Procédure devant la Cour :
Par une requête en date du 23 mars 2017, l'UDAF du Puy-de-Dôme, agissant en tant que tuteur de M. B... A..., a demandé à la commission centrale d'aide sociale de réformer la décision de la commission départementale d'aide sociale du Puy-de-Dôme et d'admettre M. A... à l'aide sociale pour la prise en charge de ses frais d'hébergement à compter du 1er octobre 2015.
Elle soutient que :
- les ressources de M. A..., qui s'élèvent à une pension de retraite d'un montant de 1 165,91 euros et à 76,58 euros d'intérêts de placement, sont insuffisantes pour couvrir ses dépenses qui s'élèvent à 2 081,23 euros par mois ;
- il convient, pour l'appréciation de ses ressources, de prendre en compte les revenus du capital, et non le capital lui-même ;
- en application de l'article L. 132-8 du code de l'action sociale et des familles, le département peut, au décès du bénéficiaire, exercer un droit de recours sur la succession.
Par un mémoire enregistré le 12 juin 2017, le président du conseil départemental du Puy-de-Dôme a demandé le rejet du recours introduit par l'UDAF du Puy-de-Dôme.
Il soutient que :
- en laissant 15 000 euros de valeurs mobilières disponibles à M. A..., les liquidités restantes de 15 982,72 euros associées à ses ressources lui permettent de couvrir ses frais de placement pendant 21 mois environ ;
- le département, eu égard à la déduction susmentionnée de 15 000 euros sur les liquidités dont dispose M. A..., ne démunit pas ce dernier ;
- le principe du bon usage des deniers publics doit être pris en compte ;
- la possibilité de récupération sur la succession est purement théorique.
Par un mémoire enregistré le 28 octobre 2020, le président du conseil départemental du Puy-de-Dôme a demandé à la Cour de prononcer le non-lieu à statuer sur les conclusions de l'UDAF du Puy-de-Dôme et, dans l'hypothèse où celle-ci viendrait à présenter son désistement dans cette affaire, de bien vouloir en prendre acte.
Il soutient que :
- il ressort des pièces du dossier après rapprochement du département auprès de l'EPHAD que M. A... est décédé le 14 octobre 2019 ; l'UDAF du Puy-de-Dôme s'est donc trouvée dessaisie des intérêts de celui-ci à la date de son décès.
En application de l'article 12 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 et du décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018, le dossier de la requête susvisée a été transféré à la Cour administrative d'appel de Paris, où elle a été enregistrée le 2 janvier 2019 sous le n° 19PA00359.
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de la sécurité sociale ;
- la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 ;
- le décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 ;
- le code de justice administrative ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 3 décembre 2020 :
- le rapport de Mme C..., magistrat honoraire,
- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public.
1. Il résulte de l'instruction que M. A..., décédé le 14 octobre 2019, avait été admis à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes à compter du 19 novembre 2014. Le juge des tutelles du tribunal de grande instance avait placé M. A... sous tutelle par jugement du 8 juillet 2015 et désigné l'UDAF du Puy-de-Dôme comme tuteur de celui-ci. L'UDAF du Puy-de-Dôme a demandé l'admission de M. A... à l'aide sociale à l'hébergement, qui a été refusée par le département du Puy-de-Dôme par décision du 19 septembre 2016. L'UDAF du Puy-de-Dôme demande l'annulation de la décision de la commission départementale d'aide sociale du Puy-de-Dôme du 8 février 2017 qui a rejeté son recours contre la décision du président du conseil départemental, ensemble cette décision, et de prononcer l'admission de M. A... à l'aide sociale.
2. Aux termes de l'article L. 113-1 du code de l'action sociale et des familles : " Toute personne âgée de soixante-cinq ans privée de ressources suffisantes peut bénéficier soit d'une aide à domicile, soit d'un placement chez des particuliers ou dans un établissement " ; à cette fin, conformément à l'article L. 132-1 de ce même code : " Il est tenu compte, pour l'appréciation des ressources des postulants à l'aide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu, qui est évaluée dans les conditions fixées par voie réglementaire ".
3. Il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu tenir compte, pour apprécier les ressources des personnes demandant l'aide sociale, des seuls revenus périodiques, tirés notamment d'une activité professionnelle, du bénéfice d'allocations ou rentes de solidarité instituées par des régimes de sécurité sociale ou des systèmes de prévoyance et des revenus des capitaux mobiliers et immobiliers ; à défaut de placement de ces derniers, dès lors qu'il ne s'agit pas de l'immeuble servant d'usage principal d'habitation, il a prévu d'évaluer forfaitairement les revenus que l'investissement de ces capitaux serait susceptible de procurer au demandeur ; en tout état de cause, il a écarté la prise en compte du montant des capitaux eux-mêmes dans l'estimation de ces ressources.
4. Une demande d'aide sociale pour la prise en charge des frais d'hébergement a été déposée pour M. A... à compter du 1er novembre 2015. Le président du conseil départemental du Puy-de-Dôme a rejeté cette demande au regard de la situation financière de M. A.... La commission départementale d'aide sociale du Puy-de-Dôme a confirmé la décision au motif que, compte tenu du montant de ses capitaux, M. A... avait les capacités financières pour subvenir au coût de son placement.
5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... disposait de pensions de retraite et de revenus fonciers d'un montant total mensuel de 1 263,46 euros, ainsi que de 76,58 euros d'intérêts de placement, soit un montant total de revenus de 1 340,04 euros. Après déduction de ses frais de mutuelle pour 28 euros, l'assiette de ressources sur laquelle s'impute la contribution de 90% s'élevait à 1 312,04 euros. M. A... disposait ainsi d'un montant à consacrer à ses frais d'hébergement de 1 180,83 euros par mois. Le coût de son hébergement atteignait le montant mensuel de 1 926,89 euros. Les ressources de M. A... ne lui permettaient donc pas de régler ces frais d'hébergement.
6. Il s'ensuit qu'il y a lieu d'annuler ensemble les décisions du président du conseil départemental du Puy-de-Dôme du 19 septembre 2016 et de la commission départementale d'aide sociale du Puy-de-Dôme du 8 février 2017 et d'admettre M. A... à l'aide sociale à compter du 1er novembre 2015 et jusqu'à la date de son décès.
D É C I D E :
Article 1er : Sont annulées les décisions du président du conseil départemental du Puy-de-Dôme du 19 septembre 2016 et de la commission départementale d'aide sociale du Puy-de-Dôme du 8 février 2017.
Article 2 : M. A... est admis au bénéfice de l'aide sociale pour la prise en charge de ses frais d'hébergement à compter du 1er novembre 2015 et jusqu'à la date de son décès. L'Union départementale des associations familiales (UDAF) du Puy-de-Dôme et les ayants-droit de M. A... sont renvoyés devant le président du conseil départemental du Puy-de-Dôme pour la liquidation de leurs droits.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'Union départementale des associations familiales (UDAF) du Puy-de-Dôme ès qualités de tuteur de feu M. B... A..., aux ayants-droit de M. A... et au président du conseil départemental du Puy-de-Dôme.
Copie en sera adressée au ministre des solidarités et de la santé.
Délibéré après l'audience du 3 décembre 2020 à laquelle siégeaient :
- Mme Vinot, président de chambre,
- M. Luben, président assesseur,
- Mme C..., magistrat honoraire.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2020.
La présidente de la 8ème chambre,
H. VINOT
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
1
N° 08PA04258
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N° 19PA00359