Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 décembre 2019, Mme C..., représentée par Me Saidi, avocat, demande à la cour :
1° d'annuler le jugement attaqué ;
2° d'annuler l'arrêté attaqué ;
3° d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour temporaire dans un délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et dans l'attente de lui délivrer un récépissé assorti d'une autorisation de travail, et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans ce même délai, et de lui délivrer un récépissé avec autorisation de travail.
4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier, dès lors qu'il n'a pas été signé par le magistrat désigné ;
- sa situation doit être appréciée au regard de celle de son mari qui a fait l'objet d'un jugement du tribunal administratif de Paris annulant la décision portant obligation de quitter le territoire français le concernant, eu égard à la sclérose en plaque dont elle est atteinte ;
- la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;
- elle ne pourra avoir accès à un traitement pour la sclérose en plaque dont elle souffre dans son pays d'origine, dès lors qu'elle établit que le traitement qui lui a été prescrit n'est pas disponible en Géorgie.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le décret n° 2020-1404 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience en application des dispositions de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... C..., ressortissante géorgienne, née le 20 janvier 1988, a formulé une demande d'asile fondée sur les dispositions de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sa demande a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) dans le cadre de la procédure accélérée prévue par les dispositions de l'article L. 723-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par une décision du 16 mai 2019. Par un arrêté du 28 juin 2019, le préfet de police l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme C... relève appel du jugement du 26 novembre 2019, par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 28 juin 2019.
Sur les conclusions à fin d'annulation, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
2. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... est atteinte de sclérose en plaque, diagnostiquée en avril 2019, et qu'elle suit un traitement à base de Plegridy 125 mg. La requérante produit, par ailleurs, la traduction d'un courrier du 23 août 2019 adressé par l'agence du médicament de la Géorgie indiquant que le Plegridy 125 mg n'est pas disponible sur le marché pharmaceutique géorgien. Si le préfet de police a fait valoir devant le magistrat désigné du tribunal administratif de Versailles que la molécule essentielle de ce médicament était disponible et distribuée gratuitement en Géorgie, les documents produits au soutien de ses allégations, sont relatifs à des molécules utilisées dans le traitement des hépatites et autres affections du foie ainsi qu'à un institut privé spécialisé dans la phagothérapie, traitement alternatif des infections bactériennes chroniques difficiles. Par suite, aucun de ces éléments n'est de nature à établir que la requérante pourrait effectivement bénéficier d'un traitement adapté à sa pathologie en cas de retour en Géorgie. Dans ces conditions, le préfet de police a entaché son arrêté du 28 juin 2019 d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme C....
3. Il résulte de ce qui précède que Mme C... est fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 28 juin 2019 par lequel le préfet de police l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
4. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ".
5. En application des dispositions précitées, il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de procéder au réexamen de la situation de Mme C... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de la munir, dans l'attente de ce réexamen, d'une autorisation provisoire de séjour.
Sur les frais d'instance :
6. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros, à verser à Mme C..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1907032 du 26 novembre 2019 du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 28 juin 2019 par lequel le préfet de police a obligé Mme C... à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la situation de Mme C..., dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, et de délivrer à Mme C..., dans l'attente de ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : L'Etat versera à Mme C... la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
N° 19VE04213 2