Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 31 octobre 2018, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Melun du 3 août 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 mai 2017 mentionné ci-dessus ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " membre de la famille d'un citoyen de l'Union " dans un délai de trente jours à compter de la notification de la décision à intervenir et de lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour avec la mention " autorise son titulaire à travailler " dans l'attente de la conception matérielle du titre de séjour, assortie d'une astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de la convoquer dans un délai de trente jours à compter de la notification de la décision à intervenir, aux fins de réexamen de sa demande, et de lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour avec la mention " autorise son titulaire à travailler " dans l'attente de l'instruction de son dossier, assortie d'une astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser au conseil de MmeA..., moyennant renonciation de Me B...à percevoir l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- l'arrêté est insuffisamment motivé et est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- contrairement à ce qu'a considéré le tribunal, il est également entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- il méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- les stipulations de l'article 10 de la directive 2004/38/CE relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leur famille de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres ont été méconnues.
La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 novembre 2018 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention franco-congolaise du 31 juillet 1993 relative à la circulation et au séjour des personnes ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pagès,
- et les observations de MeB..., pour Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante congolaise née le 20 juin 1993 à Brazzaville, a sollicité du préfet du Val-de-Marne la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement, notamment, des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 23 mai 2017, le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande aux motifs qu'elle n'établissait pas avoir fixé le centre de ses intérêts privés et familiaux en France ni être isolée en cas de retour dans son pays d'origine et que sa situation personnelle ne présentait pas de motif exceptionnel ni de circonstances humanitaires justifiant son admission exceptionnelle au séjour. Le préfet lui a également fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée à l'expiration de ce délai. Par un jugement du 3 août 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Mme A...relève appel de ce jugement.
2. En premier lieu, Mme A...soutient que l'arrêté est insuffisamment motivé. Cependant, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, ce dernier vise les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il est fait application et fait référence de manière circonstanciée à sa situation personnelle et familiale, sans que le préfet ne soit tenu de faire état de l'ensemble des éléments figurant dans sa demande. Dans ces conditions, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen de la situation personnelle de l'intéressée doivent être écartés.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention ''vie privée et familiale'' est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".
4. En l'absence d'élément nouveau de nature à remettre en cause le bien-fondé des motifs retenus par les premiers juges, les moyens, déjà soulevés en première instance par Mme A..., tirés de ce que le préfet aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise et de ce qu'il aurait entaché d'erreur manifeste l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de MmeA..., doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché d'erreur manifeste son appréciation de la situation de l'intéressée au regard des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. En troisième lieu et à supposer que la requérante ait entendu soutenir que les premiers juges ont commis une erreur en ne faisant pas application à sa situation de l'article 10 de la directive 2004/38/CE relative au droit des citoyens de l'Union ainsi que des membres de leur famille de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres, ce moyen ne peut qu'être écarté comme inopérant. En effet, cette directive a été transposée dans le droit national antérieurement à la date de l'arrêté contesté, aux articles L. 121-1 et suivants et R. 121-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Au demeurant, les dispositions du titre II du livre Ier de ce code, comme la directive qu'elles transposent, ne sauraient trouver à s'appliquer aux membres de la famille de citoyens de l'Union européenne lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, ces derniers ne sont pas des ressortissants d'un autre Etat venus séjourner en France, mais des ressortissants français vivant dans le pays dont ils ont la nationalité.
6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées par son avocat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 28 mai 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- M. Pagès, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 juin 2019.
Le rapporteur,
D. PAGESLe président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
P. TISSERAND
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA03454