Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 26 mai 2015, M. B..., représenté par la SCP Philippe Sand, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;
3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. B... soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- le nouveau statut est entaché de détournement de pouvoir ;
- il ne peut renvoyer aux dispositions du code de la santé publique qui ne sont applicables qu'aux personnels des établissements publics de santé mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 ;
- il méconnait les dispositions d'ordre public du code du travail, en particulier les dispositions de l'article L. 1131-1 (non-discrimination) et celles des articles L. 2251-1, L. 2254-1 (principe de faveur) et L. 3123-11 (égalité de traitement entre les salariés à temps plein et à temps partiel) ;
- il porte atteinte au principe d'égalité.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'aviation civile ;
- le code de la santé publique ;
- le code du travail ;
- la loi 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Orio,
- les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public,
- et les observations de Mes Guillaume et Sikorav, pour Aéroports de Paris.
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
1. Considérant qu'il résulte des motifs mêmes du jugement, qui retient une différence de situation liée aux modalités d'exercice des fonctions, que le tribunal administratif a suffisamment répondu au moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement au regard de l'argumentation invoquée en première instance par M.B..., qui se bornait à contester qu'une organisation du travail par vacations de 24 heures et le fait de pouvoir exercer une activité complémentaire puisse être considéré comme spécifique ; que, par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité ;
Sur son bien-fondé :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 251-3 du code de l'aviation civile :
" Le conseil d'administration de la société Aéroports de Paris établit les statuts du personnel ainsi que les échelles de traitements, salaires et indemnités et les soumet à l'approbation du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre chargé de l'économie et des finances. A défaut de décision expresse intervenant dans le délai de deux mois à compter de la réception de la délibération, l'approbation est réputée acquise. " ;
3. Considérant que les dispositions générales relatives au champ d'application du nouveau statut des personnels d'Aéroports de Paris (ADP) réputé approuvé le 7 décembre 2010, à défaut de décision expresse des ministres à qui il avait été adressé par courrier du
6 octobre 2010, énoncent que " l'ensemble des articles relatifs à la durée du travail, à la rémunération, à l'avancement, la promotion (articles 12 à 29 inclus), à la cessation d'activité dans le cadre de la retraite (article 32) ou dans le cadre d'un licenciement (article 34) ne sont pas applicables : / - aux médecins exerçant leur activité dans les services médicaux d'urgence d'Aéroports de Paris. La durée de travail et la rémunération de ces salariés sont déterminées au regard des règles fixées par le code de la santé publique pour les médecins hospitaliers exerçant leurs fonctions dans les établissements publics de santé (...) " ;
4. Considérant, en premier lieu, que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que dans l'un comme dans l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier ; qu'en l'espèce, le requérant, en se bornant à soutenir que d'autres salariés, comme les infirmières, les ambulanciers et les pompiers, travaillent par plages de 24 heures, ne conteste pas sérieusement que les médecins qui travaillent dans les services médicaux d'urgence d'ADP sont les seuls salariés de la société à travailler selon un rythme annuel de 52 vacations de 24 heures ; que ce rythme correspond, ainsi que stipulé dans les contrats de travail des médecins, à 84 % du temps de travail d'un praticien hospitalier à temps plein, et est rémunéré par référence à la rémunération d'un tel médecin, rémunération à laquelle s'ajoutent des indemnités de sujétions dites de pénibilité, une indemnité d'ancienneté et des indemnités de congés payés ; qu'ainsi, la circonstance que l'ensemble des articles relatifs à la durée du travail, à la rémunération, à l'avancement, à la promotion (articles 12 à 19 inclus), à la cessation d'activité dans le cadre de la retraite (article 32) ou dans le cadre d'un licenciement (article 34) du statut ne leur soient pas applicables est liée aux modalités particulières d'exercice de leurs fonctions et, en particulier, à leur rémunération par vacations, et est en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit ; qu'eu égard au fait que les médecins d'urgence d'ADP peuvent également prétendre à une indemnité de départ à la retraite en application de l'article L. 1237-9 du code du travail, à une indemnité de licenciement en application de leur contrat, qu'ils disposent de possibilités d'avancement et qu'il n'est pas établi que les différences se traduiraient par des pertes financières, cette différence de traitement n'apparait pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier ; qu'il n'est pas non plus établi que ces différences constitueraient des discriminations prohibées au sens des articles L. 1131-1 et suivants du code du travail ou auraient été prises en raison de la seule quotité de temps de travail de ces médecins en méconnaissance des dispositions de l'article L. 3123-11 du code du travail ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que si le nouveau statut dispose que la durée du travail et la rémunération des médecins d'ADP sont déterminées au regard des règles fixées par le code de la santé publique, une telle mention n'a pas pour effet de rendre directement opposables les dispositions en cause qui ne tiennent lieu que de référence ; que le moyen tiré de ce que cette mention méconnaitrait les dispositions de l'article L. 6141-1 du code de la santé publique ou encore de l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 modifiée ne peut qu'être écarté ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'il n'existe aucun droit au maintien des avantages résultant d'un statut ; qu'en tout état de cause, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de faveur énoncé aux articles L. 2251-1 et L. 2254-1 du code du travail est inopérant à l'égard de la décision individuelle d'approbation du statut règlementaire des personnels, qui est un acte réglementaire et non une convention ou un accord au sens des dispositions du code du travail ; que ce moyen ne peut qu'être écarté ;
7. Considérant enfin, que par un arrêt du 24 octobre 2000, la Cour de Cassation a jugé qu'aucune disposition ne permettait de ne pas appliquer aux médecins du travail d'ADP le statut des personnels ; qu'à la suite de cet arrêt, ADP a conclu en 2004 avec les médecins de ses services d'urgence de nouveaux contrats de travail dans lesquels ceux-ci s'engageaient à renoncer au bénéfice du statut réglementaire du personnel de la société ; que par un arrêt du 8 avril 2009, la Cour de Cassation a jugé qu'un salarié ne peut renoncer par avance au bénéfice du statut réglementaire d'ordre public dont il relève ; que, tirant les conséquences de cet arrêt la nouvelle rédaction du statut du personnel exclut expressément que certaines dispositions soient applicables aux médecins des services d'urgence ; que la circonstance qu'elle ait été adoptée alors que des contentieux de ces médecins étaient pendants devant la juridiction prud'homale n'est pas, dans ces conditions, de nature à établir un détournement de pouvoir ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B...le versement des sommes demandées par l'Etat ainsi que la société Aéroports de Paris sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'Etat ainsi que par la société Aéroports de Paris au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 15VE01608