Résumé de la décision
La société "Sauter en parachute" a contesté quatre décisions de suspension de son activité de parachutisme sur l'aéroport d'Amiens-Glisy, prises le 2 mai 2019, puis confirmées par deux nouvelles décisions le 31 mai et le 28 juin 2019. Le Conseil d'État a rejeté cette requête, considérant que les décisions étaient légales tant sur le plan de la forme que du fond. Il a souligné que ces mesures étaient fondées sur des préoccupations de sécurité en raison de manquements aux règles de coordination des activités sur l’aérodrome, justifiant ainsi la suspension provisoire de l’activité.
Arguments pertinents
1. Caractère réglementaire des décisions : Le Conseil d'État a souligné que les décisions litigieuses, bien qu'affectant spécifiquement la société requérante, présentaient un caractère d'actes réglementaires et n'avaient pas besoin d'une procédure contradictoire ni d'une motivation, conformément aux principes énoncés dans le Code des relations entre le public et l’administration. Cela fonde la légitimité de l'action administrative en matière de police spéciale sur les aérodromes.
2. Attribution de compétence : Le Conseil a affirmé que le ministre chargé de l'aviation civile détient l’autorité pour réglementer la circulation aérienne et que le recours à ce pouvoir était justifié. Ainsi, le moyen de l’incompétence, reprochant que la réglementation du parachutisme serait du ressort du ministre chargé des sports, a été écarté : "le ministre chargé de l'aviation civile [...] dispose à cet effet, en vertu des dispositions citées ci-dessus, d'un pouvoir de police spéciale."
3. Justification des suspensions : Le Conseil a examiné les révélations d'incidents et les hausses significatives de sauts lors d'une réunion de sécurité, expliquant que "le ministre, à qui il appartenait de prendre une mesure de nature à prévenir les risques d'accident résultant de l'activité de parachutisme, a édicté des interdictions adaptées à ces risques." Par conséquent, les décisions étaient proportionnées et temporaires, en attendant une étude de sécurité.
Interprétations et citations légales
1. Code de l'aviation civile - Article R. 221-3 : Cet article autorise la suspension de l'utilisation d'un aérodrome pour des raisons de sécurité ou d'ordre public : "l'utilisation d'un aérodrome ouvert à la circulation aérienne publique peut, à toute époque, être soumise à certaines restrictions ou temporairement interdite, si les conditions de la circulation aérienne [...] le justifient."
2. Code de l'aviation civile - Article D. 131-6 : Cet article précise que le ministre de l'aviation dispose des compétences nécessaires pour établir des réglementations concernant la circulation aérienne. Ainsi, le rôle et la responsabilité du ministre dans la régulation des aérodromes sont clairement définis : "le ministre chargé de l'aviation civile et le ministre chargé des armées établissent la réglementation propre à la circulation aérienne."
3. Code de justice administrative - Article L. 761-1 : Cet article stipule que les frais d'une instance peuvent être mis à la charge de la partie perdante, ce qui a conduit à la décision de faire payer des frais à la société requérante, car l'État n'était pas la partie perdante de l'affaire : "Il y a lieu [...] de mettre à la charge de la société 'Sauter en parachute' la somme de 1 500 euros à verser respectivement à l’État [...]".
Cette décision rappelle l'importance de la régulation de la sécurité aérienne et la latitude accordée à l'administration pour agir en matière de contrôle des activités potentiellement dangereuses, tout en soulignant le cadre juridique dans lequel ces actions doivent s'inscrire.