Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 28 octobre 2017, MmeB..., représentée par Me Bertrand, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler cette ordonnance ;
2° d'annuler la décision implicite de rejet du préfet de la Seine-Saint-Denis ;
3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer le titre de séjour sollicité ;
4° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation de séjour sans délai ;
5° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme B...soutient que :
- la requête devant le Tribunal administratif de Montreuil n'était pas tardive, dans la mesure où le préfet de la Seine-Saint-Denis n'ayant pas répondu à sa demande de communication des motifs de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé sur sa demande de titre de séjour, le délai de recours contentieux n'a pas couru ;
- cette décision implicite de rejet est, en l'absence de communication de ses motifs, entachée d'illégalité ;
- le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas procédé à l'examen particulier de sa demande de titre de séjour.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guével,
- et les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. MmeB..., ressortissante marocaine, a sollicité le 2 janvier 2017 la délivrance d'un titre de séjour auprès du préfet de la Seine-Saint-Denis. Elle relève appel de l'ordonnance n° 1708758 en date du 13 octobre 2017 par laquelle le premier vice-président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête enregistrée le 30 septembre 2017 tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet opposée à sa demande.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
2. D'une part, aux termes de l'article R. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le silence gardé par l'administration sur les demandes de titres de séjour vaut décision implicite de rejet. ". Aux termes de l'article R. 311-12-1 du même code : " La décision implicite mentionnée à l'article R. 311-12 naît au terme d'un délai de quatre mois. ".
3. D'autre part, aux termes de l'article R. 421-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet./(...). ".
4. Enfin, aux termes de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués ". Il résulte de ces dispositions que le silence gardé pendant plus d'un mois sur une demande de communication des motifs d'une décision implicite de rejet, intervenue dans un cas où une décision explicite aurait dû être motivée, n'a pas pour effet de faire naître une nouvelle décision, détachable de la première et pouvant faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, mais permet seulement à l'intéressé de se pourvoir sans condition de délai contre la décision implicite initiale qui, en l'absence de communication de ses motifs, se trouve entachée d'illégalité.
5. Il ressort des pièces du dossier que la demande de titre de séjour que Mme B...a présentée le 2 janvier 2017 a fait naître quatre mois plus tard, le 2 mai 2017, une décision implicite de rejet. Cette décision est intervenue dans un cas où la décision explicite de refus de délivrance d'un titre de séjour, qui est une mesure de police, aurait dû être motivée. Mme B... a alors sollicité la communication des motifs de cette décision implicite de rejet par courrier du 30 juin 2017 reçu par les services préfectoraux par télécopie le même jour et par lettre recommandée avec accusé de réception le 3 juillet 2017, premier jour ouvré, soit dans le délai de recours contentieux prévu à l'article R. 421-2 du code de justice administrative et mentionné à l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration. Le silence gardé pendant plus d'un mois sur cette demande de communication des motifs de la décision implicite de rejet permettait à l'intéressée de se pourvoir sans condition de délai contre cette décision implicite. Il s'ensuit que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge de première instance a rejeté sa demande comme irrecevable. Cette ordonnance doit, dès lors, être annulée.
6. Par voie de conséquence, il y a lieu de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur la demande de MmeB....
Sur la légalité de la décision implicite de rejet :
7. Il résulte de ce qui est dit au point 4 qu'en l'absence de communication des motifs de la décision implicite de refus de titre de séjour, cette décision se trouve entachée d'illégalité. Il y a donc lieu de l'annuler sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".
9. L'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que soit accordé à Mme B...un titre de séjour. Dès lors, ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer ce titre doivent être rejetées. L'annulation prononcée implique seulement que le préfet de la Seine-Saint-Denis, après avoir muni Mme B...d'une autorisation provisoire de séjour, procède à un nouvel examen de la situation de l'intéressée, dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.
Sur les frais liés au litige :
10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à Mme B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 1708758 du 13 octobre 2017 du Tribunal administratif de Montreuil et la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par préfet de la Seine-Saint-Denis sur la demande de titre de séjour de Mme B...sont annulées.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à Mme B...une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Mme B...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par Mme B...est rejeté.
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N° 17VE03226