Résumé de la décision :
Dans cette décision, le Conseil d'État a rejeté la requête du Conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires visant à annuler un décret du 13 septembre 2016. Ce décret modifie les obligations d'information qui incombaient auparavant au conseil dans le cadre de la constitution, de la modification et de la dissolution des sociétés de participations financières d'administrateurs judiciaires ou de mandataires judiciaires. Le juge a conclu que le décret était conforme à la loi et qu’il ne portait pas atteinte aux missions du conseil national.
Arguments pertinents :
1. Conformité du décret au cadre légal : Le Conseil d'État a souligné que le décret attaqué a été pris en application de l'article 67 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, et non en raison de l'ordonnance du 31 mars 2016. Par conséquent, l'annulation de cette ordonnance ne pouvait justifier la demande d'annulation du décret. Cela met en avant le principe que les actes administratifs restent valides tant que la législation qui les fonde n'est pas annulée.
2. Pouvoir réglementaire et non-incompétence : Le décret a été jugé compétent, car les articles L. 811-7 et L. 812-5 du Code de commerce confèrent au pouvoir réglementaire le soin de préciser les conditions d'application des règles déontologiques. Le pouvoir règlementaire peut ainsi compléter la législation par décret (cf. Code de commerce - Articles L. 811-7 et L. 812-5).
3. Contrôle exercé par le Conseil national : L'article L. 814-2 du Code de commerce attribue au Conseil national le soin de veiller au respect des obligations des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires, mais n'implique pas un droit d'information préalable concernant les modifications de sociétés. Cela a conduit le Conseil d'État à conclure que la restriction des informations ne constituait pas une atteinte à ses missions de contrôle.
4. Limitations des informations requises : Bien que le décret limite certaines informations, la loi précise que les sociétés doivent tout de même informer le Conseil national une fois par an de la composition de leur capital social (cf. loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 - Article 31-1). Le Conseil d'État a noté qu'il n'existait pas de preuve que l'absence d'informations systématiques nuise à la capacité du Conseil national à exercer ses missions.
5. Absence d'incompétence sur les conflits d'intérêt : Le décret ne portant pas sur les sociétés d'exercice libéral, le Conseil d'État a jugé que la question des conflits d'intérêts ne relevait pas de son domaine d'application, écartant ainsi l'argument d'incompétence négative.
Interprétations et citations légales :
- Application de la loi n° 2015-990 : L'article 67 de la loi stipule que le décret devait mettre en œuvre des dispositions relatives à l'exercice des professions libérales, en tenant compte des règles de déontologie, impliquant un cadre légal qui justifie les modifications apportées par décret.
- Détermination réglementaire : Les articles L. 811-7 et L. 812-5 du Code de commerce précisent que le pouvoir réglementaire est habilité à fixer les conditions d'application des lois, y compris les obligations des professionnels (cf. Code de commerce - Articles L. 811-7, L. 812-5).
- Contrôle des professions réglementées : Selon l'article L. 814-2, le Conseil national a pour mission de veiller au respect des obligations des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires, sans que la loi ne spécifie des modalités précises pour l'information préalable sur les modifications des sociétés, ce qui soutient l'idée que le contrôle peut être exercé même sans informations systématiques.
Ces éléments mettent en lumière la complexité du droit régissant les professions réglementées et le rôle de chaque institution dans la régulation de ces professions. Le Conseil d'État, par sa décision, a affirmé la légalité du pouvoir réglementaire dans ce domaine spécifique.