Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 3 avril 2017, M.A..., représenté par Me Besse, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1608475 du 2 mars 2017 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 6 septembre 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
S'agissant de la décision de refus de séjour :
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation, le préfet n'ayant pas tenu compte du fait qu'il vit en France aux côtés de son frère et qu'il justifie d'une excellente intégration professionnelle ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il justifie d'un parcours professionnel cohérent depuis 2013, fait état d'une durée de présence en France de plus de quatre ans, et remplit ainsi les conditions fixées par la circulaire du 28 novembre 2012, dite circulaire Valls ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- le préfet ne pouvait prononcer de décision d'obligation de quitter le territoire français à son encontre dès lors qu'il était fondé à solliciter un titre de séjour portant la mention " salarié " ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Poupineau,
- et les observations de Me Besse, avocat de M.A....
1. Considérant que M.A..., ressortissant marocain, est entré en France selon ses déclarations en juillet 2012 ; que, le 3 mars 2016, il a sollicité le bénéfice de son admission exceptionnelle au séjour, sur le fondement des stipulations de l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 et des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 6 septembre 2016, le préfet du Val-de-Marne a opposé un refus à sa demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel M. A...pourrait être reconduit d'office à la frontière à l'expiration de ce délai ; que M. A...relève appel du jugement en date du 2 mars 2017 par lequel le Tribunal administratif de Melun, après avoir procédé à une substitution du fondement légal de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de celui-ci ;
Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que le requérant se borne à reprendre en appel, sans plus de précisions ou de justifications, le moyen qu'il avait développé en première instance tiré de ce que la décision de refus de titre de séjour opposée par le préfet du Val-de-Marne n'est pas suffisamment motivée ; qu'il y a lieu d'écarter le moyen ainsi soulevé par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-de-Marne n'aurait pas procédé à un examen suffisant de la situation personnelle de M. A... avant de rejeter la demande de titre de séjour dont il était saisi ;
4. Considérant, en troisième lieu, que le requérant ne conteste pas, en appel, la substitution de base légale à laquelle le Tribunal administratif de Melun a procédé après en avoir régulièrement informé les parties, en faisant valoir que la décision de refus de titre de séjour contestée pouvait être prise sur le fondement du pouvoir discrétionnaire dont dispose le préfet pour apprécier l'opportunité d'une mesure de régularisation, et non sur celui des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne s'appliquent pas aux ressortissants marocains qui ont sollicité un titre de séjour en qualité de salarié ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté comme inopérant ;
5. Considérant, en quatrième lieu, que M. A...fait valoir que, depuis son entrée en France en 2012 il a toujours travaillé, qu'il justifie d'une qualification et d'une insertion professionnelles certaines et bénéficie du soutien de son employeur ; qu'il indique avoir exercé, de 2013 à 2015, des missions en intérim en qualité de ferrailleur et être employé, depuis le mois d'octobre 2015, par la société Active Rénovation en qualité d'ouvrier polyvalent ; que, toutefois, à la date de la décision contestée, M. A... ne vivait en France que depuis quatre ans, qu'il était célibataire et sans charge de famille et qu'il ne justifiait pas d'une intégration particulière ; qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résidaient ses parents et ses deux soeurs ; que, par suite, le préfet du Val-de-Marne n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de l'admettre exceptionnellement au séjour ;
6. Considérant, en cinquième lieu, que M. A...ne peut utilement se prévaloir des énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012, dès lors qu'elles ne constituent que des orientations générales adressées aux préfets pour la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation ;
7. Considérant, en sixième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le requérant, entré selon ses déclarations en France au cours de l'année 2012, est célibataire et sans charge de famille ; qu'à l'exception de son frère, qui est titulaire d'une carte de résident, il ne dispose d'aucune autre attache familiale sur le territoire français et qu'il n'en est, au contraire, pas dépourvu au Maroc, qu'il a quitté à l'âge de 22 ans et où résident ses parents et ses deux soeurs ; qu'enfin, il ne justifie pas d'une intégration particulière ; que, dans ces conditions, eu égard notamment aux conditions du séjour de M. A...et à la faible intensité de ses liens personnels et familiaux en France, la décision de refus de titre de séjour du préfet du Val-de-Marne n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel cette décision a été prise ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; que, pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A... ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est en tout état de cause pas fondé à soutenir que, pouvant prétendre à la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié, il ne pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ;
10. Considérant que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet du Val-de-Marne, qui reprennent les mêmes éléments que ceux développés à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 8 du présent arrêt ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 3 mai 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Poupineau, président assesseur,
- Mme Lescaut, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 mai 2018.
Le rapporteur,
V. POUPINEAULe président,
S.-L. FORMERYLe greffier,
N. ADOUANELa République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA01136