Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lapouzade,
- les conclusions de M. Sorin, rapporteur public,
- et les observations de Me Le Prado, avocat de l'Union nationale des syndicats autonomes agriculture alimentaire (UNSA2A).
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 24 décembre 2013 pris en application des dispositions de l'article L. 2122-11 du code du travail, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a, faisant pour la première fois application des dispositions des articles L. 2121-1, L. 2122-5 à L. 2122-8 du code du travail issues de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 et de la loi n° 2010-1215 du 15 octobre 2010, établi la liste des organisations syndicales représentatives dans la convention collective de travail du personnel de la Mutualité sociale agricole (n° 7502), au nombre desquelles ne figure pas l'UNSA2A. Par la présente requête, l'UNSA2A demande l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté du 24 décembre 2013, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
2. Aux termes de l'article L. 2122-11 du code du travail : " Après avis du Haut Conseil du dialogue social, le ministre chargé du travail arrête la liste des organisations syndicales reconnues représentatives par branche professionnelle (...) en application des articles L. 2122-5 à L. 2122-10 ". Aux termes de l'article L. 2122-5 du code du travail : " Dans les branches professionnelles, sont représentatives les organisations syndicales qui : 1° Satisfont aux critères de l'article L. 2121-1 ; 2° Disposent d'une implantation territoriale équilibrée au sein de la branche ; 3° Ont recueilli au moins 8 % des suffrages exprimés résultant de l'addition au niveau de la branche, d'une part, des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires aux comités d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, et, d'autre part, des suffrages exprimés au scrutin concernant les entreprises de moins de onze salariés dans les conditions prévues aux articles L. 2122-10-1 et suivants (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier, dans le dernier état des écritures des parties, que, s'agissant de la MSA Alsace, le ministre n'a pas retenu le procès-verbal relatif aux élections du 1er collège de la caisse au motif que ce procès-verbal ne mentionnait pas le nombre des suffrages attribués aux listes des syndicats en ayant présenté dans ce collège, l'UNSA2A et la CFDT, et que celui-ci ne pouvait être recalculé à partir du nombre des suffrages recueillis par chacun des candidats de ces listes.
4. Aux termes de l'article L. 2324-22 du code du travail, dans sa version alors en vigueur : " Le scrutin est de liste à deux tours avec représentation proportionnelle à la plus forte moyenne. Au premier tour de scrutin, chaque liste est établie par les organisations syndicales mentionnées aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 2324-4. Si le nombre des votants est inférieur à la moitié des électeurs inscrits, il est procédé, dans un délai de quinze jours, à un second tour de scrutin pour lequel les électeurs peuvent voter pour des listes autres que celles présentées par une organisation syndicale. Lorsque le nom d'un candidat a été raturé, les ratures ne sont pas prises en compte si leur nombre est inférieur à 10% des suffrages exprimés en faveur de la liste sur laquelle figure ce candidat. Dans ce cas, les candidats sont proclamés élus dans l'ordre de présentation ".
5. Selon le syndicat requérant, la colonne 3 du procès-verbal en cause portant l'intitulé " Nombre de bulletins valables recueillis par chaque liste " se remplit par le nombre des voix qui se sont portées sur le candidat ayant obtenu le plus de voix qui figure dans la colonne 4 portant l'intitulé " Total des voix recueillies par les candidats de chaque liste ". Ainsi, le procès-verbal est exploitable.
6. Il résulte des dispositions de l'article L. 2324-22 du code du travail précitées que dès lors que ces dispositions mettent en place un scrutin de liste et que le raturage du nom d'un des candidats inscrits sur une liste n'a d'effet, dès lors que les ratures sont prises en compte parce que leur nombre est égal ou supérieur à 10% des suffrages exprimés en faveur de la liste sur laquelle figure ce candidat, que sur l'ordre de proclamation des élus de la liste. Par définition, dans un tel dispositif, le nombre des voix obtenues par une liste sera nécessairement égal ou supérieur au nombre de voix obtenu par le candidat de cette liste qui aura obtenu le plus de voix. Egal dans l'hypothèse où le nom de ce candidat n'a été raturé sur aucun des bulletins exprimés au profit de la liste, sinon inférieur. La liste UNSA2A a donc obtenu pour le moins 122 bulletins en sa faveur, qui est donc le chiffre maximum obtenu par l'un des candidats de cette liste, tel qu'il figure à la colonne 3 du procès-verbal. La prise en compte des suffrages valablement exprimés dans le cadre des élections du 1er collège MSA Alsace, 122 en faveur de l'UNSA2A et 48 en faveur de la CFDT, correspondant aux suffrages des candidats de ces listes ayant obtenu le plus de voix sur leur nom, aboutit à ce que le seuil des 8% de suffrages pour l'UNSA2A soit atteint de ce seul fait, indépendamment même du sort à réserver aux autres contestations du syndicat requérant, relatives notamment aux résultats de CIMA-EST et de la MSA Armorique.
7. Compte tenu de ce qui vient d'être dit, la prise en compte des voix obtenus par le candidat de chacune des listes en présence ayant obtenu le plus de suffrage, si elle implique une approximation, n'est pas, en elle-même, de nature à fausser le résultat des élections dès lors que cette prise en compte s'applique à l'ensemble des candidats des listes en présence. L'absence de prise en compte du procès-verbal dont s'agit, du fait de l'irrégularité qui l'entachait, faute pour ce procès verbal de mentionner le nombre des suffrages obtenus par les listes en présence, a eu pour effet de fausser spécifiquement la mesure de l'audience de l'UNSA2A et d'empêcher son inscription sur la liste des organisations syndicales représentatives.
8. Il résulte de ce qui précède que l'arrêté du 24 décembre 2013 établissant la liste des organisations syndicales représentatives dans la convention collective de travail du personnel de la Mutualité sociale agricole (n° 7502) doit, dans son intégralité, être annulé.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à l'Union nationale des syndicats autonomes agriculture alimentaire (UNSA2A) au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : L'arrêté du ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social du 24 décembre 2013 est annulé.
Article 2 : L'Etat versera à l'Union nationale des syndicats autonomes agriculture alimentaire (UNSA2A) une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'Union nationale des syndicats autonomes agriculture alimentaire (UNSA2A), au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, à la Confédération française démocratique du travail (CFDT), à la Confédération générale du travail (CGT), à la Confédération générale du travail - Force ouvrière (CGT-FO), à la Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres (CFE-CGC) et à la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC).
Délibéré après l'audience du 15 février 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président,
- M. Luben, président-assesseur,
- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 7 mars 2016.
Le président rapporteur,
J. LAPOUZADELe président assesseur,
I. LUBEN
Le greffier,
A. CLEMENTLa République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA00966