Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 30 juillet 2015, Mme D..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;
3°) dans l'hypothèse où la cour annulerait le refus de titre de séjour, d'enjoindre au préfet de Saône-et-Loire, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, à titre subsidiaire de réexaminer sa demande et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ; dans l'hypothèse où la cour n'annulerait que la décision portant obligation de quitter le territoire français de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'administration ait à nouveau statué sur son cas ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'elle ne justifiait pas d'une communauté de vie avec son époux alors qu'elle atteste de la réalité de celle-ci qui existe depuis 2012 et se poursuit encore aujourd'hui ;
- la décision de refus de séjour prise à son encontre méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;
- elle est contraire aux dispositions du 7° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle est mariée avec un ressortissant français depuis plus de trois ans et que la communauté de vie n'a jamais cessé ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français.
La requête a été communiquée au préfet de Saône-et-Loire qui n'a pas produit d'observations.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,
- et les observations de MeA..., représentant Mme D....
1. Considérant que Mme B...D..., née le 6 mai 1968 à Mahamasina (Madagascar), de nationalité malgache, est entrée en France le 3 août 2012 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa touristique ; qu'elle a sollicité, le 8 août 2014, la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint de français en se prévalant de son mariage célébré le 24 avril 1997 à Madagascar avec M. C...D..., ressortissant français ; que, par décisions en date du 16 janvier 2015, le préfet de Saône-et-Loire a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera renvoyée ; que Mme D... demande l'annulation du jugement du 11 juin 2015, par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de Saône-et-Loire du 16 janvier 2015 ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne le refus de délivrance d'un titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du même code, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : /(...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 de ce code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour " compétences et talents " sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois " ; qu'aux termes du 6ème alinéa de l'article L. 211-2-1 du même code : " (...) Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour (...) " ;
3. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que la production d'un visa de long séjour délivré, le cas échéant, selon les modalités fixées au 6ème alinéa de l'article L. 211-2-1, est au nombre des conditions auxquelles est subordonnée la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 ; que, dès lors, le préfet peut refuser une telle carte de séjour en raison du défaut de production par l'étranger d'un visa de long séjour ;
4. Considérant que pour refuser d'admettre Mme D... au séjour le préfet de Saône et Loire a relevé que celle-ci, bien que mariée à un ressortissant français et entrée régulièrement sur le territoire français le 3 août 2012 en possession d'un visa de court séjour de 28 jours, valable du 1er août 2012 au 29 août 2012, ne pouvait prétendre à la délivrance de plein droit à la carte de séjour " vie privée et familiale " au titre du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle n'était pas en possession du visa de long séjour requis par les dispositions sus rappelées de l'article L. 311-7 de même code et qu'elle ne remplissait pas les conditions légales pour se voir délivrer un visa de long séjour sur place à l'occasion de sa demande de titre de séjour, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 211-2-1 du même code, le mariage n'ayant pas été célébré en France ; que cette circonstance pouvait, à elle-seule, fonder le refus de délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjointe de ressortissant de nationalité française opposé par le préfet de Saône-et-Loire en application des dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, le refus de délivrance de titre de séjour litigieux n'a pas violé lesdites dispositions ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
6. Considérant qu'un refus de délivrance d'un titre de séjour ne porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale d'un ressortissant étranger entré sur le territoire français que si la durée et les conditions de son séjour en France permettent de tenir pour établi l'intensité de ses liens personnels et familiaux avec la France, notamment au regard de leur ancienneté, et de leur stabilité ; que si Mme D...fait valoir qu'elle est mariée depuis le 24 avril 1997 à M. D...et que son époux et leurs deux enfants résident sur le territoire français, la requérante n'établit pas, à la date de la décision attaquée, la réalité d'une communauté de vie avec son époux par la seule production devant la cour d'une attestation d'un tiers certifiant un hébergement du couple dans un logement situé à Epinac (71360) ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme D...maintienne des relations suivies avec ses deux enfants majeurs qui, titulaires d'un titre de séjour , poursuivent en France leur scolarité ; que Mme D...ne justifie pas, par ailleurs, la réalité de son insertion dans la société française alors qu'elle a vécu jusqu'à l'âge de 44 ans en dehors du territoire français ; que dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment du caractère récent du séjour en France de l'intéressée, la décision par laquelle le préfet de Saône-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que le moyen tiré de la violation des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, par suite, être écarté ;
7. Considérant que la décision de refus de titre de séjour prise à l'encontre de Mme D... par le préfet de Saône et Loire n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation de l'intéressée ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. Considérant, en premier lieu, que, comme il a été dit ci-dessus, la décision refusant de délivrer un titre de séjour à la requérante n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen soulevé à l'encontre de la décision d'éloignement et tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la précédente décision, doit être écarté ;
9. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 7° L'étranger marié depuis au moins trois ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage et que le conjoint ait conservé la nationalité française ; / (...) " ;
10. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, les attestations et les pièces diverses, pour partie établies postérieurement à la décision attaquée, ne suffisent pas à établir la réalité de la vie commune alléguée à la date de la décision du préfet de Saône et Loire; que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a dès lors pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
11. Considérant, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'appui de la contestation de la décision fixant le pays de destination doit être écarté pour les mêmes motifs que précédemment ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 11 juin 2015, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de Saône et Loire du 16 janvier 2015 ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
13. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation des décisions attaquées, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, une quelconque somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que les conclusions présentées sur ce fondement par Mme D...doivent, par suite, être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Saône et Loire.
Délibéré après l'audience du 4 février 2016 à laquelle siégeaient :
Mme Verley-Cheynel, président de chambre,
M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,
Mme Samson-Dye, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 mars 2016.
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N° 15LY02700