situation capitalistique de la société Whitehall Street Global Repia Fund, prévoyait un prix de transfert susceptible d'être inférieur à la valeur vénale des parts transférées ne révèle pas par elle-même que ce prix ait été fixé avec l'intention, de la part de M.B..., de consentir une libéralité au groupe Goldman Sachs ; que l'économie générale de la transaction était d'ailleurs de nature à permettre à l'intéressé en cas d'évolution favorable de la conjoncture économique et financière, de réaliser des gains ; que les rapports de salarié à employeur entretenus par M. B...avec le groupe Goldman Sachs ne sauraient non plus être regardés comme constitutifs de relations d'intérêt de nature à révéler une intention libérale de la part de l'intéressé ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 7. et 8. que ni les conditions dans lesquelles les parts de la société Whitehall Street Global Repia Fund ont été transférées à la société Whitehall Street Employee Funds 2007, ni les conditions dans lesquelles ont été fixées, lors de la souscription initiale des parts, les modalités de ce transfert ne révèlent une intention libérale de la part de M.B... ; que l'opération de transfert de parts en litige ne peut par suite être requalifiée en libéralité n'entrant pas dans le champ des dispositions
des articles 150-0 A et 150-0 D, alors même qu'elle serait intervenue pour un prix nul ou inférieur à la valeur vénale des parts transférées ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. et Mme B...sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la réduction des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010 et à obtenir ladite réduction ; que leurs conclusions tendant au versement d'intérêts moratoires ne peuvent en revanche qu'être rejetées, faute de litige né et actuel avec le comptable public sur ce point ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Les jugements no 1222321/2-2 du 28 octobre 2013 et n° 1403152/2-2 du 2 février 2015 du Tribunal administratif de Paris sont annulés.
Article 2 : Les cotisations d'impôts sur le revenu et de contributions sociales auxquelles
M. et Mme B...ont été assujettis au titre de l'année 2009 sont réduites en conséquence de l'imputation, sur les plus-values de même nature réalisées par eux au cours de cette même année, de la moins-value réalisée sur les titres de la société Whitehall Street Global Repia Fund.
Article 3 : Les cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles
M. et Mme B...ont été assujettis au titre de l'année 2010 sont réduites à raison du report du solde de la moins-value mentionnée à l'article précédent sur les plus-values de même nature réalisées par eux en 2010.
Article 4 : Le surplus de la requête n° 17PA00378 de M. et Mme B...est rejeté.
Article 5 : L'Etat versera à M. et Mme B...la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.
Délibéré après l'audience du 20 septembre 2017, à laquelle siégeaient :
- Mme Appèche, président,
- M. Magnard, premier conseiller,
- Mme Jimenez, premier conseiller.
Lu en audience publique le 4 octobre 2017.
Le rapporteur,
F. MAGNARDLe président assesseur,
En application de l'article R. 222-26 du code
de justice administrative
S. APPECHE
Le greffier,
P. LIMMOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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Nos 17PA00378, 17PA00403