3°) d'ordonner par voie de conséquence de la suspension de l'exécution du 8° de l'article 2 du décret n° 2021-384 du 2 avril 2021, celle de l'exécution des dispositions de l'article 3 de l'ordonnance n° 2020-1684 du 24 décembre 2020, ainsi que les dispositions des règlements universitaires d'examens pris en application de l'article L. 613-1 du code de l'éducation, en ce qu'elles imposent de porter à la connaissance des candidats la tenue d'un examen ou son adaptation dans un délai minimal de quinze jours avant le début de l'épreuve, pour les épreuves déjà prévues par voie dématérialisée, sans toutefois que ce délai ne soit inférieur à sept jours concernant les épreuves pour lesquelles aucune date n'a encore été fixée ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 250 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- leur requête est recevable dès lors qu'ils justifient d'un intérêt à agir ;
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que, en premier lieu, les dispositions contestées ont une incidence immédiate sur leur situation en ce qu'elles les empêchent de soutenir leurs épreuves en présentiel avant le 1er mai prochain alors que leur formation universitaire prévoit la réalisation d'un stage à compter de cette même date, en deuxième lieu, l'article 34 du décret du 29 octobre 2020 tel que modifie´ par le décret du 2 avril 2021 n'impose pas le maintien des examens au mois d'avril par voie dématérialisée, il est donc possible que les étudiants concernés soient obligés de soutenir leurs épreuves en présentiel, après le 2 mai 2021, ce qui serait de nature à perturber fortement leur période de stage, en troisième lieu, les examens en présentiel font partie intégrante de leur formation notamment les oraux qui doivent pouvoir se réaliser en conditions réelles face à un jury afin de garantir leur droit à l'éducation et à l'instruction et en, dernier lieu, ces dispositions instaurent une rupture d'égalité entre les usagers du service public de l'enseignement supérieur ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à plusieurs libertés fondamentales ;
- le décret contesté méconnaît le droit à l'éducation dès lors que les examens à distance ne permettent pas de vérifier correctement les connaissances des candidats, et aggravent les inégalités compte tenu du fait que tous les étudiants ne disposent pas d'une connexion internet, d'un environnement de travail permettant la réalisation d'examens dans de bonnes conditions, ou encore de la fraude potentielle ;
- il méconnaît la liberté d'enseignement dès lors que l'interdiction de soutenir des épreuves en présentiel jusqu'au 2 mai inclus n'est justifiée par aucune raison objective et est en contradiction avec la possibilité, pour les étudiants, de suivre des enseignements en présentiel dans les mêmes salles, dans les mêmes conditions et sur la même période, dans la limite de 20 % de la capacité de l'établissement ;
- il méconnaît le droit à l'égal accès à l'instruction ainsi que le principe d'égalité dès lors que, en premier lieu, il instaure une différence de traitement injustifiée entre les étudiants inscrits dans les formations de santé et les autres étudiants de l'enseignement supérieur, en deuxième lieu, cette interdiction bouleverse le calendrier universitaire ainsi que les projets des étudiants et les conditions d'examens à distance sont moins favorables pour les étudiants que des examens réalisés en présentiel car elles imposent à l'étudiant d'avoir la possibilité de s'isoler pour réaliser l'épreuve, mais également de disposer d'une connexion internet suffisante, ce qui n'est pas le cas de tous les étudiants et, en dernier lieu, les étudiants inscrits dans l'enseignement supérieurs suivent des enseignements en présentiel dans la limite de 20% de la capacité d'accueil de l'établissement, dans des salles qui sont les mêmes que celles dans lesquelles se tiennent en principe les examens en présentiel, dans les mêmes conditions, il n'existe donc pas de différence de situation objective, entre un étudiant assistant à un enseignement en présentiel et un étudiant effectuant un examen dans les mêmes conditions, qui justifierait de les traiter différemment.
II. Sous le n° 451396, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 5 et 13 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. Lilian Aubry et M. Anthony Ferrandon présentent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative les mêmes conclusions que celles présentées dans la requête susvisée n°451369. Ils présentent au soutien de ces conclusions des moyens identiques.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 avril 2021 sous les nos 451369 et 451396, la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation conclut dans le même sens que le ministre des solidarités et de la santé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 avril 2021 sous les nos 451369 et 451396, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet des deux requêtes. Il soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite, que les moyens soulevés ne sont pas de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée et qu'aucune atteinte grave et manifestement illégale n'est portée aux libertés fondamentales invoquées.
Les requêtes ont été communiquées au Premier ministre qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu
- la Constitution, et notamment son Préambule ;
- le code de l'éducation ;
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2021-160 du 15 février 2021 ;
- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;
- le décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été informées, sur le fondement de l'article 3 de l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions administratives, de ce qu'aucune audience ne se tiendrait et de ce que la clôture de l'instruction serait fixée le 13 avril 2021 à 13 heures.
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes visées ci-dessus, qui sont présentées, pour l'une, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative et, pour l'autre, sur le fondement de l'article L. 521-2 du même code, tendent à la suspension de l'exécution des mêmes dispositions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule ordonnance.
2. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". L'article L. 521-2 du même code dispose : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...)".
Sur les conclusions tendant à la suspension de l'exécution du 8° de l'article 2 du décret n° 2021-384 du 2 avril 2021 :
En ce qui concerne le cadre juridique :
3. La nouvelle progression de l'épidémie de covid-19 à l'automne 2020 en France a conduit le Président de la République à déclarer, par décret du 14 octobre 2020 pris sur le fondement des articles L. 3131-12 et L. 3131-13 du code de la santé publique, l'état d'urgence sanitaire à compter du 17 octobre 2020 sur l'ensemble du territoire national. L'article 1er de la loi du 14 novembre 2020 et l'article 2 de la loi du 15 février 2021 ont prorogé cet état d'urgence respectivement jusqu'au 16 février 2021, puis jusqu'au 1er juin 2021. Le Premier ministre a pris, sur le fondement de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique, le décret du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'urgence sanitaire, dont la dernière modification antérieure aux requêtes susvisées résulte d'un décret n° 2021-384 du 2 avril 2021.
4. L'article 34 du décret du 29 octobre 2020 dans sa rédaction issue du 8° de l'article 2 du décret du 2 avril 2021 prévoit que : " Jusqu'au 2 mai inclus, les épreuves des examens mentionnés au présent article se déroulent à distance, à l'exception des examens organisés pour la délivrance des diplômes sanctionnant les formations de santé mentionnées au titre III du livre VI du code de l'éducation ".
En ce qui concerne les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
5. M Lilian Aubry et M Anthony Ferrandon, étudiants de Master 1 à l'Université Jean Moulin à Lyon, demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de l'exécution des dispositions précitées du 8° de l'article 2 du décret n° 2021-384 du 2 avril 2021, en tant qu'elles rendent en principe obligatoire jusqu'au 2 mai le déroulement à distance des examens qui y sont mentionnés. Ils soutiennent que ces dispositions méconnaissent le droit à l'éducation, la liberté d'enseignement ainsi que l'égal accès à l'instruction.
6. Il est cependant constant que l'organisation d'examens qui requièrent la présence simultanée de tous les étudiants issus d'une même formation, pour l'ensemble des spécialités, dans le respect des règles de distanciation sociale, est particulièrement difficile à mettre en oeuvre. Si les requérants arguent que cette organisation a pu être mise en place pour les examens du premier semestre universitaire, il résulte de l'instruction que dans les dernières semaines, la propagation du virus était en augmentation et que des variants plus contagieux se répandaient rapidement sur l'ensemble du territoire entraînant une importante dégradation de la situation hospitalière et un nombre élevé de décès.
7. Eu égard à ce qui précède, la seule circonstance que les dispositions attaquées imposent, pour un temps limité et au motif de la situation sanitaire, que les examens se déroulent à distance ne saurait porter, en elle-même, une atteinte grave et manifestement illégale aux droits et libertés invoquées. Les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 521-2 ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
En ce qui concerne les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
8. M Lilian Aubry et M Anthony Ferrandon demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de l'exécution des mêmes dispositions du décret du 2 avril 2021 par les mêmes moyens que ceux présentés sur le fondement de l'article L. 521-2.
9. Le droit à l'éducation et la liberté d'enseignement n'imposent nullement, en premier lieu, que le contrôle de l'enseignement ne puisse être organisé à distance.
10. En second lieu, ni les dérogations prévues pour les examens dans certaines formations de santé, justifiées par les caractéristiques des épreuves et les conditions de travail particulières de ses étudiants, ni la circonstance que les conditions d'examen peuvent être différentes selon que les épreuves ont ou n'ont pas lieu pendant le contrôle continu durant les formations, ni le fait enfin que les universités qui fixeront la date des examens au-delà du 2 mai, ne seront pas tenues de les organiser à distance, ne sont de nature à caractériser une atteinte au principe d'égalité entre les étudiants, dès lors que ces derniers se trouvent dans une situation différente. Les requérants ne sont, par suite, pas fondés à soutenir que ces dérogations seraient de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité des dispositions litigieuses.
Sur les conclusions tendant à la suspension de l'exécution des dispositions de l'article 3 de l'ordonnance n° 2020-1684 du 24 décembre 2020, ainsi que de celles des règlements universitaires d'examens pris en application de l'article L. 613-1 du code de l'éducation :
11. Ces conclusions n'ont été présentées que dans l'hypothèse où celles dirigées contre le 8° de l'article 2 du décret n° 2021-384 du 2 avril 2021 seraient accueillies. Ces dernières n'étant, ainsi qu'il résulte des points 6 à 10, pas accueillies, les conclusions tendant à la suspension de l'exécution des dispositions de l'article 3 de l'ordonnance n° 2020-1684 du 24 décembre 2020, ainsi que de celles des règlements universitaires d'examens pris en application de l'article L. 613-1 du code de l'éducation et présentées tant sur le fondement de l'article L. 521-1 que sur celui de l'article L 521-2, doivent être, en tout état de cause, regardées comme n'ayant pas été présentées.
12. Il résulte de l'ensemble de ce qui est ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur leur urgence, que les requêtes de M. Aubry et de M. Ferrandon doivent être rejetées, y compris, par voie de conséquence, les conclusions tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
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Article 1er : Les requêtes de M. Aubry et M. Ferrandon sont rejetées.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Lilian Aubry, M. Anthony Ferrandon, au ministre des solidarités et de la santé ainsi qu'à la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Copie en sera adressée au Premier ministre.