Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 25 juillet 2017 et le 4 juillet 2018, Mme A..., représentée par Me Sebban, doit être regardée comme demandant à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler le jugement n° 1600113/3-2 du 9 juin 2017 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les articles 3 et 4 de la décision du préfet de la région
Ile-de-France, préfet de Paris en date du 30 octobre 2015 en tant qu'ils mettent à sa charge solidaire, en tant que dirigeante de fait de la société Unigram, le versement des sommes de 555 634, 67 euros et de 986 446, 22 euros au Trésor public ;
3°) d'ordonner la décharge des sommes figurant sur l'avis de mise en recouvrement notifié le 20 décembre 2016 ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris ne pouvait légalement la regarder comme gérante de fait de la SARL Unigram dès lors qu'aucun des éléments relevés dans la décision contestée du 30 octobre 2015 n'est de nature à caractériser une situation de gérance de fait, c'est-à-dire des actes positifs de gestion et de direction ; il en va ainsi des liens juridiques et capitalistiques entre les SARL Unigram, Group Form et Esic, du statut et des compétences des personnes présentes lors des opérations de contrôle, de la prétendue dissimulation de sa participation auprès de l'organisme paritaire collecteur agréé (OCPA) fonds d'assurance formation ingénierie et conseil (FAFIEC) comme de la prétendue confusion des activités et directions des sociétés Unigram et Esic ; elle n'apporte qu'une aide ponctuelle et technique dans le cadre d'une entraide familiale à l'entreprise de son époux ;
- l'avis de mise en recouvrement notifié le 20 décembre 2016 comporte une indication erronée quant à la nature de l'imposition mise en recouvrement, en méconnaissance de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 décembre 2017, la ministre du travail, conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 30 mai 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 5 juillet 2018.
Par courrier du 19 décembre 2018, les parties ont été informées, par application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions à fin de décharge des sommes figurant sur l'avis de mise en recouvrement notifié le 20 décembre 2016.
Mme A... a présenté des observations sur le moyen relevé d'office par la Cour le 2 janvier 2019.
Elle soutient qu'elle est recevable à invoquer pour la première fois en appel l'inexistence juridique de l'avis de mise en recouvrement, moyen d'ordre public.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Guilloteau,
- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,
- et les observations de Me Sebban, avocat de Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. La société Unigram, qui a fait enregistrer une déclaration d'activité portant sur la réalisation de formation professionnelle continue, a fait l'objet en 2014 d'un contrôle portant sur les exercices comptables 2012 et 2013. Au terme de ce contrôle, le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris a, par une première décision du 15 juin 2015, ordonné à la société le versement au Trésor public de diverses sommes et a annulé l'enregistrement de sa déclaration d'activité. Le préfet, saisi du recours préalable obligatoire prévu à l'article R. 6362-6 du code du travail, a, le 30 octobre 2015, pris une nouvelle décision mettant à la charge de la société Unigram solidairement avec son dirigeant de droit, M. B...A..., et sa dirigeante de fait, Mme C...A..., dans son article 3, la somme de 555 634, 67 euros pour avoir engagé des dépenses dont la réalité et le lien avec l'activité de formation professionnelle continue n'étaient pas établis, sur le fondement de l'article L. 6362-7 du code du travail et, dans son article 4, la somme de 986 446, 22 euros pour avoir établi et utilisé des documents portant des mentions inexactes en vue d'obtenir indûment paiement de formations, sur le fondement de l'article L. 6362-7-2 du même code. Par la présente requête, Mme A...demande l'annulation du jugement n° 1600113/3-2 du 9 juin 2017 du Tribunal administratif de Paris rejetant ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 30 octobre 2015 en tant qu'elle la désigne comme gérante de fait et responsable solidaire de la société Unigram.
Sur les conclusions à fin de décharge :
2. Les conclusions présentées par Mme A...tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme qui figurerait dans un avis de mise en recouvrement notifié le 20 décembre 2016 n'ont pas été soumises aux premiers juges. Elles ont ainsi le caractère de conclusions nouvelles en cause d'appel et sont, par suite, irrecevables.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. D'une part, aux termes de l'article L. 6362-5 du code du travail : " Les organismes mentionnés à l'article L. 6361-2 sont tenus, à l'égard des agents de contrôle mentionnés à l'article L. 6361-5 : / 1° De présenter les documents et pièces établissant l'origine des produits et des fonds reçus ainsi que la nature et la réalité des dépenses exposées pour l'exercice des activités conduites en matière de formation professionnelle continue ; / 2° De justifier le rattachement et le bien-fondé de ces dépenses à leurs activités ainsi que la conformité de l'utilisation des fonds aux dispositions légales régissant ces activités. / A défaut de remplir ces conditions, les organismes font, pour les dépenses considérées, l'objet de la décision de rejet prévue à l'article L. 6362-10. ". Aux termes de l'article L. 6362-7 du même code : " Les organismes prestataires d'actions de formation entrant dans le champ de la formation professionnelle continue au sens de l'article L. 6313-1 versent au Trésor public, solidairement avec leurs dirigeants de fait ou de droit, une somme égale au montant des dépenses ayant fait l'objet d'une décision de rejet en application de l'article L. 6362-10. ".
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 6362-7-2 du code du travail : " Tout employeur ou prestataire de formation qui établit ou utilise intentionnellement des documents de nature à éluder l'une de ses obligations en matière de formation professionnelle ou à obtenir indûment le versement d'une aide, le paiement ou la prise en charge de tout ou partie du prix des prestations de formation professionnelle est tenu, par décision de l'autorité administrative, solidairement avec ses dirigeants de fait ou de droit, de verser au Trésor public une somme égale aux montants imputés à tort sur l'obligation en matière de formation ou indûment reçus. ".
5. Par sa décision du 30 octobre 2015, le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris a estimé que Mme A...devait être regardée comme gérante de fait de la société Unigram pour l'application des dispositions précitées des articles L. 6362-7 et L. 6362-7-2 du code du travail, compte tenu des liens juridiques et capitalistiques constatés entre la société contrôlée, la société Esic et la société Group Form, de la confusion des intérêts et du montage juridique mis en place visant à dissimuler auprès de l'organisme paritaire collecteur agréé (OPCA) l'intervention de la société Esic, qui conduit les actions de formation pour le compte de la société Unigram ainsi que des fonctions exercées dans l'une et l'autre des entreprises par MmeA....
6. En premier lieu, pour regarder Mme A...comme dirigeante de fait de la société Unigram, le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris s'est fondé sur un faisceau d'éléments. La requérante n'est par suite pas fondée à soutenir que la décision attaquée serait entachée d'erreurs de droit au motif qu'elle la regarderait comme dirigeante de fait du seul fait des liens juridiques et capitalistiques entre les sociétés, de la situation des salariés présents lors des opérations de contrôle, de l'incapacité de ces personnes à répondre aux interrogations des agents de contrôles, de la dissimulation de son intervention personnelle auprès de l'OPCA et de la confusion des activités et de la direction des sociétés Unigram et Esic.
7. En second lieu, Mme A...se borne à reproduire en appel, sans l'assortir d'éléments nouveaux, le moyen développé dans sa demande de première instance et tiré d'une erreur d'appréciation quant à une situation de gestion de fait. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter ce moyen repris en appel par la requérante.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A...et à la ministre du travail.
Délibéré après l'audience du 17 janvier 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président,
- M. Luben, président assesseur,
- Mme Guilloteau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 janvier 2019.
Le rapporteur,
L. GUILLOTEAULe président,
J. LAPOUZADE
Le greffier,
Y. HERBER La République mande et ordonne à la ministre du travail en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA02570