Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés respectivement le 6 janvier 2015 et le 30 novembre 2015, M. et MmeB..., représentés par Me Jesslen, avocat, demandent à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de les décharger de tout ou partie des impositions supplémentaires contestées, y compris les majorations pour manquement délibéré correspondantes ;
3° de leur accorder le bénéfice des dispositions de l'article L. 277 du livre de procédures fiscales en attente d'une décision définitive ;
4° de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. et Mme B...soutiennent que :
- la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité en raison du non-respect du principe du dialogue contradictoire résultant des dispositions des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales ; aucun dialogue réel n'a pu avoir lieu à la suite de la demande d'éclaircissements ou de justifications du 17 juillet 2009, alors que la jurisprudence exige un tel débat dans le cadre même de cette procédure ; la " réunion de synthèse " du 22 octobre 2009 n'a en fait consisté qu'en une remise de documents au vérificateur, sur lesquels un réel débat n'a pu avoir lieu ;
- la procédure d'imposition est également irrégulière du fait du non-respect de la règle dite " du double " dégagée par la jurisprudence, dès lors que dès le stade de la vérification, il avait été justifié du caractère évidemment non imposable de certains crédits bancaires, qui ont donc été à tort pris en compte par le vérificateur pour estimer qu'il pouvait, par application de l'article L. 16 du livre de procédures fiscales, leur adresser une demande d'éclaircissements ou de justifications ; en l'absence de ces crédits bancaires évidemment non imposables, tels que des virements de compte à compte, la discordance entre les crédits bancaires restants et les revenus déclarés est inférieure au double ;
- dès lors qu'ils apportent, par les pièces versées au dossier, la justification de la nature et de l'origine de la majeure partie des crédits qualifiés de revenus d'origine indéterminée, seules les sommes de 17 725,94 euros, pour 2006, et 17 616,75 euros, pour 2007, peuvent rester imposables selon cette qualification ;
- en l'absence de toute intention d'éluder l'impôt, la majoration de 40 % pour manquement délibéré qui leur a été infligée sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts est infondée.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre de procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bergeret,
- les conclusions de M. Coudert, rapporteur public,
- et les observations de Me Jesslen, pour M. et MmeB.obscur
1. Considérant que M. et Mme B...ont fait l'objet d'un examen de leur situation fiscale personnelle portant sur les années 2006 et 2007 ; qu'à l'issue de ce contrôle, des rappels en matière de revenus de capitaux mobiliers, de traitements et salaires et de revenus d'origine indéterminée, assortis de la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue à l'article 1729 du code général des impôts, leur ont été notifiés par une proposition de rectification du 20 novembre 2009 ; que M. et Mme B...relèvent régulièrement appel du jugement du 6 novembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires mises à leur charge sur ces bases ;
Sur les conclusions aux fins de décharge des impositions :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant, en premier lieu, que le caractère contradictoire que doit revêtir l'examen de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu en vertu des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales interdit au vérificateur d'adresser une proposition de rectification, qui marque l'achèvement de son examen, sans avoir au préalable engagé un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les points qu'il envisage de retenir ; qu'il résulte de l'instruction que, après la réception, le 19 février 2009, de l'avis d'examen de leur situation fiscale personnelle, les contribuables ont pu s'entretenir avec le vérificateur lors de deux
rendez-vous, le 2 avril 2009 et le 7 mai 2009 ; qu'un troisième entretien, prévu le 28 mai puis reporté à la demande de M. B...au 1er juillet, n'a pu avoir lieu du fait de l'absence des contribuables, ce qui n'est pas utilement contredit par ceux-ci ; que le vérificateur, après avoir exercé son droit de communication auprès des établissements bancaires où les intéressés disposaient d'un compte, et auprès de l'employeur de MmeB..., leur a alors adressé, le
17 juillet 2009, une demande aux fins de produire dans un délai de deux mois, sur le fondement de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, des éclaircissements et justifications sur l'origine et la nature de nombreux crédits bancaires constatés sur leurs comptes ; que les contribuables n'ont pas répondu à cette demande dans le délai imparti, ni au terme de la prolongation du délai de réponse qui leur a été accordée sur leur demande jusqu'au 2 octobre ; qu'ils ont cependant apporté des éléments de réponse lors d'un entretien de synthèse qui s'est tenu avec le vérificateur le 22 octobre 2009, au cours duquel, selon les termes non utilement démentis de la proposition de rectification, un débat oral a eu lieu, le vérificateur acceptant d'ailleurs à cette occasion une partie des explications données par les contribuables sur l'origine et la nature de certains des crédits bancaires initialement regardés comme susceptibles d'être taxés comme revenus d'origine indéterminée ; que dans ces circonstances, qui révèlent que le vérificateur, à tous les stades de la procédure précédant la proposition de rectification, a recherché un débat réel avec les contribuables, ceux-ci ne sont pas fondés à soutenir que la procédure de vérification aurait été irrégulière du fait d'une méconnaissance de l'exigence d'un dialogue contradictoire au cours des opérations de vérification en particulier après l'envoi de la demande de justifications ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable aux années en litige : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. Elle peut, en outre, lui demander des justifications au sujet de sa situation et de ses charges de famille, des charges retranchées du revenu net global ou ouvrant droit à une réduction d'impôt sur le revenu en application des articles 156 et 199 septies du code général des impôts, ainsi que des avoirs ou revenus d'avoirs à l'étranger (...) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (...) Les demandes visées aux alinéas précédents doivent indiquer explicitement les points sur lesquels elles portent et mentionner à l'intéressé le délai de réponse dont il dispose en fonction des textes en vigueur " ;
4. Considérant que ces dispositions permettent à l'administration de demander au contribuable des justifications sur l'origine de crédits apparaissant sur ses comptes bancaires ou courants, dès lors qu'elle a constaté un écart au minimum égal au double entre l'ensemble des crédits figurant sur ses comptes et ses revenus bruts déclarés, et ne l'obligent pas à procéder à un examen critique préalable de ses crédits ni, quand elle l'a fait, à se référer comme terme de comparaison aux seuls crédits dont l'origine n'est pas justifiée après le premier examen ; qu'elles impliquent seulement que l'administration fiscale exclue du montant des crédits pris en compte pour la comparaison, sans avoir à procéder à un examen critique préalable de ces crédits, les simples mouvements de compte à compte qui se neutralisent ; que cette règle dite " du double " s'apprécie pour chacune des années de la période contrôlée, l'administration n'étant tenue de retenir au titre des revenus, pour apprécier ce rapport, que les sommes effectivement déclarées par le contribuable ;
5. Considérant qu'il ressort de l'instruction que les revenus brut déclarés par
M. et Mme B...se montaient à 17 389 euros au titre de l'année 2006 et à 26 269 euros au titre de l'année 2007 ; que le vérificateur a relevé sur les comptes bancaires des intéressés des versements d'un montant total brut de 71 075 euros et de 92 502 euros ; qu'il a estimé que, déduction faite de virements de compte à compte, d'opérations annulées, de remboursements de trop-perçus, et de divers crédits lui étant apparus immédiatement comme non imposables, ces crédits bancaires devaient être retenus à hauteur de 56 133 euros et 82 017 euros pour l'appréciation de l'importance de l'écart ; que la discordance ainsi constatée, de plus du double entre les revenus déclarés et les crédits bancaires " nets ", l'autorisait à adresser aux contribuables une demande de justifications sur le fondement des dispositions précitées du livre des procédures fiscales ;
6. Considérant que M. et MmeB..., pour contester l'exacte application ainsi faite des dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, se bornent devant la Cour à faire valoir que les crédits bancaires " nets " devraient être fixés à 33 673 euros au titre de l'année 2006 et 45 364 euros au titre de l'année 2007, révélant ainsi un écart insuffisant pour la mise en oeuvre d'une demande d'éclaircissements et de justifications ; que, ce faisant, ils soutiennent que pour déterminer les crédits bancaires " nets ", devaient être déduits des crédits bancaires " bruts ", non seulement diverses sommes, telles que celles dont le vérificateur a accepté d'admettre, après examen critique, qu'elles correspondaient à des remboursements de frais d'hébergement versés par leurs deux enfants majeurs, mais aussi le montant de leurs revenus déclarés sur chacune des deux années ; que dès lors que ni ces derniers revenus, ni les sommes qui n'ont pu être regardées comme ne relevant pas de la qualification de revenus d'origine indéterminée qu'après un examen critique préalable, ne doivent en application des principes résumés au point 4 ci-dessus être ainsi déduits des crédits bancaires " bruts " pour la détermination de l'écart permettant la mise en oeuvre d'une demande de justification sur le fondement des dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales,
M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que la procédure d'imposition aurait été irrégulière au regard de ces dispositions ;
En ce qui concerne le bien-fondé des rappels en matière de traitements et salaires et en matière de revenus de capitaux mobiliers :
7. Considérant que M. et MmeB..., alors même qu'ils contestent l'ensemble des rappels mis à leur charge, ne présentent aucun moyen portant sur le bien-fondé des rappels d'impôt sur le revenu qui leur sont réclamés dans la catégorie des traitements et salaires et dans celle des revenus de capitaux mobiliers ; que, par suite, leurs conclusions relatives à ces impositions ne peuvent qu'être rejetées ;
En ce qui concerne le bien-fondé des rappels en matière de revenus d'origine indéterminée :
8. Considérant qu'en vertu des articles L. 192, L. 193 et R. 193-1 du livre des procédures fiscales, il incombe au contribuable taxé d'office en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 de démontrer le caractère exagéré de l'imposition ; que tel est le cas de M. et MmeB... ;
9. Considérant que M. et Mme B...soutiennent qu'un certain nombre de sommes qualifiées par l'administration de revenus d'origine indéterminée figurant aux crédits de leurs comptes bancaires ont été regardées à tort, au vu de leurs explications et des pièces qu'ils versent au dossier, établissant selon eux l'origine et la nature de ces crédits bancaires, comme taxables en tant que revenus d'origine indéterminée ;
10. Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que les crédits bancaires provenant des enfants de M. et Mme B...n'ont finalement pas été regardés par l'administration fiscale comme constitutifs de revenus d'origine indéterminée, et que ceux-ci ne sont donc pas fondés à demander que les sommes correspondantes soient exclues des bases du rappel contesté ; que, par ailleurs, M. et MmeB..., en se bornant à lister les montants, dates et modalités de paiement, avec l'indication de certains des acheteurs, des diverses ventes d'objets, de meubles ou de matériaux de construction d'occasion qu'ils auraient vendus lors de " vide-greniers " pour 12 500 euros en 2006 et 13 716,07 euros en 2007, qui proviendraient de leur famille ou de récupérations faites à l'occasion de travaux de rénovation de leur pavillon, ne démontrent pas comme il leur incombe la nature et l'origine des versements ainsi allégués, pour partie d'ailleurs faits en espèces ; que le descriptif, les plans sommaires et les photos qu'ils produisent devant la Cour ne permettent d'ailleurs pas d'établir que les divers matériaux de construction qu'ils auraient vendus, dont certains, tels que des poutres en chêne, apparaissent peu en rapport avec le style et la date de construction de leur pavillon, avaient cette provenance ; que s'ils soutiennent également que, pour un montant total de 14 830,07 euros en 2007, les versements taxés en tant que revenus d'origine indéterminée seraient des remboursements d'achats de matériaux faits par M. B...pour le compte de l'entreprise Dias, pour un chantier " Malik ", les pièces versées au dossier sur ce point, si elles permettent pour partie de retracer des achats de matériaux de chantier faits par M.B..., n'établissent pas, en revanche, que l'entreprise Dias, ou même des tiers, lui aurait effectivement remboursé ces achats au moyen des versements, par chèque ou en liquide, constatés par le vérificateur sur les comptes bancaires, les dates et montants de ces remboursements ne concordant pas avec les achats ; que si
M. et Mme B...soutiennent encore qu'un chèque de 300 euros, encaissé le 9 février 2006, serait un cadeau d'anniversaire de Mme A..., qu'un chèque de 500 euros encaissé le
21 février 2006 correspondrait à la vente de deux vélos et d'un banc de musculation à un acheteur dont le nom est précisé, qu'un autre chèque de 500 euros correspondrait au remboursement d'achats de carburant que M. B...aurait exposés pour une entreprise, et que quatre versements en décembre 2007 d'un montant total de 996,13 euros, en chèque ou en espèces, correspondraient à des remboursements par des amis d'achats de champagne faits pour eux par M.B..., les pièces produites sur chacun de ces points ne permettent pas d'établir la nature ou l'origine des crédits bancaires litigieux ; qu'il en est de même des sommes de
147,71 euros et de 462,42 euros correspondant, selon les intéressés, aux notes de frais qu'ils versent au dossier, rémunérant des frais de constitution de sociétés civiles immobilières que
M. B...auraient engagés en 2006 et en 2007 pour le compte de tiers, les documents ainsi produits n'ayant aucune date certaine et le contexte de ces opérations demeurant... ; qu'enfin, si M. et Mme B...ont produit devant le tribunal ou devant la Cour diverses pièces rendant plausible le versement par le frère de M. B...d'une somme de 500 euros en février 2006 représentant la dernière échéance de remboursement d'un prêt familial, et le versement d'une somme de 2 000 euros représentant le produit de la vente d'un véhicule Mercedes, ces seules pièces restent néanmoins insuffisantes, en l'espèce, dès lors que ces versements ont été opérés en liquide, pour établir de manière certaine leur origine ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à contester le bien-fondé de l'imposition, en tant que revenus d'origine indéterminée, des diverses sommes évoquées ci-dessus ;
En ce qui concerne les pénalités :
12. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts :
" Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;
13. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme B...ont volontairement omis de déclarer tous les salaires que MmeB..., aide à domicile, percevait de particuliers employeurs, seuls les salaires qu'elle recevait de la Croix-Rouge pour cette activité, d'un volume sensiblement équivalent à celle exercée pour des employeurs particuliers, ayant été déclarés ; que, d'autre part, M. B...ne pouvait ignorer que la somme de 2 065 euros qu'il a perçue d'une SARL Khai, dont il était associé, constituait un revenu imposable, et doit être regardé comme ayant volontairement tenté d'éluder l'impôt sur cette somme ; qu'enfin, s'agissant des sommes taxées en tant que revenus d'origine indéterminée, l'importance cumulée et le nombre des omissions de déclaration, dont le total représente à lui seul 113 % et 139 % de tous les revenus déclarés ainsi que l'absence d'explication crédible hormis pour quelques crédits mineurs, démontrent à l'évidence une intention délibérée d'éluder l'impôt ; qu'ainsi, l'administration devant être regardée comme apportant la preuve du caractère délibéré de tous les manquements constatés, M. et Mme B...ne sont pas fondés à demander la décharge de la majoration qui leur a été infligée sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions aux fins de sursis de paiement :
15. Considérant qu'en vertu des dispositions des articles L. 277 et suivants du livre des procédures fiscales, le sursis de paiement accordé par l'administration fiscale n'a de portée que pendant la durée de l'instruction de la réclamation et de l'instance devant le tribunal administratif ; qu'aucune disposition légale n'a prévu de procédure de sursis de paiement pendant la durée de l'instance devant la cour administrative d'appel ; que, par suite, les conclusions de M. et Mme B...tendant à ce que la Cour leur accorde le sursis de paiement des impositions en litige sont irrecevables ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
16. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse la somme que M. et Mme C...B...sollicitent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.
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N° 15VE00018