Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 13 mars 2020, l'Agence mondiale antidopage, représentée par la SCP Piwnica Molinié demande à la Cour :
1°) d'annuler ou d'infirmer le jugement du 28 novembre 2019 ;
2°) d'annuler la décision du 4 avril 2017 de la commission disciplinaire d'appel de lutte contre le dopage de la Fédération française de rugby à XIII en tant qu'elle limite à deux ans, dont vingt-et-un mois avec sursis, la sanction d'interdiction de participer aux manifestations sportives organisées ou autorisées par cette fédération infligée à M. A... B... ;
3°) d'interdire pour une durée de quatre ans la participation de M. A... B... aux compétitions sportives organisées ou autorisées par la Fédération française de rugby à XIII et étendre les effets de cette sanction aux activités de l'intéressé relevant des autres fédérations sportives françaises ;
4°) d'ordonner la publication du jugement à intervenir au Bulletin officiel du ministère des sports, au Bulletin officiel de la Fédération française de rugby à XIII, au Bulletin officiel de la Fédération française de rugby à XV, à la revue Sport d'entreprise de la Fédération française du sport d'entreprise, au Bulletin officiel de la Fédération sportive et culturelle de France, à la revue Sport et plein air de la Fédération sportive et gymnique du travail et à la revue En jeu, une autre idée du sport de l'Union française des oeuvres laïques d'éducation physique ;
5°) et de mettre à la charge de M. B... la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé quant à la possibilité d'assortir la sanction d'un sursis et à son quantum ; il n'a pas répondu au moyen tiré de ce que M. B... avait tenté de falsifier les résultats du contrôle ;
- M. B... ne justifiait d'aucune circonstance particulière susceptible d'atténuer la sanction de quatre ans d'interdiction ;
- il a tenté de s'opposer au contrôle ;
- ni l'absence de récidive ni le caractère prétendument humoristique des propos tenus ne justifiaient une mesure de clémence ;
- le sursis n'est prévu qu'au bénéfice des personnes qui ont fourni une aide substantielle à l'enquête ;
- la commission disciplinaire d'appel n'a pas réprimé la tentative de falsification du contrôle qui constitue un manquement distinct.
Par un mémoire enregistré le 12 janvier 2021, M. B..., représenté par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, conclut :
1°) à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il prononce une sanction, ou à tout le moins limiter la sanction à un sursis dont la durée n'excède pas six mois ;
2°) à titre subsidiaire au rejet de la requête ;
3°) à ce que la somme de 6 000 euros soit mis à la charge de l'Agence mondiale antidopage sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement, dont la motivation n'est pas insuffisante, n'est pas irrégulier ;
- il n'a pas commis de faits de dopage et les propos, certes inappropriés, qu'il a tenus sur le mode de la plaisanterie ne sauraient être regardés comme une tentative de se soustraire au contrôle ;
- la sanction prononcée par le tribunal est excessive au regard de la gravité des faits commis ;
- si la cour devait en juger autrement, il y a lieu de maintenir la sanction prononcée, la fédération pouvant assortir les sanctions qu'elle prononce du sursis.
Par un courrier du 12 janvier 2021, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible de relever d'office le moyen d'ordre public tiré de ce que le tribunal, qui avait considéré qu'il était saisi d'un recours de pleine juridiction et non d'un recours pour excès de pouvoir, et qui avait en conséquence substitué sa décision à celle de la commission disciplinaire de la fédération s'était mépris sur l'entendue de ses pouvoirs et avait méconnu son office.
Par un mémoire enregistré le 15 janvier 2021, l'agence mondiale antidopage demande à la cour de ne pas retenir ce moyen d'ordre public. Elle soutient que :
- bien que l'article L. 232-24 du code du sport ne le spécifie pas expressément, rien ne justifie que le recours de l'AMD contre la décision rendue par l'instance disciplinaire d'une fédération sportive en matière de dopage ne soit pas un recours de pleine juridiction ;
- la nature de ce recours correspond à l'intention du législateur confirmée par l'évolution ultérieure de la législation.
La Fédération française de rugby à XIII, à qui la requête a été communiquée, n'a pas produit de mémoire.
Vu la décision n° 2017-688 QPC du 2 février 2018 du Conseil constitutionnel.
Vu la décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux 414261, 416215 du 26 juillet 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du sport,
- le décret n° 2016-84 du 29 janvier 2016 relatif aux sanctions disciplinaires en matière de lutte contre le dopage,
- le règlement disciplinaire relatif à la lutte contre le dopage de la Fédération française de rugby à XIII,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. E...,
- les conclusions de Mme Péna, rapporteur public,
- les observations de Me H..., représentant l'Agence mondiale antidopage,
- et les observations de Me G..., représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. Le 5 octobre 2016, alors qu'il participait, en sa qualité de sportif rugbyman professionnel, à un stage d'entraînement de l'équipe de France masculine de rugby à XIII à Barcarès, M. B... a fait l'objet d'un contrôle de l'Agence française de lutte contre le dopage. A la suite de ce contrôle, la commission disciplinaire de lutte contre le dopage de première instance de la Fédération française de rugby à XIII, par une décision du 1er février 2017, a prononcé à son encontre une sanction d'interdiction de participer pendant deux ans aux manifestations sportives organisées ou autorisées par la Fédération française de rugby à XIII. M. B... a relevé appel de cette décision. Par une décision du 4 avril 2017, la commission disciplinaire d'appel de lutte contre le dopage a rejeté son recours et prononcé la même sanction assortie d'une mesure de sursis d'une durée de vingt-et-un mois. Par une décision n° D. 2017-57 du 6 juillet 2017, la formation disciplinaire de l'Agence française de lutte contre le dopage a annulé partiellement la décision du 4 avril 2017, puis a prononcé à l'encontre de M. B... une sanction d'interdiction de participer pendant deux ans aux manifestations sportives organisées ou autorisées par la Fédération française de rugby à XIII.
2. Par une décision n° 414261-416215 du 26 juillet 2018, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, à la demande de M. B..., annulé la décision de l'Agence française de lutte contre le dopage du 6 juillet 2017 qui avait été prise sur le fondement des dispositions déclarées contraires à la Constitution. Il a, par cette même décision, jugé que les conclusions de l'Agence mondiale antidopage tendant à l'annulation de cette sanction en tant qu'elle serait d'une sévérité insuffisante étaient devenues sans objet, et il a rejeté les conclusions présentées par cette Agence tendant à ce que le Conseil d'Etat inflige lui-même une sanction à M. B... à raison de l'ensemble des circonstances du contrôle antidopage effectué le 5 octobre 2016. Il a toutefois considéré que l'annulation de la sanction du 6 juillet 2017 de l'Agence française de lutte contre le dopage faisait revivre la décision de la commission disciplinaire d'appel de lutte contre le dopage de la Fédération française de rugby à XIII du 4 avril 2017 qui a prononcé à l'encontre de M. B... la sanction de l'interdiction de participer pendant deux ans, dont vingt-et-un mois avec sursis, aux manifestations sportives organisées ou autorisées par cette fédération, et qu'il était loisible à l'Agence mondiale antidopage, si elle s'y croyait fondée, d'introduire un recours contre cette décision du 4 avril 2017.
3. A la suite de quoi, l'Agence mondiale antidopage a demandé le 26 novembre 2018 au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 4 avril 2017 de la commission disciplinaire d'appel de lutte contre le dopage de la Fédération française de rugby à XIII et de porter à quatre ans l'interdiction faite à M. B... de participer aux compétitions sportives organisées ou autorisées par Fédération française de rugby à XIII et d'étendre les effets de cette sanction aux activités de l'intéressé relevant des autres fédérations sportives françaises. M. B... a, pour sa part, conclu au rejet de la demande et, à titre subsidiaire, à ce que toute sanction à son endroit soit écartée ou, à tout le moins, à ce que la durée de sa suspension ne soit pas supérieure à six mois.
4. Par un jugement du 12 mars 2020, le tribunal administratif de Paris a substitué à la décision du 5 avril 2017 de la Fédération française de rugby à XIII infligeant à M. B... une sanction de suspension de deux ans assortis d'un sursis de vingt-et-un mois, une sanction de suspension de deux ans assortis d'un sursis de seize mois. L'Agence mondiale antidopage qui relève appel de ce jugement demande notamment à la Cour d'annuler la décision du 4 avril 2017 et de porter à quatre ans la mesure d'interdiction frappant M. B....
Sur la régularité du jugement :
5. Aux termes de l'article L. 232-24 du code du sport dans sa rédaction applicable : " Les parties intéressées et le président de l'Agence française de lutte contre le dopage peuvent former un recours de pleine juridiction contre les décisions de la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage prises en application de l'article L. 232-23./ L'Agence mondiale antidopage, une organisation nationale antidopage étrangère ou un organisme sportif international mentionné à l'article L. 230-2 peut saisir la juridiction administrative compétente d'une décision prise par l'organe disciplinaire d'une fédération sportive délégataire ainsi que d'une décision de l'Agence française de lutte contre le dopage ".
6. Les dispositions citées au point précédent de l'article L. 232-24 du code du sport ne prévoient de recours de pleine juridiction que contre les décisions de la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage. La contestation des sanctions prises par l'organe disciplinaire d'une fédération sportive en cas de faits constatés de dopage, en application des articles L. 232-9 et L. 232-10 du code du sport, relève de l'excès de pouvoir. Dès lors qu'il était amené à se prononcer, non en tant que juge de plein contentieux mais en qualité de juge de l'excès de pouvoir, le tribunal administratif de Paris ne pouvait pas substituer sa décision à la sanction prononcée prise par l'organe disciplinaire de la Fédération française de rugby à XIII. L'erreur ainsi commise par le tribunal sur l'étendue de ses pouvoirs doit être relevée d'office par le juge d'appel. Sans qu'il soit besoin de statuer sur le moyen tiré de son insuffisante motivation, le jugement attaqué doit donc être annulé.
7. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par l'Agence mondiale antidopage devant le tribunal administratif de Paris.
Sur la recevabilité de la demande de l'Agence mondiale antidopage :
S'agissant de l'intérêt à agir :
8. Il résulte des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 232-24 du code du sport, citées au point 5 que, contrairement à ce que soutient la Fédération française de rugby à XIII, l'Agence mondiale antidopage avait bien intérêt à agir, à la date de l'introduction de la présente requête, contre la décision du 4 avril 2017 de la commission disciplinaire d'appel de lutte contre le dopage de la Fédération française de rugby à XIII.
S'agissant de la tardiveté de la demande :
9. D'une part, aux termes du premier alinéa de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. ", et aux termes de l'article R. 421-7 du code de justice administrative : " (...) Ce même délai est augmenté de deux mois pour les personnes qui demeurent à l'étranger. ".
10. D'autre part, aux termes de l'article L. 141-4 du code du sport : " Le Comité national olympique et sportif français est chargé d'une mission de conciliation dans les conflits opposant les licenciés, les agents sportifs, les associations et sociétés sportives et les fédérations sportives agréées, à l'exception des conflits mettant en cause des faits de dopage ". L'article
R. 141-5 du code du sport dispose que : " La saisine du comité à fin de conciliation constitue un préalable obligatoire à tout recours contentieux, lorsque le conflit résulte d'une décision, susceptible ou non de recours interne, prise par une fédération dans l'exercice de prérogatives de puissance publique ou en application de ses statuts ". Aux termes de l'article R.141-9-1 du même code : " Le délai de recours contentieux applicable aux décisions mentionnées à l'article R. 141-5 et relevant de la compétence de la juridiction administrative est d'un mois. ".
11. Il résulte de la décision du Conseil d'État du 26 juillet 2018 que l'annulation de la sanction du 6 juillet 2017 de l'Agence française de lutte contre le dopage a fait revivre la décision de la commission disciplinaire d'appel de lutte contre le dopage de la Fédération française de rugby à XIII du 4 avril 2017 et que le délai de recours contentieux contre la décision de sanction prise par la commission disciplinaire de la fédération courait à nouveau pour l'Agence mondiale antidopage à compter à compter du 26 juillet 2018, dont il n'est pas contesté qu'il s'agit de la date de la notification de la décision du Conseil d'État.
12. La Fédération française de rugby à XIII soutient que la requête de l'Agence mondiale antidopage est tardive au motif qu'elle ne disposait que d'un mois pour introduire son recours contentieux s'agissant d'une décision relevant de la matière sportive, ce délai étant en l'espèce allongé de deux mois pour les personnes, physiques ou morales, demeurant à l'étranger, soit jusqu'au 26 octobre 2018. Il résulte toutefois des dispositions précitées du code du sport que le délai de recours contentieux d'un mois n'est applicable qu'aux décisions qui ont donné lieu à une conciliation du Comité national olympique et sportif français et que cette procédure exclut expressément les litiges pour faits de dopage. Dans ces conditions, l'Agence mondiale antidopage, dont le siège est situé à Montréal, disposait de quatre mois, soit jusqu'au
26 novembre 2018, pour introduire la demande en vertu des dispositions précitées des articles
R. 421-1 et R. 421-7 du code de justice administrative. La demande, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Paris le 26 novembre 2018, n'est donc pas tardive.
Sur la légalité :
S'agissant du vice de forme :
13. La décision attaquée de la commission disciplinaire d'appel du 4 avril 2017 qui vise le décret n° 2016-84 du 29 janvier 2016 relatif aux sanctions disciplinaires en matière de lutte contre le dopage et qui cite les dispositions du règlement type annexé à ce décret et reprises du règlement disciplinaire relatif à la lutte contre le dopage de la Fédération française de rugby à XIII dont il est fait application est suffisamment motivée en droit.
S'agissant des textes applicables :
En ce qui concerne la définition des infractions et les sanctions susceptibles d'être appliquées :
14. En premier lieu, aux termes du 2° de l'article L. 232-9 du code du sport, dans sa rédaction applicable à la date de la constatation des faits : " Il est interdit à tout sportif : (...) / 2° D'utiliser ou tenter d'utiliser une ou des substances ou méthodes interdites figurant sur la liste mentionnée au dernier alinéa du présent article. / (...) La liste des substances et méthodes mentionnées au présent article est celle qui est élaborée en application de la convention internationale mentionnée à l'article L. 230-2 ou de tout autre accord ultérieur qui aurait le même objet et qui s'y substituerait. Elle est publiée au Journal officiel de la République française ".
15. Aux termes de l'article L. 232-23-3-3 du code du sport dans sa version applicable : " I.- La durée des mesures d'interdiction mentionnées au 1° du I de l'article L. 232-23 à raison d'un manquement à l'article L. 232-9 :/ a) Est de quatre ans lorsque ce manquement est consécutif à l'usage ou à la détention d'une substance non spécifiée. Cette durée est ramenée à deux ans lorsque le sportif démontre qu'il n'a pas eu l'intention de commettre ce manquement ;/ b) Est de deux ans lorsque ce manquement est consécutif à l'usage ou à la détention d'une substance spécifiée. ". Ces dispositions sont reproduites à l'article 39 de l'annexe II du décret
n° 2016-84 du 29 janvier 2016 relatif aux sanctions disciplinaires en matière de lutte contre le dopage et à l'article 39 du règlement disciplinaire relatif à la lutte contre le dopage de la Fédération française de rugby à XIII.
16. En second lieu, aux termes du 3° de l'article L. 232-10 du code du sport, dans sa rédaction applicable à la date de la constatation des faits : " Il est interdit à toute personne de : / (...) 3° S'opposer par quelque moyen que ce soit aux mesures de contrôle prévues par le présent titre / 4° Falsifier, détruire ou dégrader tout élément relatif au contrôle, à l'échantillon ou à l'analyse ; ... ". Aux termes du I de l'article L. 232-17 du code du sport dans sa version applicable : " I. - Se soustraire, tenter de se soustraire ou refuser de se soumettre aux contrôles prévus aux articles L. 232-12 à L. 232-16, ou de se conformer à leurs modalités, est passible des sanctions administratives prévues par les articles L. 232-21 à L. 232-23 ". Aux termes de l'article L. 230-6 de ce code : " Pour l'application de la section 4 du chapitre II du présent titre, la tentative de commission d'une infraction aux dispositions de ce titre est constituée dès lors que, manifestée par un commencement d'exécution, elle n'a été suspendue ou n'a manqué son effet qu'en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur ".
17. Aux termes de l'article L. 232-23-3-4 du code du sport dans sa version applicable : " La durée des mesures d'interdiction mentionnées au 1° du I de l'article L. 232-23 à raison d'un manquement au 4° de l'article L. 232-10 et au I de l'article L. 232-17 est de quatre ans...".
18. Enfin, aux termes de l'article L. 232-23-3-10 du code du sport dans sa version applicable : " La durée des mesures d'interdiction prévues aux articles L. 232-23-3-3 à
L. 232-23-3-8 peut être réduite par une décision spécialement motivée lorsque les circonstances particulières de l'affaire le justifient au regard du principe de proportionnalité ".
En ce qui concerne les règles applicables par les organes disciplinaires des fédérations sportives :
19. Aux termes de l'article L. 232-21 du code du sport dans sa version applicable : " Toute personne qui a contrevenu aux dispositions des articles L. 232-9, (...) L. 232-10, (...) encourt des sanctions disciplinaires de la part de la fédération dont elle est licenciée. (...) / Ces sanctions sont prononcées par les fédérations sportives mentionnées à l'article L. 131-8 . /A cet effet, les fédérations adoptent dans leur règlement des dispositions définies par décret en Conseil d'Etat et relatives aux contrôles organisés en application du présent titre, ainsi qu'aux procédures disciplinaires et aux sanctions applicables, dans le respect des droits de la défense (...) ".
20. Aux termes de l'article R. 232-86 du code du sport dans sa rédaction issue du décret n° 2016-84 du 29 janvier 2016 relatif aux sanctions disciplinaires en matière de lutte contre le dopage : " Les fédérations sportives agréées adoptent à l'identique, en application de l'article
L. 232-21, le règlement type particulier de lutte contre le dopage reproduit en annexe II-2. ".
21. Aux termes de l'article 38 du règlement type mentionné au point précédent, repris à l'article 38 du règlement disciplinaire relatif à la lutte contre le dopage de la Fédération française de rugby à XIII, dans son chapitre III relatif aux sanctions : " I. Sans préjudice des sanctions pénales éventuellement encourues (...), les organes disciplinaires, dans l'exercice de leur pouvoir de sanction en matière de lutte contre le dopage, peuvent prononcer :/" 1° A l'encontre des sportifs ayant enfreint les dispositions des articles L. 232-9 (...) ou du 3° de l'article
L. 232-10 du code du sport :/ " a) Un avertissement ; / " b) Une interdiction temporaire ou définitive de participer aux manifestations sportives autorisées ou organisées par la fédération ainsi qu'aux entraînements y préparant organisés par la fédération agréée ou l'un de ses membres(...)/ IV.- Pour l'application du chapitre III, l'organe disciplinaire, après avoir rappelé la sanction normalement encourue, en précisant aussi bien son maximum que son minimum, rend sa décision en tenant compte, d'une part, du degré de gravité de la faute commise et, d'autre part, de tout motif à même de justifier, selon les circonstances, la réduction du quantum de la sanction, une mesure de relaxe ou l'octroi du bénéfice du sursis à l'exécution de la sanction infligée. ". L'article 40 dispose que : " La durée des mesures d'interdiction mentionnées au 1° du I de l'article 38 à raison d'un manquement au 4° de l'article L. 232-10 du code du sport et au
I de l'article L. 232-17 du même code est de quatre ans ". L'article 46 prévoit cependant que " La durée des mesures d'interdiction prévues aux articles 39 à 44 peut être réduite par une décision spécialement motivée lorsque les circonstances particulières de l'affaire le justifient au regard du principe de proportionnalité ".
22. Enfin, aux termes de l'article 51 du règlement type mentionné au point précédent, repris à l'article 51 du règlement disciplinaire relatif à la lutte contre le dopage de la Fédération française de rugby à XIII, dans son chapitre IV relatif à l'exécution des sanctions : " Les organes disciplinaires peuvent, dans les cas et selon les conditions prévues ci-après, assortir une sanction d'un sursis à exécution lorsque la personne a fourni une aide substantielle permettant, par sa divulgation, dans une déclaration écrite signée, d'informations en sa possession en relation avec des infractions aux règles relatives à la lutte contre le dopage et par sa coopération à l'enquête et à l'examen de toute affaire liée à ces informations ".
Sur l'erreur de droit et sur la proportionnalité de la sanction :
23. Le 5 octobre 2016, alors que M. A... B... participait, en sa qualité de sportif professionnel, à un stage d'entraînement de l'équipe de France masculine de rugby à XIII à Barcarès, il a fait l'objet d'un contrôle de l'Agence française de lutte contre le dopage. Il ressort des deux rapports complémentaires rédigés les 10 et 13 octobre 2016 par M. C... D..., préleveur urinaire et par le docteur Guy-Alphonse Foucade, que l'intéressé, qui ne conteste pas les termes de ces rapports, a interrogé les agents de contrôle sur la possibilité que leurs investigations révèlent les traces de la cocaïne qu'il avait consommée la veille, puis a demandé que l'un d'eux se soumette au contrôle à sa place, ou qu'ils le fassent porter sur un autre joueur présent, indiquant par ailleurs qu'il disposait d'argent liquide dans sa voiture et renouvelant sa demande qu'un des agents falsifie le contrôle en s'y soumettant à sa place. M B... s'est finalement soumis au contrôle, qui, ne portant pas sur la recherche de drogues, n'a pu en révéler la consommation.
24. Par la décision attaquée du 4 avril 2017, la commission disciplinaire d'appel de lutte contre le dopage de la fédération française de rugby à XIII a prononcé à l'encontre de M. B... la sanction de l'interdiction de participer pendant deux ans dont vingt et un mois avec sursis aux manifestations sportives organisées ou autorisées par cette fédération. Il lui appartient à la Cour de vérifier que cette sanction n'est pas entachée d'erreur de fait ou de droit, et que le quantum de cette sanction est ou non proportionné à ces faits.
25. S'il ressort des pièces du dossier que des traces de cocaïne ont été trouvées dans l'urine de M. B..., cette substance stupéfiante à usage essentiellement récréatif n'est prohibée qu'en compétition ainsi qu'il ressort de l'annexe S6 du décret n°2014-1556 du 22 décembre 2014 portant publication de l'amendement à l'annexe I de la convention internationale contre le dopage dans le sport. C'est donc à bon droit que, les traces de cette substance ayant été décelée à l'entrainement hors contexte de compétition, la fédération n'a pas poursuivi et sanctionné
M. B... sur le fondement du 2° de l'article L. 232-9 du code du sport.
26. Les faits relatés au point 23 du présent arrêt doivent s'analyser comme une tentative de " s'opposer par quelque moyen que ce soit aux mesures de contrôle " au sens du 3° de l'article L. 232-10 du code du sport. Cependant les échanges intervenus avec les agents de contrôle avant le prélèvement d'urine, dans un contexte où il est difficile de démêler ce qui relève de la mauvaise plaisanterie et du sérieux, et alors que M. B... s'est en définitive prêté sans excès de mauvaise grâce au contrôle auquel il était astreint ne sauraient caractériser une tentative de " falsifier, détruire ou dégrader tout élément relatif au contrôle, à l'échantillon ou à l'analyse " au sens du 4° de l'article L. 232-10 dès lors que le prélèvement n'avait pas encore eu lieu. C'est donc sans erreur que la commission disciplinaire d'appel a considéré qu'il y avait un doute sur le dessein frauduleux. Dès lors que le contrôle a été mené à son terme sans autre difficulté particulière que celle résultant des facéties déplacées de M. B... et que l'analyse n'a pas révélé la présence de substance dopante, la commission disciplinaire pouvait, afin que soit respecté le principe de proportionnalité, ramener à deux ans le quantum de la durée de l'interdiction sur le fondement de l'article L. 232-23-3-10 du code du sport et de l'article 40 de son règlement disciplinaire. Si l'Agence mondiale antidopage soutient que les dispositions de l'article 51 du règlement disciplinaire de la Fédération, citées au point 22, réservent le bénéfice du sursis aux seules personnes qui ont fourni une aide substantielle permettant la divulgation d'informations en leur possession en relation avec des infractions aux règles relatives à la lutte contre le dopage et qui ont coopéré à l'enquête, ces dispositions ne trouvaient pas à s'appliquer en l'espèce dans la mesure où M. B..., testé négatif ainsi qu'il a été dit, n'avait pas absorbé de substances dopantes, qu'aucune information n'était attendue de lui, et que les faits ne donnaient pas lieu à enquête. Il en va de même, et pour les mêmes raisons, des dispositions de l'article L. 232-23-3-2 du code du sport, relatives au pouvoir conféré à l'agence française de lutte contre le dopage, également inapplicables au cas d'espèce s'agissant d'une procédure disciplinaire menée au sein d'une fédération. Pour le surplus, l'Agence mondiale antidopage ne saurait utilement se prévaloir du code mondial antidopage qui n'est pas d'application directe, ni des intentions qu'elle prête aux auteurs du décret du 29 janvier 2016 qui en a transposé certains éléments, ni de la volonté non démontrée en l'espèce du législateur, ni d'une lettre interprétative du ministre des sports du 10 mars 2020. Dès lors la commission disciplinaire d'appel pouvait, sur le fondement des pouvoirs qu'elle tient du IV de l'article 38 assortir d'un sursis la sanction d'interdiction de deux ans qu'elle avait infligée à M. B.... L'interdiction de participer pendant deux ans dont vingt-et-un mois avec sursis aux manifestations sportives organisées ou autorisées par cette la fédération française de rugby à XIII n'est pas une sanction insuffisante eu égard à la gravité relative des faits de l'espèce au regard des dispositions du code du sport et des considérations précédemment rappelées.
27. Il résulte de ce qui précède que la décision attaquée n'est pas entachée d'erreur de droit ou de fait, que les faits ont été correctement appréciés par la commission disciplinaire d'appel et que la sanction est proportionnée aux faits. Dès lors, l'agence mondiale antidopage n'est pas fondée à soutenir que la décision du 8 février 2017 est entachée d'illégalité. Sa demande doit donc être rejetée. Ses conclusions tendant à ce que la sanction soit aggravée et étendue à d'autres fédérations sont par ailleurs irrecevables devant le juge de l'excès de pouvoir. Enfin, l'exécution du présent arrêt ne nécessite pas sa publication dans la presse.
Sur les frais de justice :
Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de l'Agence mondiale antidopage qui est la partie qui succombe. Il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions que M. B... et la fédération française de rugby à XIII présentent sur le fondement de ces dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1821487 du tribunal administratif de Paris du 28 novembre 2019 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par l'Agence mondiale antidopage devant le tribunal administratif de Paris et ses conclusions d'appel sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la fédération française de rugby à XIII et les conclusions de
M. B... présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'Agence mondiale antidopage, à la Fédération française de rugby à XIII et à M. A... B....
Délibéré après l'audience du 19 janvier 2021, à laquelle siégeaient :
- M. F..., premier vice-président,
- M. E..., président-assesseur,
- Mme Mornet, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 février 2021.
Le rapporteur,
Ch. E...Le président,
M. F...
Le greffier,
N. DAHMANI
La République mande et ordonne au ministre des sports en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
5
N° 10PA03855
2
N° 20PA00972