2°) d'annuler les décisions du 22 mai 2012 par lesquelles le président de l'université Panthéon-Assas Paris II a signé les statuts de la société Assas Lextenso formations et la convention liant celle-ci et l'université, ainsi que la décision par laquelle la même autorité a décidé d'accorder une avance en compte courant à cette société ;
3°) d'annuler la décision implicite par laquelle la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche a rejeté le recours formé devant elle contre les délibérations du 14 mars 2012 ;
4°) d'annuler la décision du 31 mai 2012 par laquelle le recteur de l'académie de Paris a refusé de suspendre et de déférer à la juridiction administrative les délibérations du 14 mars 2012 ;
5°) et de mettre à la charge de l'université Panthéon-Assas Paris II une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1217449/2-1 du 29 octobre 2013, le Tribunal administratif de Paris a annulé les délibérations du conseil d'administration de l'université Panthéon-Assas Paris II du 14 mars 2012 ainsi que les deux décisions du 22 mai 2012, a enjoint à cette université de procéder à la dissolution de la société Assas Lextenso, a mis à sa charge la somme de 2 000 euros sur le foncement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement les 30 décembre 2013, 25 février 2014 et 15 juillet 2015, l'université Panthéon-Assas Paris II, représentée par Me Molinié, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1217449/2-1 du 29 octobre 2013 ;
2°) de rejeter les conclusions de la demande présentée par la société CapAvocat devant le Tribunal administratif de Paris ;
3°) de mettre à la charge de la société CapAvocat une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande de première instance présentée par la société CapAvocat est tardive ;
- le jugement a été rendu à l'issue d'une procédure irrégulière puisqu'il repose sur un moyen soulevé d'office qui n'a pas été préalablement communiqué aux parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, et méconnaît donc le principe du contradictoire ;
- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit au regard des articles L. 613-2 et L. 711-1 du code de l'éducation qui autorise les universités à créer des filiales, dans le cadre du principe d'autonomie dont elles bénéficient ;
- les premiers juges auraient dû, au regard du motif retenu, se borner à prononcer une annulation partielle des décisions attaquées en tant seulement qu'elles autorisaient la société Assas Lextenso à dispenser une préparation à l'examen d'entrée au centre régional de formation à la profession d'avocat, lesdites décisions étant divisibles dans la mesure où elles autorisent la création d'une filiale dont l'objet est double, puisqu'il porte à la fois sur la formation permanente et la préparation à l'examen d'entrée au centre régional de formation à la profession d'avocat.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juin 2015, la société Capavocat conclut au non-lieu à statuer et, en tout état de cause, au rejet de la requête en appel. Elle précise qu'elle renonce à solliciter l'annulation de la décision par laquelle l'université a décidé de verser une avance en compte courant à la société, de la décision implicite par laquelle la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche a rejeté le recours formé devant elle contre les délibérations du 14 mars 2012 et, enfin, de la décision du 31 mai 2012 par laquelle le recteur de l'académie de Paris a refusé de suspendre et de déférer à la juridiction administrative les délibérations du 14 mars 2012.
Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Une ordonnance datée du 16 juillet 2015 a clôturé l'instruction au 15 août 2015 à 12 heures.
Un mémoire complémentaire, présenté par la SARL Capavocat, a été enregistré le 13 août 2015.
Un moyen d'ordre public a été adressé aux parties le 27 janvier 2016, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, tiré de l'irrecevabilité des conclusions incidentes présentées par la société CapAvocat en appel en tant qu'elles portent uniquement sur les motifs du jugement attaqué.
Un mémoire en réponse à ce moyen d'ordre public, enregistré le 29 janvier 2016, a été présenté pour la société CapAvocat, laquelle fait valoir qu'elle n'a pas entendu former de conclusions incidentes.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le décret n° 2000-1264 du 26 décembre 2000 fixant les conditions dans lesquelles les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel peuvent prendre des participations et créer des filiales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme d'Argenlieu,
- les conclusions de M. Cantié, rapporteur public,
- les observations de Me Molinié, avocat de l'université Panthéon-Assas Paris II,
- et les observations de Me Soubelet-Carolit, avocat de la société CapAvocat.
1. Considérant que, par trois délibérations du 14 mars 2012, le conseil d'administration de l'université Panthéon-Assas Paris II a approuvé le projet de statuts constitutifs de sa filiale, la société par actions simplifiée (SAS) " Assas Lextenso formations ", dont le capital sera détenu à 80 % par l'université et à 20 % par la société anonyme Lextenso, a approuvé le projet de convention destiné à lier l'université à cette société et a désigné la personne qui représentera l'université au sein de cette société ; que ce projet de création de filiale a été approuvé par le recteur de l'académie, chancelier des universités de Paris, le 2 mai 2012 ; que, par deux décisions datées du 22 mai 2012, le président de l'université Panthéon-Assas Paris II a signé ces statuts et cette convention ; que l'université fait appel du jugement du 29 octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de la société CapAvocat, les trois délibérations du 14 mars 2012 et les deux décisions du 22 mai 2012 ;
Sur les conclusions de la société CapAvocat à fin de non-lieu à statuer :
2. Considérant que la circonstance que la SAS " Assas Lextenso formations " a été dissoute, à compter du 23 décembre 2013, en exécution de l'injonction prononcée par le Tribunal administratif de Paris dans son jugement du 29 octobre 2013, n'a pu avoir pour effet de faire disparaître tout ou partie de l'objet du présent litige, sur lequel il y a lieu de statuer ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou, au Conseil d'Etat, la sous-section chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué " ;
4. Considérant que l'université Panthéon-Assas Paris II soutient que les premiers juges ont méconnu le principe du contradictoire en fondant leur annulation sur l'article L. 613-2 du code de l'éducation, qui prévoit que les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel : " peuvent (...) organiser, sous leur responsabilité, des formations (...) préparant à des examens ou des concours ", alors que ce texte n'avait pas été invoqué devant eux par les parties ; qu'en se référant à ces dispositions, les premiers juges ont entendu préciser le champ d'application du droit accordé par l'article L. 711-1 du code de l'éducation aux établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel de créer des filiales ; que cette mention ne se rattache pas à un moyen nouveau, qui aurait dû au préalable être soumis aux parties en application de l'article R. 611-7 précité du code de justice administrative, mais constitue une simple référence textuelle au soutien du moyen soulevé par la société CapAvocat en première instance tiré de la méconnaissance de cet article L. 711-1 du code de l'éducation ; que, par suite, les premiers juges n'ont pas méconnu le principe du contradictoire ; qu'ainsi, l'université Panthéon-Assas Paris II n'est pas fondée à soutenir que le jugement dont elle fait appel serait irrégulier ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par l'université Panthéon-Assas Paris II à la demande de première instance :
5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée " ;
6. Considérant, en premier lieu, que les délibérations contestées, qui touchent à l'organisation même du service public confié à cette université, ont le caractère d'actes réglementaires ; que, par suite, le délai de recours ouvert à leur encontre ne court qu'à compter de leur publication ; qu'en l'absence de dispositions prescrivant une formalité de publicité déterminée, ces délibérations sont opposables aux tiers à compter de la date de leur publication au bulletin officiel de cet établissement ou de celle de leur mise en ligne, dans des conditions garantissant sa fiabilité, sur le site internet de cette personne publique ;
7. Considérant, en l'espèce, qu'en l'absence de dispositions prescrivant une formalité particulière de publicité des délibérations du conseil d'administration de l'université Panthéon-Assas Paris II, cette dernière a mis en ligne les délibérations contestées sur son site internet ; qu'en se bornant à produire une copie d'écran de ce site faisant apparaître que ces délibérations auraient été publiées le jour même de leur adoption, sans fournir aucun autre élément relatif au contenu de cette publication et à sa durée, alors que, par un constat d'huissier, la société CapAvocat conteste le caractère certain du 14 mars 2012 comme étant la date de mise en ligne de ces décisions, l'université n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, que les actes en litige auraient fait l'objet d'une publicité fiable et suffisante, qui est seule de nature à faire courir le délai de recours contentieux ;
8. Considérant, en second lieu, que les décisions du 22 mai 2012 par lesquelles le président de l'université Panthéon-Assas Paris II a signé les statuts de la société " Assas Lextenso formations " et la convention liant celle-ci et l'université n'ont fait l'objet d'aucune formalité de publication ; qu'ainsi, aucun délai de recours n'a pu commencer à courir à leur encontre ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions tendant à l'annulation des décisions contestées, qui ont été enregistrées au greffe du Tribunal administratif de Paris le 24 septembre 2012, n'étaient pas tardives ;
Sur la légalité des décisions attaquées :
10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-3 du code de l'éducation, dans sa version en vigueur à la date des décisions attaquées : " Les missions du service public de l'enseignement supérieur sont : 1° La formation initiale et continue ; 2° La recherche scientifique et technologique, la diffusion et la valorisation de ses résultats ; 3° L'orientation et l'insertion professionnelle ; 4° La diffusion de la culture et l'information scientifique et technique ; 5° La participation à la construction de l'Espace européen de l'enseignement supérieur et de la recherche ; 6° La coopération internationale " ; qu'aux termes de l'article L. 711-1 du même code, dans sa version applicable à la date des décisions attaquées : " Dans le cadre des missions qui leur sont dévolues par le présent code et afin de faire connaître leurs réalisations, tant sur le plan national qu'international, les établissements à caractère scientifique, culturel et professionnel peuvent (...) prendre des participations, participer à des groupements et créer des filiales dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat (...) " ; qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 2000-1264 du 26 décembre 2000 modifié, dans sa version alors applicable : " En application de l'article L. 711-1 du code de l'éducation, les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel peuvent créer des filiales et prendre des participations dans des sociétés ou groupements de droit privé. / Lorsqu'un établissement détient plus de la moitié des actions ou des parts sociales de la personne morale mentionnée à l'alinéa précédent, celle-ci est dénommée filiale de cet établissement " ;
11. Considérant qu'aux termes de l'article 5 des statuts de l'université Panthéon-Assas Paris II, approuvés en dernier lieu le 16 décembre 2009 : " l'Université a pour vocation la formation initiale et continue ainsi que la recherche en droit, science politique, sciences économiques, sciences de gestion, sciences de l'information et de la communication " ; que les articles 3 et 4 de ces mêmes statuts disposent que l'université Panthéon-Assas Paris II regroupe en son sein, notamment, une unité de formation et de recherche (UFR) intitulée " Institut d'études judiciaires (IEJ) " et un " service commun " intitulé centre de formation permanente (CFP) ; que ces deux entités ont respectivement pour objet d'organiser, notamment, l'examen d'accès au centre régional de formation professionnelle d'avocats (CRFPA) et sa préparation, et " d'offrir aux acteurs de la vie économique, sociale et administrative des formations tout au long de la vie " ; qu'il ressort, par ailleurs, des pièces du dossier que l'objet de la SAS " Assas Lextenso formations ", défini par l'article 3 de ses statuts, est : " la formation continue destinée aux professionnels et la préparation intensive d'été aux examens et concours ; et ce dans les disciplines relatives aux sciences humaines, juridiques et politiques. La société peut réaliser toutes les opérations qui sont compatibles avec cet objet, s'y rapportent et contribuent à sa réalisation " ;
12. Considérant qu'il résulte des dispositions susmentionnées de l'article L. 711-1 du code de l'éducation applicable, lesquelles ont entendu mettre en oeuvre le principe de spécialité qui régit les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel, que l'objet des filiales pouvant être créées par les universités vise exclusivement à faire connaître les réalisations afférentes aux missions qui leur sont dévolues par l'article L. 123-3 du code de l'éducation ; que si ces dispositions permettent, notamment, de valoriser leurs activités de recherche, elles ne les autorisent pas à exercer, dans le cadre d'une filiale, des activités " de formation continue " et " de préparation intensive d'été " à l'examen d'entrée au CRFPA, qui relèvent par nature des missions statutaires principales que l'université Panthéon-Assas Paris II doit exercer, au sein, notamment, de l'IEJ et du CFP ; que, par suite, les délibérations attaquées et, par voie de conséquence, les deux décisions du 22 mai 2012, qui se rapportent toutes à un même projet de création d'une telle filiale, méconnaissent le champ d'application des dispositions de l'article L. 711-1 précité du code de l'éducation ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens, que l'université Panthéon-Assas Paris II n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a, pour ce motif, annulé ces actes administratifs ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la SARL CapAvocat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée au versement des sommes que l'université Panthéon-Assas Paris II réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a, en revanche, lieu de mettre à la charge de cette université une somme de 2 000 euros à verser à la SARL CapAvocat sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'université Panthéon - Assas Paris II est rejetée.
Article 2 : L'université Panthéon - Assas Paris II versera la somme de 2 000 euros à la SARL CapAvocat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'université Panthéon - Assas Paris II et à la SARL CapAvocat.
Délibéré après l'audience du 2 février 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller
Lu en audience publique, le 8 mars 2016.
Le rapporteur,
L. d'ARGENLIEULe président,
B. EVENLe greffier,
A. CALVAIRE
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 13PA04846