Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 2 novembre et 15 décembre 2017, M. C..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 12 juin 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour
mention " vie privée et familiale ", à défaut de procéder à un nouvel examen de sa demande dans un délai d'un mois et lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
En ce qui concerne l'arrêté dans son ensemble, il soutient que l'autorité signataire était incompétente pour prendre l'arrêté contesté.
En ce qui concerne la décision refusant de l'admettre au séjour, il soutient que :
- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle porte atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants en violation de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français, il soutient que :
- elle est illégale dans la mesure où il remplit les conditions permettant de bénéficier de plein droit d'un titre de séjour ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi, il soutient qu'elle méconnaît l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il justifie de risques en cas de retour dans son pays d'origine.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 décembre 2017, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête et reprend ses moyens de première instance.
Par ordonnance du 15 novembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 27 décembre 2017.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 novembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D...a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., ressortissant angolais, né le 21 février 1992, est entré irrégulièrement en France le 18 février 2013. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), le 19 mai 2014, puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), le 23 décembre 2014. Le 27 octobre 2015, il a sollicité un titre de séjour
mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions du 7° de
l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 23 janvier 2017, le préfet de la Gironde a rejeté cette demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
M. C...relève appel du jugement du 12 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté contesté :
En ce qui concerne l'arrêté dans son ensemble :
2. En l'absence d'éléments nouveaux en appel venant au soutien du moyen soulevé devant le tribunal tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté en litige du 23 janvier 2017, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à
l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
4. M. C...soutient qu'il est entré en France en 2013 et y a établi sa vie familiale, avec une compatriote et leurs deux enfants. Toutefois, il n'établit ni même n'allègue une communauté de vie avec ces derniers et il est constant que sa compagne, également de nationalité angolaise, a fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français en date du 23 janvier 2017, dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 12 juin 2017 et par un arrêt de la présente cour du 30 novembre 2017. Compte tenu du jeune âge des enfants du couple, nés en 2009 et 2016, et du fait que la compagne de M. C...est également ressortissante angolaise, aucune circonstance particulière ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue dans leur pays d'origine. De plus, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'appelant aurait développé en France des liens d'une intensité particulière en dehors de cette cellule familiale ni qu'il serait dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a résidé jusqu'à l'âge de 21 ans. Il n'établit pas davantage une intégration réussie dans la société française. Dans ces conditions, eu égard aux conditions de son séjour en France, et à la situation irrégulière de sa compagne, la décision portant refus d'admission au séjour n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et ne peut donc être regardée comme méconnaissant les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée était, à la date de son édiction, entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.
5. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...)".
6. Eu égard à la situation telle qu'elle a été exposée au point 4 de l'appelant, ce dernier ne justifie pas des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance d'une carte de séjour " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.
7. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : "Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale.". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
8. Ainsi qu'il a été dit au point 4, il n'est pas établi que la cellule familiale de l'appelant ne puisse se reconstituer en Angola avec sa compagne de même nationalité et leurs deux enfants, âgés de huit ans et seulement neuf mois à la date de la décision contestée, laquelle n'a pas pour effet de le séparer de ses enfants. La seule circonstance que l'un de ces enfants n'a jamais connu le pays d'origine de ses parents n'est pas de nature à démontrer, ainsi que l'ont estimé les premiers juges, que le préfet de la Gironde aurait méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
9. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C...remplirait les conditions pour bénéficier de plein droit d'un titre de séjour. Il n'est dès lors pas fondé à soutenir qu'il serait au nombre des étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement.
10. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 4 et 8, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle et familiale de l'appelant ne peuvent qu'être écartés.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
11. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à
l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Cet article énonce que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
12. Au soutien du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'appelant fait valoir qu'en raison de son engagement politique, comme membre du mouvement révolutionnaire d'intervention sociale et militant du parti CASA-CE, il encourt des risques pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine. Toutefois, l'intéressé, dont la demande d'asile a d'ailleurs été définitivement rejetée, n'apporte aucun élément précis et circonstancié de nature à établir la réalité des craintes alléguées auxquels il serait personnellement exposé en Angola. Ce moyen doit, par suite, être écarté.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 janvier 2017. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C..., au ministre de l'intérieur et à Me A.... Une copie en sera adressée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 25 avril 2018 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
Mme Aurélie Chauvin, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 mai 2018
Le rapporteur,
Aurélie D...Le président,
Éric Rey-BèthbéderLe greffier,
Vanessa Beuzelin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 17BX03449