Procédure devant la Cour :
I - Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2018 sous le n° 18MA03651, M. B... représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 17 juillet 2018 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2018 du préfet de Vaucluse portant obligation de quitter le territoire ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- résidant régulièrement sur le territoire puisque titulaire d'un visa D en cours de validité et d'une autorisation de travail, il ne pouvait pas entrer dans le champ d'application de l'article L. 511-1, I, 8° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ne vise que les personnes ne résidant pas régulièrement en France ;
- l'obligation de quitter le territoire qui sanctionne l'absence d'autorisation de travail n'inclut pas dans son champ le cas du non-respect du périmètre de l'autorisation de travail ;
- il n'appartient pas au travailleur étranger de faire les démarches afférentes à la délivrance d'une autorisation de travail, le moyen de défense du préfet est par suite inopérant ;
- le fait de travailler pour un employeur autre que celui pour lequel il avait obtenu un titre de séjour en qualité de travailleur saisonnier est sans influence sur les modalités du visa permettant son entrée en France ;
- il s'est conformé à ses obligations mises à sa charge par le visa d'entrée tenant à la visite médicale et à la demande de visa dans les délais requis ;
- la mesure d'éloignement est manifestement disproportionnée par rapport aux faits reprochés.
II - Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2018 sous le n° 18MA03652, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement du 17 juillet 2018 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables ;
- les moyens énoncés dans sa requête présentent un caractère sérieux.
La requête a été communiquée au préfet de Vaucluse, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné Mme Evelyne Paix, présidente assesseure, pour présider la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de Mme Mosser, présidente de la 3ème chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Haïli.
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes n° 18MA03651 et n° 18MA03652, présentées pour M. B..., présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un même arrêt.
2. M. B..., ressortissant marocain, né le 28 janvier 1996, est entré en France le 27 juin 2010 sous couvert d'un visa D du 25 juin au 23 septembre 2018 obtenu dans le cadre d'une demande d'autorisation de travail pour conclure un contrat de travail " travailleur saisonnier ", validé par les services de la Dirreccte le 18 mai 2018. Lors d'un contrôle effectué par les agents de la police aux frontières le 12 juillet 2018, il a été interpellé en action de travail illégal sur un chantier de bâtiments en cours de construction sur le territoire de la commune de Sorgues (84700). Par arrêté du 12 juillet 2018, le préfet de Vaucluse l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire. Le requérant demande à la Cour, par sa requête enregistrée sous le n° 18MA03651, d'annuler le jugement du 17 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire. Il demande le sursis à exécution du même jugement par sa requête enregistrée sous le n° 18MA03652.
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux :
3. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 8° Si l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois a méconnu l'article L. 5221-5 du code du travail (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 5221-5 du code du travail : " Un étranger autorisé à séjourner en France ne peut exercer une activité professionnelle salariée en France sans avoir obtenu au préalable l'autorisation de travail mentionnée au 2° de l'article L. 5221-2. L'autorisation de travail est accordée de droit à l'étranger autorisé à séjourner en France pour la conclusion d'un contrat d'apprentissage ou de professionnalisation à durée déterminée... ". Aux termes de l'article L. 5221-7 du même code : " L'autorisation de travail peut être limitée à certaines activités professionnelles ou zones géographiques. (...) ".
4. Il résulte des dispositions de l'article L. 511-1-8° du code précité que peut être prononcée une obligation de quitter le territoire à l'encontre d'un étranger ayant méconnu l'obligation de détenir une autorisation de travail pour exercer une activité professionnelle, à condition qu'il ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois. Le seul dépôt d'une demande de titre de séjour ne saurait faire obstacle à ce que l'autorité administrative décide l'éloignement de l'étranger qui entre dans le cas prévu au 8° de l'article L. 511-1 précité.
5. Il est établi et non contesté que M. B... a été contrôlé en action de travail sur un chantier de bâtiments et travaux publics à Sorgues le 12 juillet 2018 sans être titulaire d'une autorisation de travail en méconnaissance de l'article L. 5221-5 du code du travail. Il est constant qu'il ne résidait pas régulièrement en France depuis plus de trois mois à la date de l'arrêté contesté. Par ailleurs, les circonstances que M. B... ait obtenu un visa D du 25 juin 2018 au 23 septembre 2018 lui accordant une autorisation de travail validée par les services de la Direccte en date du 18 mai 2018 au profit de l'employeur Rachid B...10 place Forbin 13300 Salon de Provence ayant pour activité la culture des légumes, melons et racines tubercules et qu'il ait sollicité la délivrance d'un titre de séjour pluriannuel en qualité de travailleur saisonnier dans le délai imparti de deux mois suivant son arrivée en France en application de l'article L. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont sans incidence, au regard de son statut, sur l'irrégularité des conditions d'exercice de son activité professionnelle sur un chantier à Sorgues pour laquelle il est dépourvu d'une autorisation de travail.
6. Dans ces conditions, M. B... entrait dans le champ des dispositions du 8° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par conséquent, le préfet de Vaucluse a pu, sans commettre d'erreur de droit, ni d'erreur de fait, prendre à son encontre un arrêté portant obligation de quitter le territoire français.
7. Il résulte des pièces du dossier que M. B..., célibataire et sans charge de famille et dont les attaches personnelles et familiales se situent au Maroc, n'a pas respecté son engagement à travailler sous couvert de l'autorisation de travail pour l'employeur ayant demandé son introduction par le travail, et a été contrôlé en action sur un chantier sans être titulaire de l'autorisation requise en vertu des dispositions de l'article L. 5221-5 du code du travail. Dans ces conditions, le préfet de Vaucluse ne peut être regardé comme ayant entaché son arrêté ni d'une erreur manifeste d'appréciation ni de disproportion manifeste au regard de la situation personnelle et sociale de l'intéressé.
8. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des frais d'instance doivent également être rejetées.
Sur les conclusions tendant au sursis à exécution du jugement :
9. Le présent arrêt statuant sur la demande d'annulation du jugement attaqué du tribunal administratif de Marseille, la requête tendant au sursis à exécution de ce jugement est devenue sans objet.
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution présentées par M. B... dans la requête n° 18MA03652.
Article 2 : La requête enregistrée sous le n° 18MA03651 de M. B... et ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.
Délibéré après l'audience du 20 décembre 2018, où siégeaient :
- Mme Paix, présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Haïli, premier conseiller,
- Mme Courbon, premier conseiller.
Lu en audience publique le 17 janvier 2019.
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N°18MA03651,18MA03652