Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 31 juillet 2017 et 16 avril 2019, la commune d'Ivry-sur-Seine, représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Melun n° 1702021/9 du 28 juin 2017 ;
2°) de rejeter le recours présenté par le préfet du Val-de-Marne devant le Tribunal administratif de Melun ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le voeu adopté répond à un intérêt local au sens de l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales ;
- la question du maintien de la paix relève des compétences générales des communes ;
- ce voeu n'a pas de caractère contraignant en ce qui concerne les contrats conclus par la commune et ne méconnaît pas les règles de la commande publique ;
- il ne porte pas sur les relations internationales de la France et n'est pas susceptible de créer des troubles à l'ordre public.
Par un mémoire en défense enregistré le 26 février 2018, le préfet du Val-de-Marne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.
Un mémoire, enregistré le 9 mai 2019, a été présenté par le préfet du Val-de-Marne.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hamon,
- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,
- et les observations de Me B...pour la commune d'Ivry-sur-Seine.
Considérant ce qui suit :
1. Le conseil municipal de la commune d'Ivry-sur-Seine a, par une délibération du 20 octobre 2016, adopté un voeu " relatif à l'application du droit pour une paix juste et durable au Proche-Orient ". La commune fait appel du jugement du 28 juin 2017 par lequel le Tribunal administratif de Melun a, sur déféré du préfet du Val-de-Marne, annulé cette délibération.
2. La délibération par laquelle l'organe délibérant d'une collectivité territoriale émet un voeu ne constitue pas un acte faisant grief et n'est donc pas susceptible de faire l'objet d'un recours devant le juge de l'excès de pouvoir même en raison de prétendus vices propres, à moins qu'il en soit disposé autrement par la loi, comme c'est le cas lorsque, sur le fondement de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, le préfet défère au tribunal administratif les actes qu'il estime contraires à l'ordre public ou à la légalité.
3. Aux termes de l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales : " Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune. (...) Le conseil municipal émet des voeux sur tous les objets d'intérêt local ". De telles délibérations peuvent porter sur des questions qui relèvent de la compétence d'autres personnes publiques, dès lors qu'elles présentent un intérêt communal.
4. La délibération contestée, qui demande le retrait de circulaires ministérielles relatives à l'interdiction d'appeler au boycott des produits provenant d'Israël, prévoit que la commune évite de contractualiser avec des entreprises n'appliquant pas les principes directeurs des Nations unies et les droits de l'Homme dans leurs activités dans les colonies israéliennes, et demande à la France de stopper toutes les importations de produits qui y sont fabriqués et d'oeuvrer pour le respect des résolutions des Nations-Unies en Palestine, a pour objet de manifester la position de la commune sur une question de politique internationale. La seule circonstance que la commune soit jumelée avec deux communes palestiniennes, qu'elle participe à des réseaux intervenant en faveur de la paix et qu'elle soit susceptible d'acheter des biens produits dans des colonies israéliennes, ne suffit pas à caractériser une incidence suffisamment directe entre le contenu de cette délibération et l'intérêt de la commune ou de ses habitants et, par suite, un intérêt local au sens des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales.
5. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Ivry-sur-Seine n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a annulé la délibération déférée. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune d'Ivry-sur-Seine est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Ivry-sur-Seine et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera délivrée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 13 mai 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 juin 2019.
Le rapporteur,
P. HAMONLe président,
B. EVENLe greffier,
S. GASPARLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA02686